Intervention de Jean-Jacques Jégou

Réunion du 4 juillet 2005 à 15h00
Confiance et modernisation de l'économie — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Jean-Jacques JégouJean-Jacques Jégou :

Le projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie qui vient aujourd'hui en examen devant la Haute Assemblée vise, comme vous venez de le rappeler, monsieur le ministre, à contribuer à la « nouvelle impulsion » que souhaite donner le nouveau Gouvernement à l'économie de notre pays.

L'objectif est louable et les mesures que ce texte prévoit nous semblent nécessaires. Mais elles paraissent très insuffisantes, compte tenu du contexte économique actuel, qui nécessiterait une réforme de plus grande envergure.

Plus clairement, les mesures qui nous sont ici présentées sont attendues depuis très longtemps par les acteurs économiques du pays, mais elles n'offrent pas à ces derniers un cadre suffisamment dynamique, une stratégie plus globale.

Plus concrètement, plusieurs des mesures que comporte ce texte nous semblent bonnes, en ce qu'elles simplifient les règles de fonctionnement des entreprises et facilite l'accès de celles-ci à des sources de financement diversifiées.

Ce texte prévoit, par exemple, de faciliter la tenue des conseils d'administration et des assemblées générales en recourant à des moyens modernes de communication ou en abaissant les règles relatives à la prise de décisions. De la même manière, il facilite de façon appréciable l'accès au marché boursier pour les entreprises et en particulier pour les plus petites.

En ce qui concerne le financement des entreprises, il offre des outils modernisés en étendant, par exemple, la gamme des financements disponibles.

La création de l'Agence de l'innovation industrielle est de ce point de vue très appréciable. Elle va permettre de soutenir de grands projets industriels, très favorables à la création d'emplois et porteurs d'avenir. Car c'est bien vers l'avenir que nous devons nous tourner aujourd'hui. L'industrie, secteur aujourd'hui en crise, alors qu'il était une force vitale pour notre économie il y a quelques dizaines d'années, a besoin d'un signal fort, qui permettra d'enclencher une nouvelle dynamique.

Il faut remarquer que le projet de loi favorise le développement de nouveaux marchés d'accès à la Bourse tel qu'Alternext et qu'il étend le champ de compétence de l'Autorité des marchés financiers. Ces mesures sont encourageantes et rassurantes pour les entreprises qui souhaitent se développer.

Monsieur le ministre, vous avez dit qu'un grand nombre d'entreprises ne se développent pas, que peu de PME ont la capacité de se développer. En fait, nous pouvons nous interroger sur le nombre insuffisant des entreprises dans notre pays. A cet égard, je prendrai des exemples concernant les investissements que tous les élus locaux connaissent.

En effet, de nombreuses collectivités locales rencontrent des difficultés pour leurs appels d'offres. Nous avons mis en chantier une école élémentaire avec cinq classes : quinze dossiers ont été retirés, deux entreprises ont répondu. Cela se passe ainsi tout au long de l'année. Nous obtenons des réponses dilatoires : les bureaux d'études étant encombrés, les entreprises ne peuvent répondre à nos sollicitations. Or, vous le savez, monsieur le ministre, les collectivités locales restent dans notre pays les boosters de l'investissement.

Je tiens enfin à relever deux améliorations majeures qui ont été apportées par l'Assemblée nationale.

Il s'agit, d'une part, du titre Ier A intitulé « Encourager la détention durable d'actions », et, d'autre part, des articles 2 bis et 2 ter concernant la transparence des différentes composantes de la rémunération des dirigeants d'entreprises.

En ce qui concerne la détention durable d'actions, le texte proposé instaure un nouveau régime de transformation des contrats d'assurance vie, ce qui permettra de mobiliser de nouveaux fonds pour les entreprises en réorientant l'épargne des Français vers les fonds propres des entreprises et en particulier des PME.

Cependant, il aurait été de bon ton de profiter de ce texte pour réformer le régime de taxation des plus-values professionnelles en le rapprochant de celui des plus-values immobilières, afin de favoriser la stabilité de l'actionnariat au sein d'entreprises familiales par exemple.

Enfin, il serait préférable de s'assurer que le bénéfice des mesures prévues à l'article 1er A ne concerne pas uniquement les entreprises régies par le seul code des assurances.

Pour ce qui est de l'épineuse question de la rémunération des dirigeants en vue de procéder à une certaine moralisation des affaires, réclamée par l'opinion publique, un début de réponse a été apporté par le Gouvernement, en visant à soumettre certains éléments de la rémunération des dirigeants au régime des conventions réglementées. En revanche, afin d'améliorer l'image du monde de l'entreprise et des dirigeants, il serait souhaitable que l'ensemble de la rémunération des dirigeants soit soumis à l'approbation de l'assemblée générale.

Malgré tous ces éléments positifs, et sans revenir sur le manque flagrant d'ambition du texte, je souhaiterais attirer votre attention, monsieur le ministre, sur un double problème.

Il s'agit non seulement d'une question de principe, mais également d'une question de fond. Je pense à l'article 6 du présent projet de loi, visant, en vertu de l'article 38 de la Constitution, à habiliter le Gouvernement à réformer par voie d'ordonnances la partie du code civil relative au régime des sûretés.

Monsieur le ministre, telle n'est certainement pas votre volonté, mais ce procédé très utilisé aujourd'hui, qui n'est certes pas l'apanage de ce seul gouvernement, devient une habitude. En effet, comment peut-on faire l'économie d'un vrai débat et mépriser à ce point les prérogatives des parlementaires, même si beaucoup d'entre eux auraient été absents lors d'un débat estival ? Je vois que M le rapporteur m'écoute attentivement.

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