Pourtant, dès que l'on sort du brouillard des statistiques globales, des ratios de convenance et des comptabilités à géométrie variable, pour s'en tenir aux faits les plus incontestables et les plus graves, le paysage change totalement.
Ainsi, loin de diminuer, les violences aux personnes augmentent : calculées sur douze mois glissants, les atteintes volontaires à l'intégrité physique des personnes progressent, selon l'intervalle considéré, de 6, 6 % à 8, 4 % ; les vols avec violence sont en hausse de 6, 2 % et les violences physiques non crapuleuses de 10 %, avec une pointe à 11 % en mai dernier.
Un autre indicateur peu contestable, les incendies de voitures, a, lui, explosé. De 15 000 en 2000, sous la « gauche laxiste », il passe à 45 588 en 2005 et s'établit à 21 000 pour le seul premier semestre 2006, sous la « droite enfin responsable ». C'est qu'en novembre 2005 est survenu un événement majeur, à savoir l'embrasement d'une partie des communes de banlieue, obligeant le Gouvernement à décréter l'état d'urgence, ce qui n'avait pas été fait même en 1968 ! L'image du pays à l'étranger en fut ternie. Le Premier ministre espagnol ne le fera pas dire à M. Sarkozy, venu lui donner des leçons de politique en matière d'immigration.
Le ministre de l'intérieur n'est évidemment pas responsable de l'état des quartiers en difficulté déploré depuis longtemps et de la lente dégradation des conditions de vie de leurs habitants. En revanche, outre de n'avoir rien vu venir, on peut lui faire deux reproches : en arrêtant brutalement la politique de retissage patient du lien social mise en oeuvre par ses prédécesseurs, il a non seulement affaibli les capacités de réponse naturelles des populations à l'incivilité et à la délinquance, mais a aussi aggravé la crise par l'usage ostentatoire et médiatique de la force publique.
Paradoxalement, c'est dans les zones non sensibles que les effectifs de sécurité ont le plus progressé et que les adjoints de sécurité ont le moins diminué.