Intervention de Bernard Frimat

Réunion du 24 juin 2008 à 10h00
Modernisation des institutions de la ve république — Article 23

Photo de Bernard FrimatBernard Frimat :

Nous sommes souvent en accord avec Nicolas Alfonsi, mais, en ce qui concerne l’article 49-3, nous sommes en désaccord absolu.

Le Gouvernement de Lionel Jospin a montré qu’il était possible de gouverner pendant cinq ans sans avoir une seule fois recours à l’article 49-3. La dernière fois que cet article a été utilisé, c’était sous le gouvernement de Dominique de Villepin à propos du contrat première embauche, le CPE. On a vu comment cette contrainte a amené le Parlement à voter une loi dont le Président de la République de l’époque a aussitôt constaté qu’elle était inapplicable, et comment mission a été donnée de trouver une solution différente.

L’article 49-3 est le symbole de ce que l’on appelle le « parlementarisme rationalisé », c’est-à-dire le parlementarisme diminué. Il a été créé au sortir d’une époque d’instabilité permanente et il est donc aisé de comprendre le contexte qui lui a donné naissance.

Mais, aujourd’hui, il ne se justifie plus. Vouloir le rétablir dans sa formulation initiale, c’est, en quelque sorte, affirmer qu’il n’y aura pas de droits nouveaux pour le Parlement, puisque, à tout moment, le Gouvernement pourra s’en servir pour mettre un terme à toute discussion à l’Assemblée nationale et trancher de cette manière.

Pour nous, au-delà de toutes les remarques de détail, des améliorations secondaires qui peuvent parsemer la révision constitutionnelle, il y a un problème de fond, celui de la prise en considération ou non du Parlement, en l’espèce de l’Assemblée nationale.

Je reconnais, bien sûr, toute l’habileté de Jean-Jacques Hyest, dont la proposition vise d’abord à limiter l’usage de l’article 49-3 au projet de loi de finances et au projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce qui est aussi la position du groupe socialiste, mais, ensuite, à en proposer une application plus élargie soumise à une légère contrainte, et c’est là que nous divergeons.

En effet, aux termes de l’amendement de la commission, le Gouvernement aurait la faculté d’utiliser l’article 49-3 sur n’importe quel projet après consultation de la conférence des présidents. C’est quand même la moindre des choses ! Il serait curieux, dans un texte qui vise à magnifier les pouvoirs du Parlement, que le Gouvernement puisse recourir à la procédure de l’article 49-3 de manière clandestine, sans en avertir, ne serait-ce que par courtoisie, les instances de l’Assemblée nationale.

Dans la rédaction qui nous est proposée, on voit bien comment s’exprime le talent du compromis : on limite en apparence l’exercice de l’article 49-3, mais, en réalité, on le laisse en l’état. Peut-être vaudrait-il mieux, pour la clarté, éviter ces faux-semblants. Si vous voulez laisser cette arme au Gouvernement, dites-le clairement - je vous serai reconnaissant de votre franchise - sans chercher de faux-semblant ni de faux compromis.

Notre position, même si elle est différente, est tout à fait claire : nous sommes pour le maintien de l’article 49-3 uniquement en ce qui concerne le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

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