Intervention de Pierre-Yves Collombat

Réunion du 7 novembre 2006 à 16h00
Politique de sécurité menée depuis 2002 — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, tenter de porter un jugement un peu objectif sur le bilan de l'action du ministre de l'intérieur en matière de lutte contre l'insécurité relève de la gageure.

Manquent toujours les indicateurs fiables permettant d'apprécier la performance : la statistique des « faits constatés » de l'état 4001 ne mesure pas plus de manière fiable l'activité des délinquants que le « taux d'élucidation » ne traduit leur risque d'être rattrapés par la justice.

Sans parler de la délinquance qui demeure inconnue, le recueil statistique 4001 ne concerne ni la totalité des crimes et délits, ni les infractions relevées sur main courante, mais seulement les faits signalés au Parquet, suite à une plainte ou à l'initiative des services.

« On reproche, à juste titre, à l'outil d'enregistrement de la délinquance ou état 4001 d'être insuffisant, partiel, parcellaire, parfois partial », écrit le criminologue Alain Bauer, président du conseil d'orientation de l'Observatoire national de la délinquance. L'AFP nous rapporte ce matin qu'à Lille, par exemple, 4 000 faits ont été enlevés de la comptabilité 2005. M. Alain Bauer remet en cause l'usage d'un indice agrégeant des données très hétérogènes, la pertinence d'un agrégat comme celui de « délinquance de voie publique », qui est pourtant le plus commenté, et celle de la comparaison entre mêmes mois d'années qui se suivent.

Depuis le printemps 2002, les Français sont pourtant convoqués chaque mois afin d'analyser ces indicateurs non fiables.

Nous utilisons le même baromètre que nos prédécesseurs, dites-vous, monsieur le ministre délégué, et vous l'avez encore rappelé ce matin. Oui, et alors ?

De deux choses l'une, en effet : ou l'instrument mesure, même de manière grossière, ce qu'il est censé mesurer, et on peut l'utiliser, ou ce n'est pas le cas, et on ne s'en prévaut pas. Puissiez-vous l'utiliser un siècle, le baromètre dont vous avez parlé ce matin ne vous livrera pas plus la température que l'état 4001 le niveau de la délinquance.

Vous-même, monsieur le ministre délégué, qui êtes sportif de haut niveau et visiblement lecteur d'Alice au pays des merveilles, vous n'hésitez pas à prendre tous les risques : l'état 4001 mesure pour vous non seulement la délinquance, mais aussi le nombre de « non victimes » : « Depuis 2002, nous avons évité à notre pays, par notre politique, un million de victimes », m'avez-vous répondu le 5 octobre 2002.

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