Intervention de Philippe Marini

Réunion du 13 octobre 2004 à 15h00
Simplification du droit — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission des finances a examiné les articles 17, 41 et 55 du présent texte dans le cadre d'une délégation ad hoc. Elle a bien entendu veillé à coordonner ses positions avec celles de la commission des lois, saisie au fond, et des différentes commissions saisies pour avis.

Je ne présenterai pas en détail la quinzaine d'amendements que nous serons amenés à défendre ; je me bornerai à dégager l'inspiration commune qui les sous-tend.

En premier lieu, nous souhaitons que l'on aille au bout de la logique de cohérence du texte. Il convient manifestement d'autoriser le Gouvernement à tout faire pour éliminer les frictions, les difficultés résultant de la sédimentation de textes parfois anciens, dont certains sont devenus inadaptés.

Il s'agit surtout d'assurer la cohérence entre le droit national et le droit communautaire. A cet égard, nous avons maintenant l'occasion de permettre une transposition plus rapide de certaines directives européennes ; or chacun sait, dans cette assemblée, qu'il existe un retard très substantiel à résorber dans ce domaine.

En ce qui concerne nos préoccupations propres, nous présenterons quelques compléments issus de nos réflexions consécutives à l'entrée en application de la loi de sécurité financière.

Nous proposerons en outre, toujours dans le domaine des services financiers, de ratifier de manière explicite, afin que les matières visées continuent bien à relever de la loi, plusieurs ordonnances tendant à transposer des directives communautaires importantes concernant les services d'investissement, la transparence des relations financières entre les Etats membres et les entreprises publiques, ainsi que l'assainissement et la liquidation des entreprises d'assurance.

Par ailleurs, nous souhaitons que soit prise l'initiative d'habiliter le Gouvernement à transposer la directive sur les contrats de garantie financière, directive qui aurait dû être mise en oeuvre avant le 27 décembre 2003, c'est-à-dire voilà près d'un an. Ce texte semble important en vue de l'intégration des marchés financiers européens et, pour cette raison, il convient d'introduire quelques innovations dans notre droit des sûretés.

En deuxième lieu, la commission des finances, comme les autres commissions concernées, est bien entendu attentive à ce que le recours aux ordonnances ne constitue pas une forme de « chèque en blanc » législatif.

Il convient en effet de préserver les prérogatives du législateur. Ainsi, s'agissant du droit commercial, nous avons pleine capacité, mes chers collègues, lorsque nous ratifions une ordonnance, d'en modifier telle ou telle disposition : il est possible de ratifier en amendant, et c'est ce que la commission des finances vous proposera de faire en ce qui concerne la question du partage de pouvoirs et de compétences au sein d'une société anonyme, lorsqu'il s'agit de prendre la décision d'émettre des actions ou des valeurs représentatives des fonds propres, entre l'assemblée générale des actionnaires, d'une part, et les organes de direction - conseil d'administration ou directoire -, d'autre part.

A cet égard, le sentiment de la commission des finances, qui s'est prononcée de manière unanime sur cette question, est que l'on est allé trop loin dans le transfert de responsabilités aux organes de direction. Nous aurons l'occasion de développer ce point de vue au cours des débats. Sur ce point, le texte de l'ordonnance nous semble en contradiction avec l'orientation vers plus de transparence qui prévalait tant dans la loi de 2001 relative aux nouvelles régulations économiques que, plus récemment, dans la loi de 2003 de sécurité financière.

En troisième lieu, ce texte est à nos yeux l'occasion d'introduire quelques innovations juridiques utiles.

Tel est le sens de l'une des initiatives que nous présenterons s'agissant des instruments financiers dans le domaine immobilier : nous souhaiterions que le Gouvernement reçoive habilitation pour mettre en place un nouvel outil juridique, que nous dénommons « organisme de placement collectif dans l'immobilier », afin de valoriser la « pierre papier », à laquelle nombre d'épargnants sont attachés, et ce dans des conditions de clarté. Nous pensons que le compartiment des placements immobiliers doit être mieux structuré et que, après la réforme de la fiscalité des sociétés foncières ou sociétés immobilières cotées, il serait bon de se doter de ce nouvel outil, qui serait sans doute appelé, à terme et selon certaines modalités à préciser, à prendre le relais des sociétés civiles de placement immobilier, certes très utiles mais qui souffrent de certains handicaps liés à leur statut juridique, notamment en ce qui concerne la liquidité des parts et l'existence d'un véritable marché à la disposition des porteurs souhaitant céder leurs actifs.

Ces OPCI, qui seraient ainsi définis par une future ordonnance, devraient, par ailleurs, bénéficier d'un régime fiscal adéquat issu de la loi de finances.

En ce qui concerne les innovations juridiques, il nous a semblé utile d'améliorer la compétitivité du marché de Paris grâce à une approche nouvelle des systèmes de règlement-livraison de titres. C'est un point de nature assez technique, mais il est crucial sur le plan de la compétition intra-européenne afin que se développe dans des conditions correctes, par rapport à Londres notamment, le futur compartiment Alternext, par exemple, qui succédera au marché libre au sein d'Euronext. Il est tout simplement bon de se mettre en conformité avec les standards internationaux.

Enfin, la commission des finances proposera, au titre des innovations, une disposition qui devrait être de nature à nous faire sortir du débat suscité par l'article 57 de la loi qui porte votre nom, monsieur Dutreil.

Il s'agit de la question des garanties offertes aux acquéreurs de maisons individuelles, et donc de celle de la garantie financière de paiement des sous-traitants. Je crois qu'une solution a été trouvée qui est de nature à étendre la diversité de ces garanties et qui est susceptible de répondre aux besoins de sécurité comme aux différentes pratiques professionnelles.

Mes chers collègues, pour achever ce propos sur les enjeux de la modernisation de la gestion publique qui sont contenus dans le texte dont nous allons débattre, je voudrais focaliser quelques instants votre attention sur la ratification proposée par la commission des lois de l'ordonnance du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat public-privé : les fameux PPP.

La commission des lois s'est à juste titre intéressée aux questions d'ordre juridique qui apparaissent à la lumière d'une nouvelle conception de la maîtrise d'ouvrage public. Pour ma part, je voudrais rappeler en quelques mots les enjeux budgétaires, car il me semble que nous avons là un levier puissant de la réforme de l'Etat et du secteur public.

Les PPP constituent une modalité d'externalisation complète en liant la construction et la gestion de certains équipements.

Ils constituent aussi une voie pour simplifier le droit des marchés publics et des concessions.

Ils constituent enfin un moyen de rénover les administrations en charge des achats et des marchés publics. Il faudra donc parfois se livrer à une sorte de révolution culturelle en mettant en commun des compétences issues de la logique publique et de la logique privée.

Bien entendu, les PPP ne seront pas une panacée, et notamment pas une panacée budgétaire.

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