Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'adoption, c'est le parcours du combattant ! Tous les couples concernés vous le diront.
Pourquoi est-ce si compliqué ? Pourquoi est-ce si long ? Pourquoi y a-t-il si peu d'enfants français adoptables ?
Cette proposition de loi tente d'apporter quelques réponses à ces questions simples, mais pourtant essentielles pour l'équilibre et l'avenir des enfants adoptés.
Il me semble, néanmoins, que le texte qui nous est proposé aurait dû, compte tenu des réalités du terrain, être plus ambitieux.
Mon expérience de quatre ans à la tête d'une commission d'agrément en vue d'adoption et de membre d'un conseil de famille m'a donné l'occasion de m'intéresser de très près à ces questions d'adoption.
Ceux qui ont exercé ces responsabilités savent à quel point l'on sort perplexe et bouleversé de ces réunions mensuelles : elles mettent en perspective sa propre parentalité, font réfléchir à la détresse des couples en désir d'enfant et obligent à se poser la question de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Pourquoi l'adoption est-elle si compliquée ?
Découvrir que son couple est stérile, en détecter le responsable, tenter des procréations médicalement assistées et constater, au bout du compte, qu'il faut faire le deuil de l'enfant biologique est un parcours long et difficile. Entre le moment où un couple éprouve son premier désir d'enfant et celui où il envisage enfin l'adoption, où il se sent enfin prêt, il s'est écoulé des mois, des années.
Le temps nécessaire à l'instruction du dossier, à son propre mûrissement, semble alors interminable. Le délai de neuf mois entre la date de confirmation de la demande et celui de la délivrance de l'agrément prévu par la loi me semble tout à fait raisonnable. N'est-il pas celui de la gestation ?
En revanche, il me semble que nous n'avons pas le droit de déroger à cette règle en allongeant le délai ! Cette limite doit être absolue. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement tendant à prévoir que, au-delà de ces neufs mois, l'agrément serait tacitement accordé. Cela obligera, bien sûr, les services des conseils généraux à être très rigoureux dans la gestion des enquêtes, mais cela donnera également confiance aux requérants dans l'attention que leurs portent les services.
Les commissions d'agrément en vue d'adoption sont très souvent confrontées à des demandes étonnantes, en particulier à certaines provenant de couples relativement âgés. La loi ne prévoit aucune limite d'âge pour l'agrément. L'intérêt supérieur de l'enfant est-il respecté lorsqu'on lui donne des parents qui pourraient être ses grands-parents ?
Les conditions d'adoption devraient établir un écart d'âge maximal, acceptable, entre l'adopté et l'adoptant ou un âge limite à partir duquel l'adoption ne serait plus possible. J'ai déposé un amendement en ce sens.
L'harmonisation de la forme et du contenu de l'agrément sur l'ensemble du territoire national rendra plus compréhensibles et plus équitables les décisions d'agrément pour les candidats. Elles seront plus claires pour les services d'adoption des pays d'origine des enfants étrangers.
Pourquoi l'adoption est-elle si longue ?
Deux cas de figure se présentent : adoption nationale ou adoption internationale.
Dans la première hypothèse, un couple, encore jeune, souhaite adopter un pupille de l'Etat et décide d'attendre. Compte tenu du nombre très réduit de pupilles de l'Etat, les délais sont très longs, rarement en dessous de deux ans, voire souvent bien plus longs.
Se pose alors la question de savoir pourquoi il y a en France si peu d'enfants adoptables ?
C'est le moment d'évoquer la politique que nous menons, depuis plusieurs années, qui consiste à privilégier les liens du sang au détriment des liens affectifs.
Un directeur de maison d'enfants à caractère social m'a fait part, la semaine dernière, du cas suivant. Oriane a dix ans. Elle vit dans un établissement du Rhône, après avoir vécu dans des familles d'accueil depuis sa naissance. Elle voit sa maman, prostituée à Toulouse, une fois par an et fait le voyage en voiture, accompagnée d'une éducatrice et d'une assistante sociale. Elle reste près de sa mère environ une heure et demie et repart après quelques câlins, sans avoir rien échangé.