Intervention de François Marc

Réunion du 4 juillet 2005 à 15h00
Confiance et modernisation de l'économie — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de François MarcFrançois Marc :

Quant à la modernisation des règles de fonctionnement des entreprises, ce projet n'apporte que peu de nouveautés aux règles effectives de la direction des sociétés, dans une période où la gouvernance d'entreprise reste, à nos yeux, profondément en crise.

Depuis la loi sur les nouvelles régulations économiques, et eu égard aux diverses conséquences de la crise de l'été 2002, les modes de fonctionnement des sociétés nous semblent devoir faire l'objet d'une réelle remise à plat.

La modeste loi pour la sécurité financière n'a que très peu modifié les choses. Les dirigeants d'entreprise continuent à bénéficier d'un régime de responsabilité, à nos yeux insuffisant, qui ne les conduit pas à privilégier l'intérêt social de toute l'organisation qu'ils ont la charge d'administrer.

Force est de constater que les conseils d'administration sont toujours aussi éloignés des préoccupations des salariés, des attentes de la plupart des actionnaires et, parfois, des réalités du marché.

Je ne suis pas le seul à tenir ces propos. Ainsi, monsieur le ministre, pour faire face à la désinformation dont vous auriez été victime au temps où vous étiez administrateur de Rhodia, vous avez vous-même déclaré au quotidien Le Monde, la semaine dernière, que : « les administrateurs, ce ne sont pas des dirigeants opérationnels ».

En d'autres termes, les administrateurs, qui sont mandatés pour contrôler la direction opérationnelle, n'ont pas les moyens de remplir leur mission : c'est bien ce que cela veut dire. Le manque d'information porte atteinte à leur esprit critique. Bref, ils ne sont jamais responsables des actes commis par la direction.

Ce point de vue corrobore nos affirmations. Mais vous n'avez pas pu, ou pas su, tirer les enseignements de ce constat avec le présent projet de loi. Vous n'avez pas cherché à corriger ce dysfonctionnement. Pour l'un des ministres du gouvernement de la « nouvelle impulsion », c'est une forme d'aveu d'impuissance.

Notre constat est le même s'agissant de l'action en responsabilité des administrateurs. Voilà quelques semaines, vous aviez pourtant annoncé ici même que vous alliez réformer les conditions de l'action en responsabilité des dirigeants sociaux. Depuis, rien n'a été fait.

Pour renforcer l'efficacité de la gouvernance d'entreprise, il faut modifier ce mécanisme juridique. Vous le savez. Tant que les administrateurs et les dirigeants bénéficieront de cette impunité scandaleuse, les entreprises ne seront pas bien gérées. Que l'on me comprenne bien : il ne s'agit pas de sanctionner les dirigeants pour leur faire payer la crise économique et le chômage. Mais pour rendre la confiance, il importe de montrer aux salariés et aux actionnaires que la boussole de l'entreprise, c'est l'intérêt social. C'est lui qui doit orienter les décisions, y compris lorsqu'elles sont contraires à l'intérêt particulier des dirigeants.

Rien n'a changé pourtant. Dès lors, je me pose la question suivante : à quoi servent les administrateurs ? Je m'interroge et, avec mes concitoyens, je doute.

Je doute de la sincérité de certains dirigeants et conseils d'administration ; je doute de la capacité des administrateurs à contrôler la direction des entreprises qui sont tournées, souvent vers la satisfaction des intérêts de quelques-uns, rarement vers l'intérêt social, jamais vers celui des salariés.

Pour ramener la confiance, encore eût-il fallu prendre ces problèmes à bras-le-corps. Mon collègue Richard Yung, membre de la commission des lois, examinera tout à l'heure dans le détail les raisons pour lesquelles votre projet de loi n'atteint pas les objectifs que vous vous êtes fixés.

Poursuivons l'analyse : votre texte de loi vise à faciliter l'accès aux financements bancaires et boursiers des entreprises. En réalité, il ne fait qu'affaiblir, à nos yeux, l'efficacité de la réglementation en matière de transparence boursière, et ce au profit de quelques-uns, et toujours les mêmes : les établissements bancaires et financiers.

Vous prétendez qu'avec ce texte les petites et moyennes entreprises auront plus facilement accès aux marchés financiers et à la Bourse. En fait, pour faciliter l'accès aux marchés boursiers, le projet de loi prévoit différents niveaux d'obligations d'information selon le marché visé. La transparence sera donc, en définitive, moindre sur les marchés accessibles aux PME, ...

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