Conformément à l'esprit de cette proposition de loi dont l'objectif est de faciliter les procédures d'adoption, l'amendement n° 13 rectifié tend à clarifier et à harmoniser les procédures d'agrément entre les différents candidats et entre les départements.
Depuis 1966, l'adoption plénière est ouverte aux personnes seules. Or, aujourd'hui, ces dernières font face à de fortes discriminations en raison de leur orientation sexuelle, et l'intervention de notre collègue président de conseil général souligne la nécessité de cet amendement.
Ni le code civil ni le code de l'action sociale et des familles ne prévoient de quelconques différences de traitement. Pourtant, en raison de la jurisprudence du Conseil d'Etat, des conseils généraux peuvent aujourd'hui refuser ou retirer un agrément sur la seule cause d'homosexualité, et cela en dépit « des qualités humaines et éducatives certaines » des postulants à l'adoption.
Cette situation relève de la rupture d'égalité devant la loi et de l'arbitraire le plus absolu. Dans certains départements, des personnes se verront refuser l'agrément en raison de leur orientation sexuelle ; dans d'autres, seules les capacités éducatives seront prises en compte, comme cela devrait être le cas partout.
En raison de ces pratiques administratives, les personnes victimes de ces discriminations sont alors incitées à cacher leur orientation sexuelle, au mépris du respect de la liberté individuelle et de leurs droits : telle est la situation actuelle.
Il ne s'agit pas de se demander si les personnes aujourd'hui victimes de discrimination en raison de leur orientation sexuelle devraient avoir accès à l'adoption ou pas. Cette question ne devrait plus se poser depuis 1966, car, de fait, elles y ont accès. Il s'agit simplement d'éviter à ces personnes d'avoir à se cacher ou d'êtres soumises à l'arbitraire.
En outre, ces différences de traitement sont, de manière évidente, en complète contradiction avec l'esprit du législateur. En effet, le code pénal punit, dans son article L.225-2, les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle.
En adoptant la loi du 30 décembre 2004 portant création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, le Parlement a réaffirmé sa volonté de mettre un terme aux discriminations opérées entre les personnes physiques à raison de leur orientation sexuelle.
La lutte contre les discriminations est donc un principe transversal qui doit irriguer toute nouvelle mesure législative. Dès lors, cette proposition de loi doit appliquer ce principe en matière d'adoption.
Seule l'analyse in concreto de l'intérêt de l'enfant et des qualités éducatives de l'adoptant doit être prise en compte lors de la délivrance de l'agrément. Considérer que l'orientation sexuelle prédétermine a priori les qualités humaines et éducatives d'une personne est en soi arbitraire et discriminatoire.
Enfin, cette discrimination consacrée par le Conseil d'Etat est non seulement illégitime, mais elle est de plus en pleine incohérence avec la jurisprudence de la Cour de cassation en matière d'évolution de l'autorité parentale.
Ainsi, au moment d'un divorce dû au changement d'orientation sexuelle de l'un des conjoints, la jurisprudence montre que l'autorité parentale conjointe est le plus souvent maintenue et que la résidence habituelle de l'enfant est parfois fixée au domicile du parent homosexuel.
Je vous demande donc, mes chers collègues, d'adopter cet amendement d'harmonisation qui, sur le fond, ne modifie en rien le droit reconnu depuis 1966 aux personnes seules à adopter des enfants mais qui, sur la forme, met fin à l'hypocrisie des procédures d'agrément, aux différences de traitement entre départements et aux discriminations fondées sur l'orientation sexuelle.