Je partage l’opinion de M. le secrétaire d’État sur la possibilité de mettre en œuvre, dans ces hypothèses, les procédures de médiation. L’idée est judicieuse.
Je suis de ceux qui croient beaucoup à la médiation et je constate, semestre après semestre, le développement de cette nouvelle approche des procédures. Je trouve qu’elle présente beaucoup d’avantages et que nous sommes effectivement dans un domaine où il faut la favoriser le plus possible.
L’action de groupe peut jouer un rôle vertueux de régulateur, en particulier lorsque des produits comportent naturellement de ces petites malfaçons qui créent pour les utilisateurs des dommages sans doute limités mais, comme on dit communément, extrêmement embêtants, et c’est la situation la plus courante dans le domaine des biens de consommation.
Si un bien de consommation présente un gros défaut, il disparaît assez rapidement du marché. Le problème des biens de consommation, ce sont les petits défauts, qui n’apparaissent pas à tous les coups, que l’on supporte mais dont on souffre, non sans susciter parfois un mécontentement certain !
Je dois dire que l’hostilité du MEDEF à l’action de groupe est tristement significative de l’état des réflexions de cet organisme professionnel. Paradoxalement, cela met en évidence, me semble-t-il, la nécessité de mettre en place une telle procédure dans notre droit, car elle conduira à un changement d’esprit et de comportement de la part des entreprises.
Je vous en donnerai un seul exemple. Lorsque j’étais directeur de l’Institut national de la consommation, nous avons décelé une anomalie sur les moteurs diesel d’un des grands constructeurs d’automobiles - nous ne pouvons pas, en principe, citer de marques en séance publique, mais enfin, elles sont peu nombreuses en l’occurrence… Ces moteurs rendaient l’âme au bout de cinquante mille kilomètres, alors qu’un diesel dure habituellement beaucoup plus longtemps que les autres moteurs.
Nous avons dénoncé la situation à René Monory, alors ministre. Convoqué au cabinet du ministre, je me suis trouvé en tête-à-tête avec le directeur de l’entreprise en question, qui m’a alors dit : « Rendez-vous compte, c’est fou. Nous en avons vendu cinquante à des chauffeurs de taxi de Tunis et vous allez bloquer notre marché ».
Je lui ai répondu : « Monsieur, c’est vous qui êtes fou ! Lorsque les chauffeurs de taxi de Tunis s’apercevront que leurs moteurs ne vont pas au-delà de cinquante mille kilomètres, votre marque sera rayée de leurs acquisitions, et pas pendant un an ou deux, mais pour des années et des années. C’est en réalité vous qui avez une très mauvaise appréciation de vos propres intérêts ».
Et, s’il vous plaît, que l’on renonce à soutenir que l’action de groupe constitue un handicap pour l’activité économique. N’en abusez pas non plus, monsieur le secrétaire d’État, même si vous avez autour de vous des gens qui vous demandent de le dire, car c’est là une idée fausse.