Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 18 février 2009 à 15h00
Application des articles 34-1 39 et 44 de la constitution — Article 7, amendement 10

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Il s’agit non pas de retarder le vote, mais de vous mettre en garde, car une telle mesure aura de nombreuses conséquences ! En un an, nous avons voté pas moins d’une cinquantaine de lois. Si, à l’avenir, chaque loi devra être accompagnée d’une étude d’impact, composée de tous les éléments énumérés par l’article 7, mesurez-vous le travail que cela va représenter ?

Plutôt que d’aller dans ce sens, il aurait mieux valu supprimer cet article. Nous aurions alors été en position de force pour parvenir avec les députés à une rédaction plus proche de notre pensée que de la leur. Ce que je défends ici, c’est ce que pourrait être le fonctionnement d’un Sénat qui pèserait de tout son poids.

J’ajoute qu’aux termes de l’amendement n° 10 de la commission « les projets de loi font l’objet d’une étude d’impact dès le début de leur élaboration ». Je rejoins notre collègue Bernard Frimat pour soulever une question à laquelle vous ne pouvez pas vous dérober : il n’existe aucune définition juridique du « début de l’élaboration » d’un texte de loi.

Prenons un exemple récent, celui de la loi sur l’audiovisuel. Quand donc a débuté l’élaboration de ce texte ? Est-ce le matin où Nicolas Sarkozy a déclaré, devant un parterre de personnes abasourdies, à commencer par Mme la ministre de la culture, qui n’avait pas été mise au courant, que le Président de la République désignera les présidents des sociétés de l’audiovisuel public ? On peut considérer que le début de l’élaboration de la loi c’est le moment où a germé dans l’esprit du Président de la République l’idée de faire cette déclaration. Il faudrait donc que l’étude d’impact soit lancée dès ce moment inconnu, et d’ailleurs inconnaissable ! Vous pensez bien que, lorsque Nicolas Sarkozy a fait cette déclaration, il était à mille lieues d’imaginer une étude d’impact ! Il exprimait un choix politique et il pensait que cette mesure aurait un impact positif. Nous avons contesté ce choix politique, mais nous ne contestons nullement le droit du Président de la République de faire des choix politiques. C’est son rôle !

Les choix politiques font partie de notre fonction ; nous en débattons entre nous. L’étude d’impact de la loi, sujet de notre débat, sera, elle, source de grandes confusions ; nous allons créer un véritable embrouillamini.

Je formulerai une autre remarque, monsieur le rapporteur : on ne peut pas – c’est une erreur – écrire que l’étude d’impact définit les objectifs poursuivis par le projet de loi. Il revient au Gouvernement ou, le cas échéant, au Président de la République, d’expliquer que tel texte sur l’emploi, les questions sociales, la crise, l’outre-mer, ou tout autre sujet, vise à atteindre tel ou tel objectif.

L’étude d’impact n’a pas pour objet de se prononcer sur les objectifs poursuivis par le projet de loi. Sinon, à quoi servirait l’exposé des motifs ? Faire figurer les objectifs dans l’étude d’impact n’a aucun sens !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion