Les directeurs des MDPH et les responsables d’associations de personnes handicapées attendent que le Gouvernement remplisse enfin ses engagements !
Au moins, et c’est heureux, fidèle au rapport d’information que nous avons remis l’an dernier, cette présente proposition de loi a-t-elle le mérite de prévoir, pour l’avenir, des solutions visant à stabiliser les salariés des MDPH, à les former et à enrichir leur perspective de carrière, au travers de conventions triennales par lesquelles l’État s’engage à transférer les moyens nécessaires au remplacement de toute défection de fonctionnaires de l’État. Le titre Ier est donc conforme aux propositions que nous avions émises.
En revanche, nous sommes beaucoup plus réservés à l’égard du titre II, relatif à la politique du handicap.
L’organisation et la gouvernance des politiques d’insertion professionnelle des personnes handicapées ont évolué ces dernières années avec la création du fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, la mise en place de Pôle emploi et la réforme de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, dont l’attribution est dorénavant conditionnée à une évaluation des capacités professionnelles du demandeur réalisée par les MDPH.
Au-delà de ces bouleversements substantiels, qui nécessitent une adaptation permanente des acteurs et un surcroît de travail, nous avions, en 2008, alerté Mme Valérie Létard sur la notion d’« impossibilité de se procurer un emploi », notion pénalisante pour les personnes dont le taux de handicap était compris entre 50 % et 79 % et qui souhaitaient solliciter le bénéficie de l’AAH. L’article L. 821-2 du code de la sécurité sociale prévoit maintenant que le handicap subi doit entraîner « une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi » et n’exige plus que la personne handicapée n’ait pas exercé d’activité pendant un an avant la demande. Cependant, ces modifications votées dans la loi de finances pour 2009 ne peuvent être appliquées, car le décret définissant cette nouvelle notion prévu par la loi n’est toujours pas publié !
En revanche, nous sommes tout à fait favorables aux dispositions contenues dans cette proposition de loi sur le rapprochement et la mutualisation de l’ensemble des acteurs de l’emploi : Pôle emploi, le réseau national des Cap Emploi, les programmes régionaux d’insertion des travailleurs handicapés, les PRITH – même si nous regrettons la disparition des programmes départementaux d’insertion, qui étaient des outils de proximité –, mais aussi l’État, l’AGEFIPH, le FIPHFP, les services de placement spécialisés dans l’insertion professionnelle des personnes handicapées, comme le préconise le rapport Busnel.
Cependant, le point faible demeure toujours la formation. En effet, 83 % des personnes handicapées ont un niveau scolaire inférieur au baccalauréat. Par ailleurs, les établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, et les entreprises adaptées sont en nombre insuffisant, avec des listes d’attente de plusieurs années, et sont confrontés à des problèmes de pérennité de financement.
Un autre problème criant se pose, celui des décisions d’orientation scolaire, qui représentent près de 40 % des demandes concernant des enfants à la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées ; je rappelle que chaque enfant bénéficie d’un projet personnalisé de scolarisation qui doit être réévalué chaque année. Or l’application de ces décisions est souvent rendue impossible en raison du nombre insuffisant de places disponibles dans les établissements spécialisés, mais aussi de la difficulté à trouver des auxiliaires de vie scolaire, les AVS, et, depuis peu, des contentieux apparaissent.
Le 4 juin 2010, le tribunal administratif de Pau a tranché en faveur de sept familles d’enfants handicapés et a condamné le ministère de l’éducation nationale à revoir « son refus implicite » d’attribuer des AVS à ces enfants et à payer 300 euros à chaque famille pour les frais de procédure engagés.
La précarité, l’absence de formation et le turn over fréquent des auxiliaires de vie scolaire ne sont pas propices à une bonne intégration scolaire des enfants handicapés. Certes, dans sa déclaration du 15 septembre 2009, Luc Chatel a promis de reconduire les 5 000 postes d’AVS arrivés en fin de contrat, au travers d’une convention-cadre, mais la réalité est tout autre : la reconduction des contrats a permis seulement de pérenniser 130 postes d’AVS ! Il s’agit, une fois de plus, de paroles non suivies de faits !
Le ministère de l’éducation nationale vient de signer deux nouvelles conventions-cadres, la première avec les quatre associations représentatives des personnes handicapées, la seconde avec les services d’aide et d’accompagnement à domicile. Quel est leur contenu ? Prévoient-elles une professionnalisation des métiers de l’accompagnement ? Envisagent-elles de conforter les emplois d’AVS ?
J’en viens aux mesures de substitution aux règles de mise en accessibilité du bâti neuf. Je regrette sincèrement que M. le rapporteur s’engage sur une voie contraire à l’esprit de la loi du 11 février 2005. Il est vrai que, à plusieurs reprises, le Gouvernement a tenté d’étendre les possibilités de dérogation pour les constructions de bâtiments neufs. Heureusement, le Conseil constitutionnel a censuré l’article en cause dans la loi de finances rectificative de 2009.
Nous traiterons des autres points contenus dans le texte, notamment la prestation de compensation du handicap, qui sera évoquée par notre collègue Yves Daudigny, lors de la discussion des amendements.
Cependant, compte tenu des enjeux et de l’importance de cette proposition de loi, nous regrettons que son examen ait été retardé à plusieurs reprises et qu’elle soit discutée dans un laps de temps qui ne favorise pas les échanges. Décidément, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’initiative parlementaire est encore une fois vilipendée !