Vous vous souvenez tous que l'aide juridictionnelle a connu une grave crise en 2000 lorsque les barreaux se sont mis en grève pour protester contre la faiblesse de l'indemnisation versée aux avocats.
Cette crise a débouché sur la conclusion d'un protocole d'accord qui, outre des mesures de revalorisation des indemnités, prévoyait la mise en place d'une commission présidée par M. Paul Bouchet, conseiller d'Etat honoraire et ancien bâtonnier.
Cette commission a présenté ses conclusions au mois de mai 2001. Sur cette base, un avant-projet de loi avait été élaboré par Mme Marylise Lebranchu, alors garde des sceaux.
Monsieur le secrétaire d'Etat, au lieu de reprendre ce projet de loi - d'ailleurs, pourquoi ne l'avez-vous pas fait, puisqu'il était prêt ? -, vous nous proposez de réformer l'aide juridictionnelle par ordonnance.
L'exposé des motifs, que j'ai lu attentivement, cite cinq mesures, parmi lesquelles figure la volonté du Gouvernement de substituer la notion de revenu fiscal de référence ou de revenu déclaré à celle de ressources pour le calcul de l'aide juridictionnelle.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vais vous poser deux questions précises et la réponse que vous m'apporterez conditionnera le maintien, ou non, de notre amendement.
La substitution de la notion de revenu fiscal de référence ou de revenu déclaré à celle de ressources peut avoir des conséquences négatives. En particulier, cela pourrait avoir pour effet d'inclure dans le calcul des ressources prises en compte les allocations familiales ou les retraites des anciens combattants. En conséquence, vous engagez-vous à ce que ces prestations ne soient pas incluses dans les ressources retenues pour le calcul de l'aide juridictionnelle ?
Par ailleurs, pouvez-vous nous assurer que la situation de l'ensemble des citoyens concernés par l'aide juridictionnelle, ou susceptibles de l'être, ne sera en aucun cas plus défavorable après l'ordonnance qu'avant ?
Nous savons tous que, bien souvent, l'aide juridictionnelle est insuffisante. Par conséquent, si vous prenez ici l'engagement - cela figurera au Journal officiel - que les allocations familiales et les retraites des anciens combattants ne seront pas prises en compte dans l'attribution de l'aide juridictionnelle et qu'aucun justiciable ne percevra une aide juridictionnelle inférieure à ce qu'elle est aujourd'hui, je ne vois pas de difficulté pour vous autoriser à prendre cette ordonnance.
Mais si vous ne répondez pas favorablement à ces deux questions, cela voudra dire que vous n'excluez pas de rendre la situation plus difficile pour les justiciables qui peuvent bénéficier de l'aide juridictionnelle. Cela laisserait entrevoir des motivations qui, nous l'espérons, ne sont pas les vôtres.