Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 1er février 2007 à 21h45
Recrutement formation et responsabilité des magistrats équilibre de la procédure pénale — Discussion d'un projet de loi organique et d'un projet de loi déclarés d'urgence

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, rapporteur :

Le système proposé par l'Assemblée est en outre fort complexe. Alors qu'il faudrait mettre en place un dispositif d'accès direct, on aboutit à une procédure peu lisible.

La saisine finale du CSM serait en effet soumise à trois filtres : un parlementaire, le Médiateur de la République et le ministre de la justice. Sans oublier les chefs des cours d'appel, qui fourniraient au Médiateur les informations lui permettant de décider s'il y a lieu de transmettre la réclamation au garde des sceaux. Or les chefs des cours d'appel peuvent eux-mêmes saisir directement le CSM. L'ensemble ne paraît pas d'une cohérence parfaite !

L'instauration d'un triple filtre, là où existait auparavant un accès direct, n'apporte donc pas un réel renforcement des garanties offertes aux justiciables.

On invoque des exemples étrangers. Or, non seulement comparaison n'est pas raison, mais notre Médiateur, créé en 1973, est doté de compétences particulières, qui ne correspondent pas tout à fait à celles des ombudsmans existant dans d'autres démocraties, notamment celles d'Europe du Nord.

On ne peut donc que s'interroger sur la pertinence de cette nouvelle mission confiée au Médiateur.

La commission des lois a estimé que la procédure définie par le texte issu de l'Assemblée nationale paraissait trop complexe et peu adaptée aux spécificités de la magistrature. Le renforcement de la confiance des citoyens dans la justice suppose au contraire la mise en place d'un dispositif simple et efficace d'examen des réclamations.

Il a donc paru souhaitable de confier l'examen des plaintes des justiciables à un organisme collégial, rassemblant des personnalités ayant l'expérience du milieu judiciaire mais n'appartenant pas, dans leur majorité, au corps judiciaire. Cette commission aurait vocation à recevoir les réclamations de toute personne physique ou morale qui s'estimerait lésée par un fait susceptible de recevoir une qualification disciplinaire, commis par un magistrat dans l'exercice de ses fonctions. Placée auprès du ministre de la justice, elle aurait pour mission d'examiner le bien-fondé des plaintes et, le cas échéant, de les transmettre au garde des sceaux aux fins de saisine du CSM.

Monsieur le garde des sceaux, il n'y a pour nous aucune ambiguïté : c'est le garde des sceaux qui apprécie s'il y a lieu de transmettre la réclamation au CSM. Si notre formulation n'est pas complètement claire, nous sommes tout à fait prêts à la rectifier.

Les modifications que vous propose la commission des lois sont le fruit d'un travail approfondi et recueillent un large consensus au sein du monde judiciaire. Or, nous le savons bien, l'adhésion des praticiens de la justice à la réforme que nous entreprenons sera une condition de sa réussite.

Mais ce projet utile, monsieur le garde des sceaux, n'épuise sans doute pas le sujet de la place de l'institution judiciaire dans notre société. Certains réclament d'autres réformes plus ambitieuses, prônant un bouleversement complet de la procédure pénale, pour lui donner un caractère accusatoire. Je ne suis pas sûr qu'ils en apprécient toutes les conséquences. Et puis pourquoi irions-nous plaquer sur notre système judiciaire des éléments empruntés à d'autres systèmes !

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