Intervention de Rachida Dati

Réunion du 24 juin 2008 à 22h00
Modernisation des institutions de la ve république — Article 28

Rachida Dati, garde des sceaux :

Toutefois, s’agissant des sanctions prononcées à l’égard des magistrats du parquet, il me semble important de ne pas modifier le dispositif actuel ; le Gouvernement a déposé un sous-amendement en ce sens.

Aujourd’hui, le CSM a le pouvoir de prononcer les sanctions disciplinaires à l’encontre des magistrats du siège. À l’égard des magistrats du parquet, il donne simplement un avis au garde des sceaux.

Pourquoi cette distinction ? Les parquetiers sont des magistrats ; il n’y a aucun débat sur ce point. Avec cette disposition, l’unicité du corps se trouve confirmée, et elle sortira même renforcée de la révision constitutionnelle.

Pour autant, les magistrats du parquet ont un statut différent de celui des magistrats du siège, parce qu’ils sont nommés par le garde des sceaux et reçoivent des instructions de ce dernier. Il est donc normal que le garde des sceaux conserve la responsabilité de la sanction disciplinaire les concernant : si celle-ci se trouve renvoyée au CSM sans que le ministre de la justice puisse intervenir, des problèmes se poseront inévitablement quant à l’appréciation de la responsabilité de ces magistrats, car ceux-ci ne sont pas indépendants ; ils sont placés sous l’autorité du garde des sceaux et ils exécutent la politique pénale du Gouvernement.

D’ailleurs, l’article 5 de l’ordonnance portant loi organique du 22 décembre 1958 dispose : Les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du garde des sceaux, ministre de la justice ».

Cette relation hiérarchique est nécessaire, car le parquet agit au nom de la société. Elle a tout son sens, et je voudrais la maintenir, notamment pour ce qui concerne la sanction disciplinaire.

Enfin, je souhaite attirer votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur les relations entre le Conseil supérieur de la magistrature et le garde des sceaux.

Le projet de loi constitutionnelle prévoit que le Conseil supérieur de la magistrature ne sera plus présidé par le Président de la République et que le garde des sceaux n’en sera plus le vice-président. Il s'agit d’une avancée importante, qui permettra de marquer l’indépendance du CSM.

Cependant, le garde des sceaux reste chargé de l’organisation du service public de la justice, ainsi que du recrutement, de l’emploi et de la gestion des magistrats. Au sein du ministère, ces tâches sont assurées par le directeur des services judiciaires.

Le garde des sceaux doit veiller à ce que les besoins des juridictions soient bien pris en considération, pour assurer le bon fonctionnement de la justice sur tout le territoire. Il doit pouvoir développer également dans la magistrature une véritable gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences. C’est pour mieux remplir cette mission que nous avons créé une sous-direction des ressources humaines au sein du ministère.

Tous ces éléments supposent un véritable dialogue entre le CSM et le garde des sceaux. De plus, en pratique, ce sont les services de la chancellerie qui connaissent le mieux les magistrats.

C’est pourquoi le Gouvernement souhaite que le garde des sceaux puisse être présent aux séances non seulement de la formation plénière du CSM, mais aussi des formations compétentes à l’égard des magistrats du siège et du parquet, sauf lorsque celles-ci siègent en matière disciplinaire. II faut qu’il puisse dialoguer avec les membres du CSM et expliquer son point de vue, sans voix délibérative, bien entendu. Un véritable échange entre le Conseil supérieur de la magistrature et le ministre de la justice ou son représentant est nécessaire, afin d’aboutir aux meilleures décisions, et ce dans l’intérêt général.

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