Mais il est vrai, et je le déplore, que la prospective n’est pas le fort de notre pays. Je souhaite simplement que le prix du « court-termisme » que la France aura à payer dans les mois et les années qui viennent ne soit pas trop élevé.
Pour sa part, la commission des affaires économiques a défini depuis plusieurs années une ligne claire et simple : celle du pragmatisme, de l’ouverture d’esprit et de la vision prospective. En témoigne l’adoption à l’unanimité, en 2003, par notre commission d’un rapport sur ce sujet, présenté par notre collègue Jean-Marc Pastor. N’oublions pas que, dans ce document, nous appelions à la définition d’une loi fondatrice sur les biotechnologies.
Je suis convaincu qu’il nous faudra nécessairement passer à cette étape supérieure dans quelques années ; nous verrons alors que les productions de qualité ne sont pas inconciliables avec l’innovation et la vision prospective. Sur ce sujet, j’ai tissé des passerelles aussi bien avec des sénateurs de gauche qu’avec des collègues du groupe UMP. J’ai en particulier eu des discussions très intéressantes avec Dominique Mortemousque, sénateur de Dordogne, qui est, comme beaucoup d’entre vous, très soucieux de la protection des territoires et de leurs spécificités.
C’est aussi dans cet esprit constructif et pragmatique que nous avons préparé cette deuxième lecture. Nous avons été sensibles à la qualité du travail des députés, et je tiens à saluer ici l’intelligence, le sens de l’écoute et la rigueur intellectuelle du rapporteur Antoine Herth et du président Patrick Ollier.
Disons-le très simplement, le texte adopté par les députés, à l’issue de six journées de débat passionné, nous convient pour l’essentiel. Monsieur le ministre d’État, c’est aussi votre opinion, je ne peux donc que confirmer votre analyse. Je ne présenterai pas les différentes dispositions dans le détail, me contentant de préciser que les députés ont inséré sept nouveaux articles dans le projet de loi, qu’ils en ont supprimé un, ont adopté quatre articles conformes et ont confirmé la suppression de l’article 10. Restent donc en discussion dix-huit articles.
Je me félicite en tout cas que l’architecture générale du texte, organisée autour de la création d’un haut conseil des biotechnologies et des principes de transparence et de responsabilité, ait été confirmée.
La liberté de consommer et de produire avec ou sans OGM, principal acquis du Grenelle de l’environnement, est reconnue par l’Assemblée nationale, qui l’a encadrée d’une manière encore plus étroite que ne l’avait fait le Sénat. En effet, l’Assemblée nationale a voulu aller au-delà des exigences communautaires du respect de l’environnement et de la santé publique : elle a tenu à évoquer, dès l’article 1er, qui fixe les grands principes, l’enjeu de la coexistence de cultures OGM et non OGM sur notre territoire.
La commission ne vous présente donc qu’un seul amendement dont la motivation essentielle est de rendre conforme au droit européen le dispositif de l’article 1er.
C’est en effet un élément fondamental de ce dossier qui est trop souvent oublié : la France n’est pas isolée et coupée du reste du monde, elle est intégrée dans un contexte européen et international. Le législateur doit donc veiller tout particulièrement à ce que nos lois ne contredisent pas nos engagements internationaux et européens.
Enfin, je souhaitais de nouveau aborder la question de la recherche en biotechnologie végétale : comme vous vous en souvenez, nous avions adopté en première lecture un dispositif de « Sofiplantes » pour soutenir l’investissement dans la recherche en génomique végétale. Le Gouvernement avait objecté, d’une part, les contraintes pesant sur les finances publiques et, d’autre part, la difficulté à soutenir un secteur de la recherche plutôt que d’autres par un dispositif fiscal spécifique.
J’ai entendu ces arguments ; j’ai donc souhaité travailler avec le Gouvernement sur les possibilités qu’offraient le dispositif en faveur des jeunes entreprises innovantes ou celui du crédit d’impôt recherche.
En fin de compte, le Gouvernement estime qu’il n’est pas possible d’aller dans cette voie. Quant à l’idée d’un dispositif confortant le rôle des fondations pour financer la recherche, le Gouvernement y a été en définitive également défavorable. Restent donc des engagements de nature politique. Monsieur le ministre, je suis très désireux de vous entendre nous confirmer que des orientations claires seront données à l’INRA, l’Institut national de la recherche agronomique, en faveur des biotechnologies végétales. Il me semblerait à ce titre pertinent – tout le monde en conviendra – d’affecter les moyens de l’INRA plutôt à de la recherche en génomique qu’à des études de sciences sociales.