Intervention de Jean-René Lecerf

Réunion du 24 juin 2008 à 10h00
Modernisation des institutions de la ve république — Article 23

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf :

L’intérêt d’un débat est de laisser exprimer des opinions diverses, parfois dans les mêmes rangs.

Je pense, en ce qui me concerne, que l’article 49-3 est extrêmement marqué par l’histoire de la IVe République. Il a été écrit en réaction à la pratique de ce que l’on appelait alors le vote « calibré » : les majorités parlementaires s’arrangeaient pour désavouer le Gouvernement à la majorité simple et non pas à la majorité absolue. Ils pouvaient ainsi éviter la dissolution qui ne pouvait être prononcée que si deux crises consécutives s’étaient produites dans un intervalle de dix-huit mois, avec un vote à la majorité absolue.

Lorsque Edgar Faure a pu faire prononcer la dissolution par le Président de la République, la presse avait titré : « Une erreur de tir ». Effectivement, une majorité trop importante avait été constatée par deux fois.

Le régime actuel est fondamentalement différent. D’abord, la dissolution n’est plus soumise, que je sache, à aucune condition. Ensuite, le fait majoritaire est devenu une réalité de la Ve République. L’inversion du calendrier électoral, loin réduire l’importance du fait majoritaire, va le conforter très largement.

Je ne suis pas certain – mais je n’ai aucun don de voyance – que mes collègues socialistes, s’ils redevenaient majoritaires instaureraient immédiatement la représentation proportionnelle intégrale. Pour vous dire le fond de ma pensée, je ne le pense pas.

Je constate même que, pour les élections municipales, ils ont contribué, Pierre Mauroy étant Premier ministre, à mettre en place un mode de scrutin tout à fait pertinent, puisqu’il laisse une place à l’opposition tout en assurant une large majorité à la liste arrivée en tête. Il s’agit plutôt d’un scrutin majoritaire teinté de proportionnelle que l’inverse.

Les conditions me paraissent être radicalement différentes aujourd’hui : la dissolution sans conditions combinée au fait majoritaire et à un usage important de l’article 49-3 conduirait à une marginalisation totale du Parlement.

On nous oppose deux objections : la première, c’est qu’il faut bien lutter contre l’obstruction et donc contre la multiplication des amendements par l’opposition.

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