Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission des affaires culturelles a souhaité se saisir pour avis du projet de loi relatif à la simplification du droit, de façon à examiner les dispositions qui relèvent de sa compétence. Assez disparates, elles relèvent de domaines extrêmement variés.
Je souhaite indiquer, à titre liminaire, que la commission des affaires culturelles se félicite de la concrétisation de la politique de simplification engagée par le Gouvernement.
Elle exprime cependant le souhait que le recours à l'article 38 de la Constitution ne conduise pas à deux dérives possibles : tout d'abord, une complexification du droit existant au lieu d'un allégement réel des procédures, mais également le « contournement » du Parlement sur certains sujets importants méritant de faire l'objet d'un projet de loi spécifique et d'une inscription à l'ordre du jour des assemblées parlementaires.
Permettez-moi maintenant d'exposer les principales dispositions dont la commission des affaires culturelles s'est saisie. Compte tenu de la diversité de ces dispositions, je les ai regroupées par grands thèmes.
Je commencerai par les dispositions relatives à la protection du patrimoine.
Le paragraphe XIV de l'article 51 autorise la ratification de la partie législative du code du patrimoine et de l'ordonnance du 20 février 2004 qui l'a publiée. Opérée à droit constant, cette codification rendra la présentation de cette partie du droit plus accessible et plus compréhensible pour nos concitoyens.
L'article 7 du projet de loi passe, en revanche, à une nouvelle étape : outre quelques mesures d'application directe, il a principalement pour objet d'habiliter le Gouvernement à aménager par ordonnance les législations relatives aux monuments historiques et aux secteurs protégés. Les finalités de cette habilitation sont claires et positives : améliorer la cohérence d'ensemble, décentraliser ou déconcentrer certaines décisions, préciser les droits et obligations des propriétaires. Ces orientations sont positives, et nous devons y souscrire.
Je ne doute pas que les mesures de simplification projetées contribueront à une harmonisation du droit, particulièrement s'agissant de celles qui instaurent un guichet unique en matière d'autorisation d'urbanisme ou un délai de réponse tacite pour les autorisations de travaux, ou encore de celles qui uniformisent les délais de réponse.
Mais j'ai relevé, non sans surprise, que certaines d'entre elles - une minorité, je le précise - risquaient de se traduire par un alourdissement des contraintes pesant sur les propriétaires. Ceux-ci semblent d'ailleurs s'en inquiéter.
C'est le cas principalement de la mesure qui a pour objet, pour les travaux réalisés sur les immeubles inscrits, de remplacer le régime de la déclaration préalable par l'exigence d'un avis conforme et de placer la réalisation de ces travaux sous le contrôle scientifique et technique des services du ministère de la culture, ou encore de celle qui tend à imposer aux propriétaires l'obligation nouvelle de tenir un « carnet sanitaire » de l'immeuble protégé suivant « un modèle type défini par arrêté ministériel ».
Sans contester que les dispositions envisagées s'inscrivent dans une logique d'amélioration de la protection du patrimoine culturel, nous devons cependant rappeler que la simplification du droit doit profiter en priorité aux usagers et inviter le ministère de la culture à se rapprocher de ses partenaires pour finaliser son dispositif.
Il semblerait, en outre, que le Gouvernement envisage de prendre, sur le fondement de cette habilitation, certaines des mesures qui figurent dans la proposition de loi de notre collègue député Pierre Lequiller. Je crois que ces dispositions sont plus à leur place dans cette proposition, qui a déjà été examinée et amendée par la commission des affaires culturelles sur l'excellent rapport de M. Pierre Laffitte, et dont nous pourrons reprendre l'examen quand seront connues les conclusions de la mission d'expertise confiée à M. Marc Sanson.
J'aborde maintenant les dispositions relatives à la jeunesse et aux sports.
Le cinquième alinéa de l'article 8, tout d'abord, vise à autoriser le Gouvernement à aménager le régime de protection des mineurs accueillis hors du domicile parental à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels et des loisirs.
Le contrôle a priori exercé sur l'ouverture des centres ayant prouvé ses limites, il est envisagé de le remplacer par un renforcement des contrôles sur place et une surveillance accrue effectuée tant par les agents des services déconcentrés de la jeunesse et des sports, dont les pouvoirs ont été renforcés, que par ceux d'autres départements ministériels.
L'article 11, ensuite, prévoit la déconcentration de la procédure d'interdiction d'exercer une activité d'enseignement des activités physiques et sportives.
Actuellement, c'est le ministre chargé des sports qui peut, dans le cadre de ses pouvoirs de police, prononcer une telle interdiction, après avoir pris l'avis d'une commission tripartite. Le préfet y est également habilité, mais à titre temporaire. Afin de simplifier cette procédure, et de l'accélérer tout en maintenant un examen attentif des dossiers au cas par cas, il est proposé d'en confier la responsabilité à l'autorité administrative - qui pourra être le préfet du département - , laquelle se prononcera après avis d'une commission instituée à l'échelon local.
Le premier alinéa de l'article 56, enfin, a pour objet d'habiliter le Gouvernement à adopter notamment la partie législative du code du sport. Ce code unique rassemblerait les dispositions de la loi du 16 juillet 1984, base d'un droit spécifique au sport, ainsi que les dispositions éparses figurant dans le code de l'éducation, dans le code de la santé publique ou dans le code général des collectivités territoriales.
Un troisième train de dispositions concerne la presse, le cinéma, l'audiovisuel et le spectacle.
L'article 9 tend à modifier la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, afin de simplifier le régime applicable à la profession de colporteur ou distributeur exerçant sur la voie publique. L'abrogation des articles 18 à 22 de la loi du 29 juillet 1881, consacrés au régime déclaratif imposé aux colporteurs et aux distributeurs, mettrait ainsi fin à l'une des nombreuses « tracasseries administratives » dénoncées par le Premier ministre dans son discours de politique générale du 3 juillet 2002.
L'article 24 du projet de loi vise à moderniser le régime de la production cinématographique et audiovisuelle. Il prévoit d'autoriser le Gouvernement à actualiser et à simplifier le registre public de la cinématographie et de l'audiovisuel.
Je précise que ce registre assure la sécurité juridique de la production et de l'exploitation des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, en garantissant la publicité des contrats intervenus dans ce domaine. Créé en 1944, ce registre n'avait été que peu modifié depuis cette date, et il importe donc de le moderniser, afin de répondre aux besoins exprimés notamment par les professionnels. Il s'agit de simplifier les démarches de ces derniers, d'étendre les effets de la publicité et de créer, sur le même modèle, un registre des options, qui ne serait cependant que facultatif. La commission des affaires culturelles approuve cette utile réforme.
Le paragraphe III de l'article 51 a pour objet d'autoriser la ratification d'une ordonnance du 6 novembre 2003 relative aux mesures de simplification pour les emplois du spectacle. Cette ordonnance concerne un sujet important et d'actualité, puisqu'il est lié à la politique pour l'emploi dans le spectacle vivant, le cinéma et l'audiovisuel mise en oeuvre par le Gouvernement pour sortir du conflit des intermittents du spectacle.
La réforme introduite par cette ordonnance répond à trois objectifs principaux : simplifier les obligations des employeurs tout en garantissant la protection sociale des salariés, assurer l'application effective et le contrôle de la législation en vigueur, alléger les coûts de gestion du dispositif. En outre, elle permet désormais le croisement des fichiers sociaux dans le domaine du spectacle, ce qui devrait rendre possibles à la fois un contrôle de la cohérence des déclarations et la production de statistiques homogènes et consensuelles sur l'emploi artistique. Cela répond à une nécessité, qui avait d'ailleurs été soulignée par le groupe de réflexion sur la création culturelle mis en place par la commission des affaires culturelles du Sénat.
Le paragraphe IV de l'article 53 prévoit la ratification d'une ordonnance du 22 février 2001 visant à permettre, sous certaines conditions, aux agents artistiques ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen d'exercer leur activité en France. Il s'agit, dans ce domaine également, de mettre le droit national en conformité avec le droit européen.
Le paragraphe VII de l'article 53 a trait à la ratification d'une ordonnance du 1er mars 2001 qui tend à parfaire la transposition en droit français de deux directives concernant la reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur et des formations professionnelles. Il n'appelle pas de commentaire particulier.
Je conclurai mon intervention en présentant deux dispositions visant à autoriser le Gouvernement à moderniser deux professions.
L'article 23 prévoit d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance un certain nombre de mesures, assez consensuelles d'après les auditions auxquelles nous avons procédé, relatives au fonctionnement de l'ordre des architectes. Elles n'appellent pas de remarques. La régularisation des « titulaires de récépissés » qui continuaient depuis 1977 d'exercer leurs fonctions sur la base de dispositions transitoires n'est certainement pas une solution parfaite, mais tout le monde semble s'y résigner, comme à un moindre mal. La réforme des études d'architecture, qui devront à l'avenir se conformer au système « licence-master-doctorat », est bien acceptée, et toutes les parties s'accordent à considérer qu'il est nécessaire de compléter la formation académique par un stage professionnalisant permettant au futur architecte d'appréhender concrètement les différents aspects de la maîtrise d'oeuvre. La seule divergence de vues tient à la durée souhaitable de ce stage : un an pour le ministère de la culture, deux années au moins, sinon trois, pour les représentants des architectes, dont les arguments méritent d'être pris en considération, messieurs les ministres.
Enfin, à l'article 28, il est proposé d'autoriser le Gouvernement à modifier la loi du 7 mai 1946 instituant l'ordre des géomètres experts, afin se conformer aux exigences européennes sur deux points : la reconnaissance des qualifications professionnelles, d'une part, la procédure disciplinaire, d'autre part.
Sous réserve des observations qu'elle a pu formuler et des amendements qu'elle présentera, la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des dispositions du projet de loi dont elle s'est saisie.