Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 24 juin 2008 à 22h00
Modernisation des institutions de la ve république — Article 31

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Je n’interviendrai qu’une seule fois sur cette question, qui me semble néanmoins fondamentale.

La création d’un Défenseur des citoyens, devenu Défenseur des droits, est une avancée très importante : la constitutionnalisation de cette nouvelle autorité est un gage de son efficacité pour atteindre les objectifs qui lui ont été fixés. Nous déplorons cependant le manque de clarté entourant sa création, malgré les différentes auditions que nous avons pu tenir.

Ce Défenseur des droits, qu’il faut se contenter d’appeler ainsi, sera visiblement amené à trôner au sommet d’une pyramide dont les autorités administratives que nous avons créées, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE, la Commission nationale de déontologie de la sécurité, la CNDS, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, la Défenseure des enfants, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, voire le Contrôleur général des lieux de privation de liberté – il intégrera peut-être plus tard la liste, même si ce n’est pas encore le cas –, ne seront que des satellites.

Nous avons des raisons de craindre pour leur sort : nous souhaitons donc, madame la ministre, obtenir des garanties à leur sujet. Il est intolérable que ces autorités soient réduites à un collège qui assiste le Défenseur des droits.

Que ce Défenseur des droits se substitue au Médiateur de la République et qu’il soit constitutionnalisé nous paraît bien et suffisant, mais s’il est amené à remplacer plusieurs autorités, sachez que nous nous opposerons même à sa création !

Nous souhaitons obtenir des réponses à trois questions essentielles : quelles seront les attributions de ce Défenseur des droits ? Quel sera le préjudice lié à sa création pour les autorités indépendantes existant aujourd’hui ? Quels seront ses liens avec les structures existantes, si elles sont maintenues demain ?

Nous sommes particulièrement inquiets du sort qui sera réservé à la CNDS. À titre personnel – mais comme beaucoup de mes collègues, je pense –, je suis souvent amenée à la saisir. Je puis vous assurer que son travail est très précieux. Il équivaut, en quelque sorte, à un contrôle parlementaire sur ce que l’on pourrait appeler le pouvoir de police, y compris le personnel pénitentiaire. Si vous deviez la supprimer, sachez que vous supprimeriez alors la seule autorité administrative indépendante française reconnue par la Cour européenne des droits de l’homme. Sa suppression, ou même sa dilution au sein d’un collège assistant le Défenseur des droits, serait extrêmement mal perçue par les instances européennes et internationales et par toutes les organisations non gouvernementales qui travaillent sur les questions relatives aux droits de l’homme.

La création du Défenseur des droits ne doit pas avoir pour effet collatéral de revenir sur le rôle d’autorités administratives indépendantes dont on sait, madame la ministre, qu’elles gênent les pouvoirs publics. C’est d’ailleurs aussi leur raison d’être, et c’est pourquoi nous avons besoin d’elles !

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