Intervention de Claire-Lise Campion

Réunion du 22 juin 2005 à 15h00
Réforme de l'adoption — Adoption définitive d'une proposition de loi

Photo de Claire-Lise CampionClaire-Lise Campion :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je débuterai mon intervention en soulignant que nous légiférons aujourd'hui sur un texte qui n'a fait l'objet, de la part de la commission des affaires sociales, d'aucune audition et que d'une seule réunion de travail, au cours de laquelle de nombreuses et très intéressantes questions ont été soulevées, mais sans que l'on puisse suffisamment les approfondir. Nous le regrettons vivement !

Le groupe socialiste a tout de même pu entendre, dans l'urgence, Mme Claire Brisset, défenseure des enfants, différentes associations représentant les parents adoptants et un chef de service de l'adoption appartenant à un conseil général. J'en profite pour remercier ces personnes et signaler la diligence avec laquelle elles ont répondu à notre invitation.

Il est ressorti de ces auditions des points de vue parfois très divergents au sujet desquels le manque de temps pour effectuer un travail de réflexion approfondi se fait durement ressentir. Je réitère donc mon profond regret de constater que, une fois de plus, les parlementaires travaillent dans l'urgence, sans pouvoir prendre le recul nécessaire afin de légiférer avec une bonne connaissance des dossiers. Ni les adoptants ni les adoptés ne méritent une telle précipitation !

La proposition de loi qui nous est présentée aujourd'hui vise à faciliter et à augmenter le nombre d'adoptions prononcées en France. Ce n'est en aucun cas la réforme d'ampleur attendue ; il ne s'agit que d'une vision partielle et réduite ne concernant exclusivement, ou presque, que les adoptants. C'est la raison pour laquelle nous vous proposerons, mes chers collègues, d'adopter un amendement visant à modifier le titre de la proposition de loi.

Ces dispositions portées par les parents adoptants sont apparemment difficilement contestables tant les objectifs sont louables : venir en aide aux enfants délaissés, leur offrir un foyer, de l'amour.

Cette initiative a pour origine le constat suivant : en France, 25 000 familles souhaitent adopter un enfant alors que « seuls », si je puis m'exprimer ainsi, 2 000 enfants sont pupilles de l'Etat et donc en situation d'être adoptés. On comptait en effet 150 000 pupilles de l'Etat en 1900, 20 000 en 1980, ce chiffre étant passé à 2 000 en 2005.

Cette chute importante tient certainement à une meilleure maîtrise de la contraception et à une meilleure politique d'accompagnement et d'accueil des femmes célibataires. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Mais c'est aussi la raison pour laquelle de nombreuses familles - plus de 80 % - titulaires d'un agrément délivré par les conseils généraux se tournent vers l'adoption à l'étranger.

La situation est telle que, dans un rapport sur l'adoption internationale rendu en 2002, on peut lire : « 35 %, et demain peut-être près de la moitié des candidats français à l'adoption, [...] auront entre les mains ce que d'aucuns considèrent comme un permis d'adopter, [...] sans pouvoir aboutir dans leur démarche ».

Or, face à la frustration et à l'insatisfaction grandissante de ces familles, de nombreuses critiques sont émises pour dénoncer la complexité, le coût souvent prohibitif et le caractère parfois opaque et discriminant des procédures d'adoption à l'étranger.

Pourtant, la France, le 30 juin 1998, a ratifié la convention de La Haye. Par la loi du 5 juillet 1996 et celle du 6 février 2001, elle a mis en conformité sa législation nationale avec le traité. Depuis, toute personne résidant en France, titulaire d'un agrément délivré par un conseil général, doit, pour adopter dans un pays ayant également ratifié la Convention de La Haye, passer, soit par la Mission de l'adoption internationale, soit par un organisme agréé pour l'adoption.

Cependant, 60 % des adoptants continuent de privilégier des démarches individuelles afin d'adopter un enfant dans un pays d'origine, qui, pour 77 % des cas en 2003, n'avait pas ratifié la Convention de La Haye.

C'est dans ce contexte que la proposition de loi portant réforme de l'adoption se donne pour finalité de faire de l'adoption l'un des piliers de la politique familiale de la France et prévoit de créer un nouvel organisme dans le paysage institutionnel de l'adoption. Permettez-moi de douter du bien-fondé de l'objectif et de l'efficacité du moyen !

L'adoption, je l'évoquais précédemment, est faite pour les enfants délaissés. Il ne s'agit en aucune façon d'en faire un pilier de notre politique familiale.

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