Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 4 juillet 2005 à 15h00
Confiance et modernisation de l'économie — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je partage avec M. le rapporteur deux formulations qu'il a employées dans son rapport écrit, selon lesquelles l'intitulé de ce projet de loi « peut sembler très général », tandis que le moment pour présenter le texte est « sans doute en décalage ».

En effet, préparé avant le changement de gouvernement, ce texte disparate provient pour partie d'un découpage de l'action gouvernementale quelque peu hasardeux et ne donne pas de lisibilité à une politique économique au demeurant toujours introuvable après plus trois ans de législature.

Nous avons noté les intentions du nouveau gouvernement de concentrer son action sur l'emploi. Mais quelle est la nouveauté de cette politique ? Les questions non résolues depuis trois ans sont toujours les mêmes : comment créer des emplois avec une croissance en berne ? Comment redonner du tonus à la croissance sans la confiance ? Comment donner de la confiance aux acteurs économiques, ménages et entreprises, sans leur donner un signal fort ?

Sur ce point, notre divergence est totale, monsieur le ministre : lorsque nous disons « pouvoir d'achat et coup de pouce à la demande », vous dites, encore et toujours, « exonérations fiscales et sociales ».

Du côté de l'offre, votre diagnostic n'est pas meilleur. Nous venons d'achever l'examen du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises et vous vous apprêtez à légiférer par ordonnances. Dans les deux cas, vous axez toute votre politique, par ailleurs contestable, sur les petites entreprises, voire sur les très petites, et, en sandwich entre ces deux textes, si je puis m'exprimer ainsi, vous nous proposez, dans le titre II du présent projet de loi, de légiférer sur la future agence de l'innovation industrielle, destinée à aider à l'émergence de « champions nationaux » ! De surcroît, dans les jours qui viennent, le Gouvernement va statuer sur l'appel à projets qu'il a lancé voilà quelques mois visant à sélectionner des pôles de compétitivité dans les territoires.

Cette méthode, très curieuse, nous amène à nous interroger sur la cohérence de ces dispositifs élaborés au coup par coup alors que nous perdons des parts de marché à la fois par manque d'innovation dans nos produits et nos services et par mauvais positionnement sur les marchés exportateurs.

Il importe de faire le bon diagnostic. Or, selon moi, vous avez tout faux en ce domaine - excusez-moi de vous le dire ! - et, par conséquent, également quant aux mesures que vous proposez.

Notre tissu industriel est, en effet, très déséquilibré : nous avons beaucoup d'entreprises de petite taille qui ont une faible productivité et une faible capacité d'innovation et, par ailleurs, de très grandes entreprises, mais peu d'entreprises de taille moyenne et à forte capacité technologique.

Par conséquent, pour créer des emplois, il conviendrait de donner à ces entreprises intermédiaires les moyens de se développer et d'accompagner leur croissance.

Vous avez longtemps - et vous le faites encore - sous-estimé le problème de l'accélération de la désindustrialisation. Vous n'avez pas vu l'incapacité de la France à se positionner dans la nouvelle division internationale du travail.

Certes, les difficultés ne datent pas de 2002, mais vous les avez exacerbées en sabordant les instruments de la politique industrielle : suppression de fonds pour la technologie, sacrifice de la recherche, gel de la réforme des universités. Vous persévérez dans l'erreur en voulant concurrencer les pays émergents, alors que la concurrence se situe avec les pays du Nord.

Encore une fois, vous ne faites pas le bon diagnostic.

La commission des finances a entrepris, sous l'égide de son président, un important travail d'expertise sur le phénomène des délocalisations, et je ne partage pas du tout le diagnostic qu'elle a rendu.

Loin de moi, cependant, l'idée de nier les délocalisations, ...

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