Je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui ne pouvait pas être là ce matin, et je vais vous essayer de vous apporter les réponses que vous attendez.
Vous attirez l’attention du Gouvernement sur la gestion du calcul et de recouvrement des impôts locaux par l’État, en faisant allusion au rapport annuel de la Cour des comptes pour 2009, qui porte notamment sur la détermination des bases cadastrales et sur leur gestion par les services de l’État.
Pour ma part, je partage votre point de vue et le constat de la Cour des comptes sur l’ancienneté des valeurs locatives, qui n’ont pas été redéfinies depuis leur création. Une réforme s’impose à l’évidence. Du reste, à la fin de l’année 2007, lors du Congrès des maires et des présidents de communautés de France, le Président de la République a appelé de ses vœux une telle réforme de la fiscalité locale. De même, le Premier ministre s’est récemment exprimé en ce sens, à l’occasion de la Conférence nationale des exécutifs.
La Cour des comptes recommande de clarifier les relations avec les collectivités territoriales. Une telle clarification a déjà été présentée à l’occasion des derniers débats budgétaires.
Cela étant, votre question ne donne qu’une vision partielle du financement des charges qui incombent à l’État en matière d’impôts locaux.
En effet, le rapport de la Cour des comptes indique également ceci : « Il est vrai que, si les coûts de gestion sont surfacturés, les coûts réels pour l’État des dégrèvements et des admissions en non-valeur représentent, en revanche, beaucoup plus que 3, 6 % des taxes locales, la surfacturation venant compenser une sous-facturation. »
De plus, ce rapport ne prend pas en compte l’ensemble des relations financières entre l’État et les collectivités territoriales. En effet, l’État a bien plus que les seuls coûts de gestion des impôts locaux à sa charge. Au-delà des dégrèvements ordinaires et des admissions en non-valeur mentionnés dans le rapport, l’État doit également supporter le coût de trésorerie, lié au fait qu’il verse mensuellement le produit des recettes locales aux collectivités locales, alors qu’il ne perçoit les impôts qu’en toute fin d’année, ainsi que les activités de conseil auprès des collectivités que ses services assurent.
En face, l’État perçoit non seulement les frais de recouvrement et de dégrèvements, mais, pour être exhaustif, il allège aussi sa charge de trésorerie, grâce au dépôt gratuit des fonds de collectivités au Trésor public, ce qui représente également une garantie de sécurité de ces fonds pour lesdites collectivités. En moyenne, sur la période 2001-2007, ces ressources ont représenté 5 milliards d’euros, les charges atteignant un montant équivalent.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, l’État ne s’enrichit pas au détriment des contribuables ou des collectivités locales. Il y a un équilibre parfait, et non fortuit – en tout cas, c’est mon interprétation –, entre les coûts supportés par l’État et ses recettes. Vous trouverez des explications détaillées sur ce sujet dans l’annexe du projet de loi de finances pour 2009 retraçant l’effort financier de l’État en faveur des collectivités territoriales.
Je souligne par ailleurs que ce calcul ne prend pas en compte les dégrèvements législatifsqui relèvent, eux, de l’initiative du législateur. Or on ne peut pas en faire complètement abstraction.
Prenons l’exemple des dégrèvements sur la taxe d’habitation pour les contribuables les plus modestes, dégrèvements, qui représentent 2, 2 milliards d’euros par an. Je ne suis pas certain que, si l’État ne les prenait pas en charge, les collectivités territoriales dont le potentiel fiscal est faible pourraient accorder à leurs contribuables des mesures d’allégement équivalentes. Or, sans ces dégrèvements, un grand nombre de contribuables ne pourraient pas acquitter leur impôt, ce qui se traduirait par une augmentation des admissions en non-valeur, qui sont prises en charge par l’État. L’équilibre auquel nous sommes parvenus, et dont je faisais état à l’instant, serait rompu, au détriment de l’État.
À l’heure actuelle, il n’y a donc pas lieu de modifier les frais d’assiette et de recouvrement.
Telle est la réponse que je souhaitais, monsieur le sénateur, vous apporter au nom de Eric Woerth