Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le groupe communiste républicain et citoyen votera unanimement contre cette révision constitutionnelle.
Dès la présentation de ce texte, nous avions souligné la dérive présidentialiste engagée par Nicolas Sarkozy et sa majorité. Depuis des mois, depuis la publication du rapport du comité Balladur, nous dénonçons la véritable propagande mise en œuvre pour présenter ce projet de loi constitutionnelle comme une avancée historique pour les droits du Parlement.
Naturellement, vous avez renoncé au projet initial du comité Balladur, qui souhaitait instaurer un régime authentiquement présidentiel, en supprimant dans la Constitution le rôle du Premier ministre et, de fait, la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement.
Le Président de la République a adopté une tactique plus discrète : s’imposer au Parlement par des discours aussi nombreux qu’il le souhaitera, affaiblir le débat démocratique pluraliste et transparent en réduisant le rôle de la séance publique et le droit d’amendement, enfin assurer la domination de la conférence des présidents, donc du fait majoritaire.
Cette révision, telle que vous la voterez sans doute dans un instant, mes chers collègues, confirme cette nouvelle architecture institutionnelle, dans laquelle un Président tout puissant se trouverait en contact permanent avec une majoritaire parlementaire renforcée et qui lui serait naturellement dévouée.
Tel est, pour l’essentiel, l’objet de cette révision. Un changement de régime s’annonce clairement – le Premier ministre a d'ailleurs affirmé qu’il ne s’agissait que d’une première étape –, et je ne crois pas que la démocratie y gagnera. Comment pouvez-vous décemment prétendre que les droits du Parlement seront renforcés, alors que, comme nous l’avons montré, le rôle de la séance publique et le droit d’amendement se trouvent réduits à la portion congrue ?
J'ajoute que l’un des principaux défauts de cette réforme est d’ignorer les rapports, plutôt difficiles, qu’entretiennent les citoyens avec leurs institutions, sans chercher à les améliorer.
Vous avez refusé systématiquement toute proposition tendant à améliorer la représentation du peuple dans les assemblées parlementaires.
Vous avez refusé d’instiller la moindre dose de proportionnelle, de créer un référendum d’initiative populaire ou de renforcer réellement le pouvoir législatif.
Vous avez refusé d’accorder aux immigrés le droit de vote aux élections locales, alors que la majorité de nos concitoyens approuve désormais une telle avancée.
Et que dire de la réforme du Sénat ? Une fois encore, un projet susceptible de rendre un peu plus démocratique l’élection des sénateurs a été balayé d’un revers de main.
En outre, cette réforme constitutionnelle est lourde de conséquences, car, à l’évidence, elle nous engage résolument dans la voie d’un régime présidentialiste à la française, c'est-à-dire qui accordera des pouvoirs exorbitants au Président de la République, y compris, bien entendu, celui de dissoudre l’Assemblée nationale.
Vous refusez de consulter le peuple, c'est-à-dire de modifier la Constitution par référendum, alors que vous avez affirmé vous-mêmes qu’il s'agissait de la révision la plus importante engagée depuis 1958 – je doute fort que ce soit vrai pour les droits des citoyens, mais ça l’est certainement pour le renforcement du présidentialisme ! Je comprends cependant que vous n’ayez pas voulu consulter les citoyens, puisque vous n’avez retenu aucune avancée en leur faveur !
Pour toutes ces raisons, nous voterons résolument contre ce texte, auquel toute la gauche, me semble-t-il, devrait s’opposer pareillement.