Séance en hémicycle du 16 avril 2008 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • OGM
  • biotechnologie
  • d’ogm
  • génétiquement
  • l’environnement

La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L’ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif aux organismes génétiquement modifiés (nos 269, 284).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre d’État.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à rendre hommage au travail réalisé par votre commission des affaires économiques, dont je salue tout particulièrement le président, M. Jean-Paul Emorine, et le rapporteur, M. Jean Bizet, ainsi que par l’ensemble des parlementaires, sur une question évoquée depuis sept ans, jamais tranchée, que d’aucuns essaient de caricaturer ou de rendre complexe à l’extrême, alors qu’elle est, certes, difficile, mais aussi assez simple dans son architecture.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement avait choisi initialement de suivre la procédure dite d’urgence pour une raison simple : nous étions en effet sous le coup d’une condamnation pour non-transposition, ou pour transposition tardive, d’une directive européenne. Cette situation posait problème non seulement du fait de la sanction financière encourue par la France, mais aussi et surtout parce que, vous en conviendrez, elle laissait planer un doute sur le positionnement général de notre pays dans l’Union européenne, et ce quelques mois à peine avant qu’il en assume la présidence.

Toutefois, il est apparu nécessaire de revenir sur cette déclaration d’urgence et de permettre ainsi à chaque assemblée de procéder à deux lectures. Voilà pourquoi nous revenons aujourd'hui devant vous. Je dois dire que, compte tenu de l’état actuel des travaux, nous ne pouvons que nous féliciter d’avoir procédé ainsi.

Sur ce dossier, le Gouvernement a présenté un texte, fruit, je ne saurais trop y insister, d’un travail d’équipe mené avec Michel Barnier, aujourd'hui ministre de l’agriculture, mais qui a pu se souvenir à cette occasion d’autres fonctions assumées au sein d’autres gouvernements, avec Nathalie Kosciusko-Morizet et avec Valérie Pécresse, le tout sous l’autorité de François Fillon, Premier ministre.

Ce projet de loi initial a été amendé et amélioré par le Sénat avant d’être transmis à l’Assemblée nationale. On peut noter d’emblée qu’aucun des ajouts des députés n’entre en contradiction avec la position de la Haute Assemblée. J’en veux pour preuve que, si les informations dont je dispose sont exactes, votre rapporteur n’envisage de revenir sur aucune des améliorations proposées par l’Assemblée nationale. Il n’a déposé qu’un seul amendement tendant à préciser l’un des amendements adoptés par les députés, ce qui me paraît absolument indispensable, je m’en expliquerai tout à l’heure.

L’Assemblée nationale a introduit la possibilité de réunions du Haut conseil des biotechnologies en séance plénière, l’élargissement de sa saisine aux députés et aux sénateurs, l’encadrement de la liberté d’expression des membres dudit Haut conseil par un règlement intérieur, comme c’est le cas pour toute organisation qui doit gérer son propre fonctionnement.

Sur le fond, l’Assemblée nationale a surtout tenu à préciser la philosophie générale et les fondements de ce texte, c’est-à-dire la protection très stricte de la diversité des territoires et des agricultures, notamment grâce à l’amendement n° 112, déposé par le député François Grosdidier, qui introduit la notion d’« intégrité de l’environnement » dans l’article 1er et qui a été adopté à l’unanimité.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, je suis heureux que le Sénat ait choisi de ne pas revenir sur cet amendement, malgré les rumeurs contraires que nous avons pu lire de-ci de-là, le « marquis de Source Sûre » n’étant jamais tout à fait neutre dans ce genre d’affaire…

L’Assemblée nationale a souhaité apporter une autre précision avec l’amendement n° 252, qui nécessite cependant une clarification si l’on veut asseoir sa valeur juridique, notamment en ce qui concerne la définition de la notion « sans organismes génétiquement modifiés ».

Aujourd’hui, nous pouvons dire avec force que ce texte, qui respecte le Grenelle de l’environnement, est, de surcroît, intégralement conforme aux déclarations du Président de la République du 25 octobre 2007 dans un discours qui, prononcé devant l’ensemble des collèges du Grenelle de l’environnement, a été applaudi et salué par tous les participants présents ce jour-là au palais de l’Élysée. Permettez-moi d’en rappeler ces quelques mots : « La vérité est que nous avons des doutes sur l’intérêt actuel de certains OGM pesticides ; la vérité est que nous avons des doutes sur le contrôle de la dissémination des OGM. » Mais, la vérité, c’est aussi que nous avons besoin de la recherche, que nous avons besoin d’un cadre juridique transparent, que nous avons besoin d’une loi. La vérité, c’est qu’il faut pouvoir produire et consommer avec ou sans OGM. Or la transparence évoquée par le Président de la République, ce texte l’établit et nous permet de sortir enfin des errements, du laisser-faire, des non-dits, de l’absence de traçabilité, de l’opacité.

Quelle est la situation aujourd'hui, compte tenu du texte qui vous est soumis ?

D’abord, le seul OGM pesticide cultivé en France est, pour l’instant, interdit, en attendant de nouvelles expertises ; c’est un fait.

Ensuite, comme le souhaitent le Sénat et l’ensemble des Français, notamment une grande partie des agriculteurs, sinon tous les agriculteurs, la recherche française sera soutenue et renforcée par ce texte dans tous les domaines concernant les biotechnologies : écologie, toxicologie, épidémiologie, utilisation de la biologie moléculaire à des fins médicales, comme dans le cas de la mucoviscidose. Cette recherche, indispensable, doit pouvoir être menée, sous réserve d’extrêmes précautions, y compris en plein champ, quand c’est nécessaire.

Par ailleurs, ce texte nous permet de combler le retard pris par la France dans la transposition de la directive n° 2001/18/CE du 12 mars 2001 négociée, je le rappelle, par Lionel Jospin et Dominique Voynet.

Enfin, ce texte, comme le veulent les Français, est l’un des plus, sinon le plus précautionneux au monde, vis-à-vis de la diversité des agricultures, des produits de qualité, des terroirs, des appellations d’origine contrôlée, ou AOC, qui constituent un patrimoine culturel inestimable et un avantage commercial international.

Le débat, par son intensité, a été à la hauteur des enjeux et de la difficulté de l’exercice ; l’avoir ouvert et le mener à son terme est tout à l’honneur de cette majorité. Le Parlement s’est pleinement approprié l’un des sujets les plus difficiles qu’ait eu à aborder le Grenelle de l’environnement et, grâce aux travaux du Sénat, nous sommes en mesure de tenir nos engagements vis-à-vis des Français.

Je suis heureux de saluer à nouveau la présence au banc du Gouvernement du ministre de l’agriculture et de Nathalie Kosciusko-Morizet qui démontre, si c’était nécessaire – on entend dire tellement de choses -

M. Roland Courteau s’exclame.

Sourires

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre d’État

… la totale unité du gouvernement de la France sur ce point.

Pour me résumer, mesdames, messieurs les sénateurs, premièrement, nous soutenons la recherche, deuxièmement, nous instaurons la transparence et, troisièmement, nous disposons enfin d’un cadre juridique clair

Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre d’État

Permettez-moi, avant de conclure, monsieur Emorine, monsieur Bizet, de vous exprimer nos vifs remerciements et toute notre estime pour ce très difficile travail.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Vifs applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette deuxième lecture du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés constitue en soi un événement.

En effet, nous n’avions pas eu l’occasion de procéder à une deuxième lecture du projet de loi de 2006, qui n’avait du reste même pas été examiné par l’Assemblée nationale à l’époque. Il me semble donc qu’il faut reconnaître au Gouvernement une certaine détermination et un certain courage pour avoir souhaité faire avancer un débat législatif qui a trop souvent cristallisé les passions.

La poursuite de l’examen de ce texte est d’autant plus importante qu’il est urgent de légiférer dans ce domaine. Le gouvernement de Lionel Jospin, qui avait négocié les deux directives sur les OGM, s’était refusé à en assumer la transposition. Puis, l’examen du projet de loi présenté sous la précédente législature n’a pas pu arriver à son terme. Aujourd’hui, la France risque d’être condamnée, le 5 juin prochain, par la Cour de justice des Communautés européennes à plusieurs dizaines de millions d’euros d’amende pour le retard pris dans la transposition.

Je ne m’attarderai pas, mes chers collègues, sur les tensions qui ont accompagné l’examen de ce projet de loi. Je reste convaincu, pour ma part, que le législateur doit pouvoir travailler dans le calme et la sérénité. Il est certain que ce texte n’a pas encore permis d’atteindre cet objectif, mais j’ai bon espoir que la seconde lecture permette d’apaiser les esprits.

Comme plusieurs d’entre vous, j’ai reçu des messages d’intimidation et de menace, dont certains visaient ma propre famille. Je tiens à dire qu’ils n’ont pas eu d’effet sur la démarche qui est la mienne et qui consiste essentiellement à être constructif et pragmatique.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

C’est dans cet esprit que j’analyse la situation de notre pays aujourd’hui. D’un côté, nous nourrissons largement notre bétail avec des plantes génétiquement modifiées que nous importons depuis les accords de Blair House de 1992. De l’autre, notre opinion publique a été progressivement convaincue, par le manque d’informations ou, pis encore, par la désinformation, que la culture de plantes génétiquement modifiées constitue une menace pour l’environnement ou pour la santé.

Nous nous trouvons donc dans une situation paradoxale : les plantes génétiquement modifiées font déjà partie de notre réalité agricole pendant que certains prétendent qu’elles constituent une menace pour notre population. Pourtant, ces mêmes personnes savent bien que nous ne pouvons pas trouver aujourd’hui de substituts aux protéines végétales génétiquement modifiées importées en masse pour nourrir notre bétail.

Nous voyons les prix des matières premières et des denrées agricoles s’envoler. Quelles vont être les options qui s’ouvriront à nous dans trois, quatre ou cinq ans, lorsque les protéines végétales conventionnelles seront devenues inaccessibles ou inabordables ? Pour le moment, je n’ai pas de réponse à cette question, mais je souhaitais vous soumettre ce problème dont nous reparlerons – soyez-en sûrs ! – dans quelques années. À ce moment-là, nous serons les uns et les autres comptables de nos choix devant nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Mais il est vrai, et je le déplore, que la prospective n’est pas le fort de notre pays. Je souhaite simplement que le prix du « court-termisme » que la France aura à payer dans les mois et les années qui viennent ne soit pas trop élevé.

Pour sa part, la commission des affaires économiques a défini depuis plusieurs années une ligne claire et simple : celle du pragmatisme, de l’ouverture d’esprit et de la vision prospective. En témoigne l’adoption à l’unanimité, en 2003, par notre commission d’un rapport sur ce sujet, présenté par notre collègue Jean-Marc Pastor. N’oublions pas que, dans ce document, nous appelions à la définition d’une loi fondatrice sur les biotechnologies.

Je suis convaincu qu’il nous faudra nécessairement passer à cette étape supérieure dans quelques années ; nous verrons alors que les productions de qualité ne sont pas inconciliables avec l’innovation et la vision prospective. Sur ce sujet, j’ai tissé des passerelles aussi bien avec des sénateurs de gauche qu’avec des collègues du groupe UMP. J’ai en particulier eu des discussions très intéressantes avec Dominique Mortemousque, sénateur de Dordogne, qui est, comme beaucoup d’entre vous, très soucieux de la protection des territoires et de leurs spécificités.

C’est aussi dans cet esprit constructif et pragmatique que nous avons préparé cette deuxième lecture. Nous avons été sensibles à la qualité du travail des députés, et je tiens à saluer ici l’intelligence, le sens de l’écoute et la rigueur intellectuelle du rapporteur Antoine Herth et du président Patrick Ollier.

Disons-le très simplement, le texte adopté par les députés, à l’issue de six journées de débat passionné, nous convient pour l’essentiel. Monsieur le ministre d’État, c’est aussi votre opinion, je ne peux donc que confirmer votre analyse. Je ne présenterai pas les différentes dispositions dans le détail, me contentant de préciser que les députés ont inséré sept nouveaux articles dans le projet de loi, qu’ils en ont supprimé un, ont adopté quatre articles conformes et ont confirmé la suppression de l’article 10. Restent donc en discussion dix-huit articles.

Je me félicite en tout cas que l’architecture générale du texte, organisée autour de la création d’un haut conseil des biotechnologies et des principes de transparence et de responsabilité, ait été confirmée.

La liberté de consommer et de produire avec ou sans OGM, principal acquis du Grenelle de l’environnement, est reconnue par l’Assemblée nationale, qui l’a encadrée d’une manière encore plus étroite que ne l’avait fait le Sénat. En effet, l’Assemblée nationale a voulu aller au-delà des exigences communautaires du respect de l’environnement et de la santé publique : elle a tenu à évoquer, dès l’article 1er, qui fixe les grands principes, l’enjeu de la coexistence de cultures OGM et non OGM sur notre territoire.

La commission ne vous présente donc qu’un seul amendement dont la motivation essentielle est de rendre conforme au droit européen le dispositif de l’article 1er.

C’est en effet un élément fondamental de ce dossier qui est trop souvent oublié : la France n’est pas isolée et coupée du reste du monde, elle est intégrée dans un contexte européen et international. Le législateur doit donc veiller tout particulièrement à ce que nos lois ne contredisent pas nos engagements internationaux et européens.

Enfin, je souhaitais de nouveau aborder la question de la recherche en biotechnologie végétale : comme vous vous en souvenez, nous avions adopté en première lecture un dispositif de « Sofiplantes » pour soutenir l’investissement dans la recherche en génomique végétale. Le Gouvernement avait objecté, d’une part, les contraintes pesant sur les finances publiques et, d’autre part, la difficulté à soutenir un secteur de la recherche plutôt que d’autres par un dispositif fiscal spécifique.

J’ai entendu ces arguments ; j’ai donc souhaité travailler avec le Gouvernement sur les possibilités qu’offraient le dispositif en faveur des jeunes entreprises innovantes ou celui du crédit d’impôt recherche.

En fin de compte, le Gouvernement estime qu’il n’est pas possible d’aller dans cette voie. Quant à l’idée d’un dispositif confortant le rôle des fondations pour financer la recherche, le Gouvernement y a été en définitive également défavorable. Restent donc des engagements de nature politique. Monsieur le ministre, je suis très désireux de vous entendre nous confirmer que des orientations claires seront données à l’INRA, l’Institut national de la recherche agronomique, en faveur des biotechnologies végétales. Il me semblerait à ce titre pertinent – tout le monde en conviendra – d’affecter les moyens de l’INRA plutôt à de la recherche en génomique qu’à des études de sciences sociales.

Marques d’approbation sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

M. Jean Bizet, rapporteur. Pour conclure, j’ai l’espoir que l’adoption de ce texte par le Sénat puisse contribuer à apaiser grandement les passions nées lors de ce débat sur les OGM, qui apparaîtront avec le recul – j’en suis convaincu – tout à fait étonnantes, disproportionnées et irréalistes au regard de notre environnement international.

Applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Madame la secrétaire d’État, permettez-moi tout d’abord de vous féliciter pour l’attitude que vous avez adoptée à la suite de la discussion à l'Assemblée nationale de l’amendement n° 252 de mon ami et camarade André Chassaigne. Vous avez été en phase avec le peuple de France : c’est pourquoi aujourd'hui huit Français sur dix soutiennent votre position.

Je ne sais pas si les membres de la majorité sont maintenant réconciliés. J’en doute au regard du vote de l'Assemblée nationale et des dissensions réelles qui persistent au Sénat, malgré l’absence de M. Jean-François Le Grand. Mais, en tout cas, le débat va nous montrer si le Sénat est en harmonie ou en décalage total avec l’opinion majoritaire au sein de notre pays.

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la révolution verte n’aura pas lieu. La multiplication des paroles vertueuses, sans traduction sur le terrain, a eu raison des espoirs qu’avait fait naître le Grenelle de l’environnement. Les masques tombent, révélant les véritables intentions d’un gouvernement dont les politiques sont impudemment aux antipodes des objectifs du développement durable.

Pour réduire les gaz à effet de serre, on abandonne le fret en faveur du tout routier, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

… l’objectif de réduction des pesticides est revu largement à la baisse. Pour défendre la biodiversité, on décide de développer les cultures d’organismes génétiquement modifiés. Nous pourrions hélas ! multiplier les exemples.

Nous devons dénoncer l’hypocrisie gouvernementale et prendre la responsabilité, dès aujourd’hui, de dire haut et fort que les engagements en matière de développement durable ne sont pas respectés.

Le texte dont nous discutons est symptomatique du fossé qui se creuse entre les attentes de nos concitoyens et les politiques de la majorité gouvernementale. Le déficit démocratique dont souffrent ces politiques, comme en témoigne dans le projet de loi votre volonté de repousser toutes les formes d’expression de la société civile, explique en partie ce décalage.

Les Français ne veulent pas d’OGM, ni dans leur assiette ni dans leur campagne ! Et vous leur répondez que, puisqu’ils en mangent déjà, pourquoi ne pas poursuivre dans cette voie ? Pourquoi ne pas continuer aussi à respirer l’amiante puisque nous l’avons fait pendant plusieurs décennies ?

Murmures sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Un des arguments avancés en faveur des OGM est que, puisque l’espérance de vie augmente, nous ne devons pas nous préoccuper de la présence sur le marché et dans notre environnement des produits de Monsanto.

Marques de désapprobation sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Rappelons, cependant, que cette firme est le principal producteur de polychlorobiphényles ou pyralènes – polluants organiques persistants aujourd’hui interdits, responsables de nombreuses pollutions –, de l’agent orange – herbicide fortement cancérigène utilisé pendant la guerre du Vietnam – et d’hormones de croissance bovine et laitière, fort heureusement encore interdites en Europe. Et ce sont ces personnes que vous voulez soutenir ?

Exclamations ironiques sur certaines travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Aujourd’hui, il est vrai, la communauté scientifique n’a pas tranché la question de l’innocuité ou de la nocivité des OGM. Mais, en présence de doutes, il appartient aux politiques de prendre leurs responsabilités, dans l’intérêt général de nos concitoyens.

La peur des conséquences des OGM sur la santé publique et sur la faune et la flore n’est pas irrationnelle. Le Président de la République, dans un discours faisant suite au Grenelle de l’environnement, affirmait d’ailleurs : « la vérité est que nous avons des doutes sur l’intérêt actuel des OGM pesticides ; la vérité est que nous avons des doutes sur le contrôle de la dissémination des OGM ; la vérité est que nous avons des doutes sur les bénéfices sanitaires et environnementaux des OGM ».

Prenons l’exemple des OGM pesticides. Leurs défenseurs les présentent souvent comme une alternative aux pesticides, dont ils ont raison de dénoncer la dangerosité. En ce moment, des députés européens mènent d’ailleurs une enquête sur les taux de pesticides présents dans les fruits et les légumes. Les premiers résultats sont alarmants. Pour autant, le recours aux OGM est-il une solution sans danger pour les consommateurs ?

Actuellement, il existe deux catégories de plantes génétiquement modifiées : d’une part, les « Bt » qui fabriquent des insecticides et, d’autre part, des plantes tolérantes aux herbicides du type Roundup, capables de les stocker sans en mourir. Il a été avancé que la protéine produite par les plantes génétiquement modifiées est identique à celle contenue dans certaines préparations autorisées en agriculture biologique : elle ne serait donc pas dangereuse. Or, le comité préfigurant la haute autorité sur les OGM a expliqué au contraire que la protéine produite par le transgène n’est pas identique à celle que produit le bacille de Thuringe. Vous le voyez, mes chers collègues, nous aurions tort de nous précipiter et de prendre des risques inutiles !

Au sujet de ces OGM, nous regrettons que, pour déterminer avec sérieux les risques toxicologiques encourus, les protocoles sur les pesticides ne leur soient pas applicables.

Ce constat pose la question des moyens alloués à la recherche. L’article 11 ter du projet de loi pose des principes intéressants. Espérons qu’ils trouveront une traduction en moyens financiers et humains, mais permettez-moi d’en douter !

De plus, afin d’éviter que nos débats ne soient parasités par des accusations primaires, nous voudrions être très clairs : nous sommes favorables aux manipulations génétiques, indispensables pour faire progresser la recherche.

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Pour nous, c’est la recherche fondamentale qui doit être davantage développée et encouragée pour que la recherche appliquée s’effectue en toute connaissance de cause. Nous devons continuer les recherches dans l’intérêt du plus grand nombre et non pour le développement commercial de deux ou trois groupes multinationaux.

Je voudrais dire quelques mots sur l’argument de l’indépendance de la France et de l’Europe en protéines végétales, souvent avancé dans cet hémicycle pour justifier le recours aux OGM : c’est une vraie question. Selon nous, d’autres solutions peuvent toutefois être avancées.

Nous nous réjouissons d’ailleurs de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement prévoyant la remise au Parlement d’un rapport relatif aux possibilités de développement d’un plan de relance de la production de protéines végétales. Ce plan constituerait une alternative aux cultures d’OGM, et il permettrait de garantir l’indépendance alimentaire.

Sur cette question, l’application du principe de la souveraineté alimentaire pourrait se traduire par une remise en cause des accords de limitation de production et la mise en œuvre de la préférence communautaire, ainsi que par le recours à des pratiques agronomiques abandonnées, comme le doublage des cultures. Quand j’étais enfant, on semait souvent une graminée dans les céréales de sorte que, lorsque les céréales étaient récoltées, les bêtes pouvaient paître. Aujourd'hui, cela ne se fait plus. Les sols sont nus, alors que l’on dispose de machines qui peuvent cueillir les épis, ce qui n’était pas le cas à l’époque.

En tout état de cause, nous restons persuadés que la généralisation des cultures OGM ne suffira pas à régler la question de la dépendance en protéines végétales.

Il est temps de prendre position et de se prononcer sur le modèle agricole que nous voulons. La promotion des OGM tout comme l’utilisation massive de pesticides répondent en effet aux exigences d’une certaine conception de l’agriculture.

Les tenants de cette conception ne s’embarrassent pas de la lutte contre la faim et contre les inégalités sociales, pas plus que de la réduction de la dépendance dans laquelle se trouvent les petits exploitants, bien au contraire, comme on le voit avec Monsanto. Ils soumettent les exploitants agricoles à une poignée d’oligopoles mondiaux dont l’unique but est de verrouiller et de contrôler l’ensemble du marché des semences, au mépris de l’indépendance alimentaire des pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Telle est la vérité, même si elle vous choque, monsieur Braye !

Serons-nous capables, mes chers collègues, de concurrencer dans leurs domaines, notamment sur le terrain de la productivité, des pays aussi grands et aussi importants que les États-Unis, le Canada ou les pays d’Amérique latine ?

Le savoir-faire européen et la qualité de nos produits ne peuvent-ils pas nous rendre compétitifs dans d’autres créneaux, générant une plus grande valeur ajoutée ? Je pense que nous nous trompons véritablement de combat.

À cet égard, j’espère que la majorité sénatoriale ne répondra pas aux injonctions disgracieuses de M. Fillon tendant à supprimer la protection accordée notamment aux AOC. L’amendement déposé par l’UMP au Sénat est inacceptable : il tend à vider de son contenu l’amendement n° 252 déposé à l’Assemblée nationale par notre collègue André Chassaigne, amendement dont l’adoption a permis une avancée significative.

En ce qui concerne maintenant l’agriculture biologique, comment peut-on à la fois prétendre vouloir développer l’agriculture biologique en France – la part du bio devrait passer à 6 % de la surface cultivée en 2010 et à 20 % en 2020, contre 2 % actuellement – et reconnaître que ces productions seront très probablement contaminées par les cultures OGM, un simple mécanisme d’indemnisation étant prévu dans ce cas ?

Le risque de dissémination est bien réel. Les exemples de contamination de cultures se multiplient. Monsieur le ministre d’État, vous avez vous-même déclaré ceci : « Sur les OGM, tout le monde est d’accord : on ne peut pas contrôler la dissémination, donc on ne va pas prendre le risque. »

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Il a également été constaté que la faune est atteinte, que ce soit par des insectes ou par des vers de terre. Les apiculteurs ont ainsi rapporté, notamment dans le Lot-et-Garonne, la contamination du pollen de leurs abeilles. Nous n’avons pas inventé ces faits !

Pour conclure, si le projet de loi a fait l’objet de quelques améliorations à l’Assemblée nationale, nous ne saurions nous en satisfaire tant le modèle agricole qu’il traduit ne nous convient pas.

Cependant, nous serons vigilants afin que les quelques avancées du texte ne soient pas anéanties par le Sénat : je pense aux dispositions concernant les AOC, à la possibilité pour un député ou un sénateur de saisir le Haut conseil des biotechnologies, à la publicité des avis du Haut conseil au nom de la transparence et à l’étiquetage des semences.

Nous avons déposé un certain nombre d’amendements visant à assurer une meilleure information de nos concitoyens, grâce notamment à l’étiquetage des produits issus d’animaux nourris aux OGM.

Nous demanderons également une plus grande prise en compte de la société civile dans les décisions du Haut conseil, ainsi que des populations, pour décider avec elles si elles veulent ou non des OGM.

Gouverner, c’est non pas céder aux revendications des intérêts privés, mais au contraire satisfaire l’intérêt général. Gouverner, c’est non pas s’aligner, au nom de la fatalité, sur les décisions de quelques technocrates soi-disant éclairés, mais prendre des décisions au nom de l’intérêt général, en accord avec les attentes de nos concitoyens.

Le projet de loi ne répond pas à ces attentes, que ce soit à l’échelon national ou à l’échelon communautaire. Il n’apporte pas de garanties en termes d’absence de dangerosité ou de contamination. C’est pourquoi nous voterons contre.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le débat difficile, voire tendu, auquel nous avons assisté lors de l’examen en première lecture de ce projet de loi montre, s’il en est besoin, combien la question des OGM cristallise des positions radicalement opposées et passionnelles.

Nous avons tous été surpris de l’intransigeance de certains propos et de quelques affirmations sans concessions, parfois peu étayées.

Comment se fait-il que, alors que les rapports sur les OGM se sont succédé au fil des années et que d’autres pays européens se sont prononcés sur cette question, parfois à plusieurs reprises, nous en soyons encore là en France ?

Certes, les limites de l’expertise scientifique et la complexité des phénomènes biologiques n’ont pas permis au politique de jouer son rôle classique d’arbitre, séparant clairement le « permis » de « l’interdit ».

Sans doute aussi les gouvernements successifs n’ont-ils pas su créer les conditions propices à un authentique échange d’idées susceptible d’éclairer les Français sur l’ensemble des enjeux des OGM et de dégager des consensus.

Le débat s’est déroulé dans les milieux associatif, scientifique et agricole, ainsi que dans les médias, mais sans véritable échange ou confrontation entre l’expert, le politique et le citoyen.

Qu’est-ce exactement qu’un OGM ? Quels sont les différents types d’OGM existants et leurs multiples fonctions ? Ces questions ont largement été éludées au profit de raccourcis parfois simplistes.

Le résultat est que, aujourd'hui, nos concitoyens affichent une hostilité globale à l’égard des OGM. Alors que les OGM font toujours l’objet de controverses scientifiques, les risques qu’ils peuvent présenter sont largement plus présents dans les esprits que leurs bénéfices potentiels.

Il n’en demeure pas moins que la place des OGM continue de s’étendre. Ils sont très présents dans notre vie quotidienne, dans certains aliments importés et dans de nombreux médicaments.

La question de savoir si on est pour ou contre les OGM est ainsi dépassée. Ils existent et on ne peut ignorer ni la dépendance des agriculteurs français et européens en protéines végétales à l’égard des firmes américaine ni leur potentiel en termes d’innovation, notamment dans le domaine pharmaceutique.

Affirmons-le : il n’y a jamais eu de progrès sans prise de risque. Si nous ne voulons pas que le développement des OGM soit soumis à la seule logique économique, nous devons assumer ensemble ce risque, avec beaucoup de rigueur et de vigilance.

Veillons à ce que notre débat soit fondé non sur des clichés simplistes et des postures politiciennes, comme le souhaitent les fondamentalistes de tous bords, mais sur des principes objectifs, clairs et tangibles. Interrogeons-nous sur l’intérêt de tel ou tel OGM spécifiquement et non généralement. Appuyons-nous sur les avis des scientifiques pour le choix des cultures OGM.

Le processus du Grenelle de l’environnement, que vous avez lancé, monsieur le ministre d’État, a montré, par son existence même et par la présence jusqu’à son terme de tous les acteurs conviés à y participer, que le dialogue était possible et que des équilibres pouvaient être trouvés, y compris sur les OGM. Plusieurs orientations ont alors fait l’objet d’un consensus.

Ainsi, il est apparu nécessaire que la science réponde aux questions que se pose la société sur les OGM, notamment s’agissant de leurs effets sur la santé, sur l’environnement et sur l’économie. Il faut en effet une volonté forte pour développer la recherche en génomique végétale, en toxicologie, en épidémiologie humaine et du milieu naturel. J’arrête là cette énumération, car la liste est, en fait, sans fin.

De notre capacité de recherche publique dépend notre capacité d’expertise, c'est-à-dire aussi notre incapacité en matière d’évaluation totale des risques.

Or la recherche ne constituait pas l’axe prioritaire du projet de loi initial. Je me félicite donc que l’examen du texte en première lecture au Sénat ait permis d’introduire un chapitre sur cet aspect.

Le dispositif dénommé « Sofiplantes » visant à renforcer le financement de la recherche en génomique végétale a été supprimé par l’Assemblée nationale, en raison, semble-t-il, de sa complexité. Nous ne pouvons que le regretter. Il me paraît souhaitable de trouver pour l’avenir un dispositif alternatif afin de soutenir les entreprises qui se créent dans ce secteur.

L’adoption d’une loi sur les OGM créant une haute autorité et déclinant en particulier les principes de la transparence et de l’information citoyenne, ainsi que la préservation du libre choix, a elle aussi fait l’objet d’un consensus.

La liberté de choix est essentielle. Elle doit permettre à chacun de se déterminer en toute connaissance de cause. À cet égard, l’article 1er du projet de loi est tout à fait clair : la liberté de consommer et de produire avec ou sans OGM est garantie, dans le respect des principes de précaution, de prévention, d’information et de responsabilité.

Certains contestent l’expression « avec ou sans organismes génétiquement modifiés ». Les amendements adoptés par les députés sur cet article me semblent être de nature à les apaiser.

De ce libre choix découle un autre principe fondamental – la transparence – et une nécessité pratique – la coexistence entre les filières.

Sur ces différents points, le texte apporte des réponses positives.

Tout d’abord, le projet de loi crée une nouvelle instance d’évaluation, que le Sénat a nommée « Haut conseil des biotechnologies » et dont il a mieux précisé le fonctionnement et la composition. Les amendements adoptés en première lecture me semblent garantir l’indépendance et la transparence de cette instance d’expertise. Il faut évidemment lui donner les moyens matériels de mener ses travaux, ce qui sera à la fois un gage d’efficacité et d’attractivité. Il appartiendra à la représentation nationale de contrôler, lors de l’examen annuel du projet de loi de finances, que des moyens suffisants sont bien affectés à son fonctionnement.

Ensuite, le projet de loi prévoit la création d’un registre national accessible au public, indiquant notamment la nature et la localisation à l’échelle de la parcelle des cultures d’OGM. Je me félicite de cette mesure, qui existe déjà dans d’autres pays de l’Union européenne.

D’une manière générale, il est impératif de systématiser et de renforcer l’information des maires afin de leur permettre de répondre aux interrogations légitimes de leurs administrés.

Par ailleurs, la création d’un régime de responsabilité est prévue. Cette question est majeure, notamment pour protéger les agriculteurs contre les risques de contamination des filières conventionnelles ou biologiques coexistant dans les mêmes régions de production que les cultures d’OGM.

La coexistence suppose la couverture du risque économique. Il appartient à toute future filière OGM de se doter des moyens financiers, y compris assuranciels, lui permettant de couvrir la responsabilité sans faute.

Cependant, je tiens à souligner que le préjudice économique ne prend en compte ni les coûts des analyses, ni la perte éventuelle de label, ni l’impact sur l’image commerciale. Qu’en est-il également concernant les mesures de protection, dont le coût est très lourd ?

Pour conclure, je dirai que nous n’avons pas d’autre choix que de faire confiance à la science et aux chercheurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

L’utilisation des OGM ne peut plus et ne doit pas être condamnée simplement au nom de principes. Elle doit être strictement encadrée et reposer sur le principe intangible du respect de l’environnement et de la santé publique. Enfin, elle doit faire l’objet d’une évaluation scientifique, donc impartiale et incontestable.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

M. Aymeri de Montesquiou. Ces objectifs sont ceux du projet de loi. C’est pourquoi la majorité du groupe du RDSE le votera.

Applaudissements sur les travées de l ’ UC-UDF et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Avant toute chose, je me réjouis, monsieur le ministre d’État, que vous ayez pu tenir vos engagements et que, malgré la déclaration d’urgence, ce projet de loi soit soumis en deuxième lecture au Sénat.

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, monsieur le ministre de l’agriculture, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’âpreté des débats à l’Assemblée nationale et les modifications importantes qui ont été apportées au texte rendent nécessaire la poursuite du travail et de la réflexion sur ce texte.

Le cri d’alarme lancé ce week-end par la banque mondiale et le FMI concernant la crise alimentaire qui touche près de 100 millions de personnes doit nous aider à remettre en perspective notre débat.

Le prix du riz, entre autres denrées, s’est envolé de 75 % en deux mois et celui du blé a grimpé de 120 % au cours de l’année écoulée. Selon la FAO, ce sont trente-sept pays qui sont aujourd’hui menacés d’une crise alimentaire.

L’un des facteurs expliquant cette envolée des prix est l’utilisation d’une part croissante et significative des terres arables pour produire des biocarburants. Pratiquement tout le supplément de récolte mondiale de maïs entre 2004 et 2007 a servi aux États-Unis à fabriquer cette alternative au pétrole !

Selon moi, les OGM pourraient nous permettre de répondre à plusieurs des graves problèmes posés, qu’il s’agisse de: nourrir une terre de plus en plus peuplée, d’augmenter la production agricole pour satisfaire les besoins de la chimie verte, notamment en biocarburants, de faire face aux aléas climatiques ou de proposer de nouvelles solutions en matière de santé.

Cette réponse ne doit pas être vue comme la panacée et conduire à mettre fin à toute réflexion sur les structures agricoles, notamment dans les pays en voie de développement, mais elle ne doit pas être éliminée d’office.

Telle est du moins depuis plusieurs années la position majoritaire de notre groupe, qui est favorable au développement encadré des OGM.

En effet, il y va de l’indépendance et du maintien de la compétitivité de l’agriculture européenne face à la concurrence mondiale. Notre agriculture devra très rapidement faire face à des enjeux renouvelés, en particulier s’agissant du développement des rendements. Parallèlement, nous faisons peser des contraintes de plus en plus fortes sur nos agriculteurs, notamment en matière de limitation des intrants.

Ainsi le Grenelle de l’environnement vient-il d’entériner l’objectif d’une diminution par deux de l’usage des pesticides d’ici à 2012. Or on ne peut pas logiquement être opposé à la fois aux pesticides et aux OGM.

Par ailleurs, notre dépendance en matière d’approvisionnement en oléo-protéagineux rend difficilement crédible toute position hostile aux OGM. Chaque année, l’Union européenne consomme 30 millions de tonnes de tourteaux de soja pour alimenter son bétail. Or plus de la moitié des surfaces mondiales cultivées en soja le sont en soja OGM. À quoi bon interdire la culture de maïs Bt 810 si nous en autorisons massivement l’importation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Certes, les députés ont bien essayé de remédier à un tel état de fait, en introduisant dans le projet de loi un nouvel article relatif aux possibilités de développement d’un plan de relance des cultures d’oléo-protéagineux. Cependant, la mise en place d’un tel dispositif me semble vouée à l’échec, dans la mesure où nous ne disposons ni de la SAU nécessaire, c'est-à-dire la surface agricole utile, ni du climat adapté pour parvenir aux rendements attendus.

À mon sens, il est indispensable de développer notre propre filière de production d’OGM, en maîtrisant le processus de fabrication et en fixant les critères de validation pleinement adaptés à notre modèle agricole et de nature à répondre aux attentes de nos agriculteurs.

Il n’est pas normal qu’une firme multinationale détienne plus de 70 % des brevets de semences OGM et, pour parler clairement, que le terme d’« OGM » renvoie seulement à Monsanto. À l’heure actuelle, le bilan que l’on dresse des OGM ne peut se lire qu’au travers de ce seul prisme, c'est-à-dire d’un prisme faussé dès le départ.

En effet, les États-Unis ont fait le choix du principe de l’équivalence en substance : les plantes génétiquement modifiées, les PGM, comparées aux plantes non transgéniques sont équivalentes sur la seule base de leur composition et ne sont soumises à aucune réglementation spécifique. En revanche, en Europe, nous avons fait le choix d’une évaluation des OGM au cas par cas, ce qui offre des garanties autrement plus solides.

Pour conclure sur ce point, permettez-moi de reprendre à mon compte les déclarations de M. Nicolas Hulot dans l’édition du Monde datée du 17 janvier 2008 : « Le profane que je suis n’a pas d’avis tranché sur l’avenir des OGM et il se garde bien de fermer la porte aux biotechnologies. […] J’entends bien qu’il n’y a pas les OGM, mais des OGM, et qu’il est impératif de les étudier au cas par cas ».

En outre, et je me félicite de votre initiative, monsieur le ministre d’État, le 3 mars dernier, lors du conseil « Environnement » de l’Union européenne, la France a proposé de remettre à plat les procédures d’homologation des OGM dans l’Union, en prenant davantage en compte l’évolution de la méthodologie d’évaluation. Il est plus que jamais nécessaire pour l’Europe d’arriver à un consensus pour parler d’une seule voix sur les OGM.

Votre initiative, qui permettra de restaurer la crédibilité des procédures d’autorisation d’OGM, constitue une première étape pour réconcilier partisans et adversaires de ces OGM.

Toutefois, il n’est pas non plus question de donner un blanc-seing aux organismes génétiquement modifiés. Il est nécessaire d’encadrer leur développement.

Je comprends l’inquiétude de nos concitoyens : elle est légitime. En effet, en l’état actuel de nos connaissances, l’absence de preuve du risque sanitaire ou du risque environnemental s’accompagne de l’impossibilité de prouver l’absence de risque. Aussi les OGM sont-ils perçus par nos concitoyens comme une évolution irréversible, ce qui explique leur inquiétude à cet égard. Il est donc primordial de préserver la coexistence des cultures.

De ce point de vue, l’amendement que j’avais fait adopter en première lecture à l’article 3 a été conservé en substance par les députés, ce dont je me réjouis. Grâce à ce dispositif, des périmètres de protection seront assurés entre les cultures OGM, conventionnelles et biologiques.

Selon les travaux menés par l’INRA sur le sujet, « pour les filières telles que l’agriculture biologique qui revendiquent une absence totale d’OGM dans leurs productions, la coexistence à l’échelle locale est […] techniquement impossible dans la plupart des cas. »

Ainsi, s’il est un domaine que nous devons aujourd'hui favoriser, c’est celui de la recherche en biotechnologies. Actuellement, la plupart des OGM commercialisés sont destinés à résister aux herbicides et aux insectes. Ils ne concernent donc que la production agricole. Mais les chercheurs ne cessent de montrer qu’ils peuvent, par différentes méthodes, créer des plantes capables de résister à la sécheresse ou à la salinité des sols, réclamant moins d’énergie et de traitements chimiques, dotées de meilleures propriétés nutritionnelles et sanitaires ou permettant de lutter contre des maladies.

Or, ce secteur, stratégique dans les années à venir, accumule les retards, notamment à la suite des actions des commandos « anti-OGM ». Le fauchage des champs d’OGM ruine des années entières d’efforts de recherche, met en péril notre capacité d’innovation et fait le jeu des entreprises étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Notre pays, qui était à la pointe de la recherche sur les biotechnologies végétales voilà vingt ans, est aujourd’hui distancé par d’autres nations.

Les États-Unis, la Chine, l’Inde ou le Brésil investissent massivement dans ces domaines, alors que le nombre d’expérimentations n’a cessé de chuter chez nous

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

C’est bien la preuve qu’il faut donner plus d’argent à la recherche !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

En 2007, leur nombre était de treize, contre plus d’une centaine dix ans plus tôt !

À un tel rythme, nous ne maîtriserons bientôt plus le savoir-faire technique de cette innovation.

C’est l’avenir de la recherche française dans les sciences du vivant qui est en cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

C’est notre capacité d’innovation en matière médicale mais aussi la compétitivité de nos secteurs industriel et agricole qui sont menacées.

Je me félicite donc de la décision du Gouvernement de tripler le budget consacré aux biotechnologies sur trois ans et de l’initiative des députés d’instaurer un cadre et des objectifs pour la recherche publique en biotechnologies à l’article 11 ter du projet de loi.

Il ne faut pas l’oublier, dans un monde où les OGM continuent à proliférer – la surface qu’ils occupent pourrait doubler d’ici à 2015 –, leur dangerosité ou leur innocuité ne peut être établie que par des recherches impartiales.

Je souhaite également qu’une véritable recherche européenne sur les biotechnologies soit mise en place. En coordonnant les équipes de chercheurs et en fixant des objectifs au niveau européen, nous pourrons rattraper notre retard et contrecarrer l’hégémonie américaine dans ce domaine.

Je souhaite en venir maintenant plus précisément au contenu du projet de loi. Je tenais à souligner les avancées importantes réalisées par les députés, notamment s’agissant de la protection des parcs nationaux et des parcs naturels régionaux. D’ailleurs, j’avais moi-même déposé un amendement allant en ce sens en première lecture, mais il avait été refusé par M. le rapporteur et par le Gouvernement pour cause d’« incompatibilité » avec la réglementation européenne. Je me félicite donc de l’évolution rapide de la réglementation et du Gouvernement sur cette question.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Néanmoins, j’ai déposé deux amendements ayant pour objet de faciliter l’interdiction des cultures OGM sur le territoire de ces parcs.

Le premier vise à supprimer le critère de l’unanimité des agriculteurs concernés pour le remplacer par une majorité qualifiée.

Le second tend à faire disparaître la disposition relative à la charte des parcs. En effet, exiger que ces chartes prévoient a priori l’exclusion des OGM de leur territoire me semble discutable. À mon sens, une telle adaptation doit au contraire faire suite au vote des agriculteurs.

De même, je me réjouis des avancées réalisées par les députés pour la défense des terroirs et des productions sous appellation. Là encore, j’avais déposé un amendement identique en première lecture, qui avait été refusé par le Gouvernement…

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

L’examen à l’Assemblée nationale aura donc permis de faire évoluer le Gouvernement également sur cette question !

Le nouvel article 3 B permettra de rassurer pleinement les consommateurs quant à la qualité de ces productions, la qualité étant souvent synonyme d’absence d’OGM pour nos concitoyens. L’équilibre économique des AOC sera ainsi préservé.

Enfin, monsieur le ministre d’État, j’insiste sur le fait que nous ne pouvons faire l’économie à très court terme d’une campagne de communication de grande ampleur, afin d’informer correctement les consommateurs sur les OGM.

M. le ministre d’État acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Le discrédit patent dont souffrent les plantes génétiquement modifiées, encore renforcé par le récent documentaire intitulé Le monde selon Monsanto, doit être combattu par des données objectives et par le rappel des bénéfices des OGM.

Dans cette intervention, je me suis concentré sur les avantages attendus pour l’agriculture, mais il est important de rappeler que les OGM utilisés dans le secteur de la santé permettent déjà de sauver des vies.

Applaudissements sur les travées de l ’ UC-UDF et de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les OGM sont déjà une « vieille histoire ».

Depuis une dizaine d’années, de rapports en textes législatifs, de débats en colloques, on s’enlise sur cette question sans parvenir à trouver un consensus. Il arrive même parfois que l’on s’entre-déchire… Au-delà des déclarations et des invectives, les Français ne comprennent plus et doutent aujourd'hui plus encore qu’hier.

Dans ce contexte de totale confusion, je souhaite exprimer mon point de vue, qui est d’ailleurs largement partagé par les membres de mon groupe politique.

Tout d’abord, quelle est la situation actuelle en matière d’organismes génétiquement modifiés ? Que savons-nous de ces OGM ? À cet égard, permettez-moi de rappeler quelques éléments.

S’agissant de la définition, l’OGM se caractérise par le déplacement, et parfois même par l’introduction, d’un gène sur un chromosome. À travers ces deux opérations, il s’agit bien de définir une fonction précise. C’est pourquoi, dans un texte fondateur comme celui que nous examinons actuellement, il est nécessaire d’aborder non seulement la transposition de la directive, mais également son environnement. Je pense notamment à la question fondamentale de la brevetabilité.

M. le ministre d’État acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Selon nous, seul le triptyque « organisme / gène / fonction » peut être brevetable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Or cela ne se retrouve pas dans le projet de loi.

Certaines de ces fonctions sont reconnues comme positives pour l’homme et pour l’intérêt général. Aussi, et puisque mon groupe politique soutient tout ce qui va dans le sens du progrès médical, permettez-moi de rappeler symboliquement que la pénicilline est un produit OGM depuis plus de dix ans et que des OGM sont utilisés pour traiter la mucoviscidose ! Je pourrais encore mentionner d’autres exemples.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

C’est bien par la connaissance de ces produits que la recherche scientifique a pu identifier les fonctions utiles à l’homme. Et je suis convaincu que l’on soignera demain d’autres maladies grâce à de telles techniques.

C’est pour cette raison, mais également pour éviter d’éventuels débordements, que la recherche en la matière est très importante.

D’autres utilisations quotidiennes des OGM sont aujourd'hui entrées dans les mœurs. Ainsi, un produit recombinant à base d’OGM a remplacé le blanc d’œuf pour le collage du vin. De même, depuis la crise de la vache folle et l’interdiction de consommation des abats de bovins décidée en 1998, l’enzyme issue d’un suc prélevé dans l’estomac du veau qui servait autrefois au caillage du lait a été remplacée par une chymosine recombinante produite à partir d’une plante génétiquement modifiée.

Outre ces utilisations quotidiennes, les OGM ont également beaucoup d’autres applications dans le domaine alimentaire, et ce toujours dans l’intérêt général.

Cela dit, que se passe-t-il quand l’homme ingère un aliment ayant connu une modification génétique ? C’est une question fondamentale dans sa simplicité et qui me fait revenir à l’origine, au chromosome. La particularité de notre système digestif réside justement dans sa capacité de filtrage et d’éclatement du chromosome et des gènes qui s’y sont accrochés pour reconstituer des acides animés ou des groupements d’acides animés, seuls en capacité de traverser la paroi et d’être véhiculés par le sang pour venir alimenter et nourrir nos propres cellules.

Qu’il y ait eu déplacement de gènes sur le chromosome ou pas, cette fonction continue à être assurée de la même manière et, avec elle, la recombinaison d’acides animés.

En outre, et cela fait également partie des éléments de réflexion de base, le premier constat d’OGM ou de PGM se fait chaque fois autour d’« éclairs », où des milliers de bactéries mutent naturellement, qu’il s’agisse d’un déplacement ou d’une adjonction de gènes. Cela explique peut-être également que nous mutions les uns et les autres depuis des millénaires sans le savoir.

Le scientifique étudie tout cela, le transpose, le fige. Mais qui contrôle ce dernier, lui passe commande ? Surtout, combien comptons de chercheurs publics travaillant sur cette question ? Quand on interpelle l’INRA, il semble qu’une seule mission soit actuellement confiée à un chercheur en matière de PGM.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Dans ce domaine, monsieur le ministre d’État, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, il y a incontestablement un travail à accomplir – nous le réclamons avec force – pour y voir plus clair.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Voilà autant de questions qui se posent toujours à nous et sur lesquelles notre société a bien besoin de réponses. En effet, c’est ce travail qui doit apporter les éclairages nécessaires, afin de faciliter les réponses aux interrogations de notre société sur ce sujet.

Outre ces éléments qui pourraient apparaître comme positifs pour l’homme, il existe aussi des éléments moins connus ou même des approches à risque qui nous imposent une immense prudence. Ainsi, le BT, dont nous avons déjà parlé, est l’objet d’interrogations fortes ; sans doute convient-il de le manier avec plus de modération, et en tout cas de poursuivre la recherche.

Pour les PGM, deux questions subsistent. Après le Grenelle de l’environnement, tout le monde était convaincu qu’il fallait garantir le choix de cultures avec ou sans OGM, et surtout protéger les agriculteurs qui souhaitaient produire sans OGM.

Qu’en est-il dans le texte qui nous est proposé aujourd’hui ? L’Assemblée nationale a adopté un amendement visant à protéger clairement les cultures non OGM, en phase avec vos propres conclusions sur le Grenelle de l’environnement, monsieur le ministre d’État, et c’est heureux !

Comment imaginer dans un tel contexte la culture des PGM en pleine nature sans un encadrement, sans un protocole de culture, de distance, le tout dans la plus grande transparence, avec un suivi fondé sur le principe des commissions locales d’information ? Il faut aller jusqu’au bout de l’information et arrêter de fonctionner caché, comme cela a été le cas jusqu’à maintenant !

Je ne peux passer sous silence le fait que nous affilions l’agriculteur à une firme : une fois qu’il aura enclenché le processus, il n’y aura pas de retour possible.

Le projet de loi porte sur les OGM, et pas uniquement sur les PGM.

Voilà quelques années, Jean Bizet et moi-même avons pu observer aux États-Unis le transfert du gène laitier bovin sur le chromosome d’une truie. Les femelles auxquelles celle-ci a donné naissance produisent trois fois plus de lait qu’une truie non OGM.

Cet exemple illustre à la fois la performance scientifique, qui est assez exceptionnelle, et la porte ouverte à tout, et surtout au pire, que l’on voit se dessiner. En effet, demain, qui maîtrisera les abus ? Comment l’homme, qui se trouve être l’un des maillons du règne animal, va-t-il pouvoir maîtriser cette avancée ? Rien dans le projet de loi n’évoque ce sujet, pourtant essentiel, mes chers collègues.

Vous me direz que les progrès scientifiques suscitent toujours des retours en arrière, des inquiétudes ; Pasteur lui-même a failli se faire lyncher. Mais la situation n’était pas la même.

Si nous ne mettons pas des barrières fortes, l’humanité peut basculer : l’argent et le business aux commandes – aujourd’hui Monsanto, demain une autre firme –, la dérive éthique, la pollution environnementale… Monsieur le ministre d’État, vous avez vous-même évoqué les risques de contamination ; ceux-ci doivent nous obliger à constituer des barrières, des protections.

Le rôle du législateur devant toute avancée scientifique est de s’assurer que cette dernière est bien maîtrisée par l’homme, et au service de l’homme.

Faisons tout pour cela ! Que l’opérateur public puisse rester maître de la commande, afin d’éviter que, demain, une poignée d’individus ne s’accapare le monde.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Évitons de modifier de manière irréversible notre environnement.

En matière d’assurance, qu’est devenu le fonds d’indemnisation financé pour toute la filière ?

La brevetabilité ne peut concerner que le triptyque « organisme-gène-fonction » ; sinon, nous ouvrirons la porte à l’appropriation du vivant. Je sais que vous ne le souhaitez pas ; mais pourquoi, dans ces conditions, n’avoir rien prévu dans ce texte pour le protéger, l’encadrer ?

Je ne peux passer sous silence les importations massives, sans contraintes particulières. Une telle situation semble paradoxale eu égard au rapport que vous nous présentez et à la production de PGM sur notre territoire. Que comptez-vous faire ?

Nos amendements portent sur tous les sujets que je viens d’évoquer, dans le respect des conclusions du rapport que nous avions voté ici-même. Nos propositions sont le fruit de ce travail conjoint ; il n’y a rien de nouveau, seulement ce que nous considérons comme une nécessaire prudence.

Je tiens à marquer ici la volonté de mon groupe politique, qui ne freine en rien toute avancée et tout progrès ; mais, dans le même temps, mettons en place une série de dispositifs pour éviter les dérives !

Si les amendements essentiels que nous défendons n’étaient pas votés ou n’étaient pas satisfaits par le projet de loi, nous serions conduits à ne pas voter ce dernier.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre d'État

Lesquels ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Nous vous les présenterons le moment venu, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État.

Pour conclure, la surprise est venue non pas du retour du texte de l’Assemblée nationale, mais de la position du groupe majoritaire au Sénat qui, après quelques hésitations, a apparemment décidé d’adopter un texte quasi conforme, sauf sur un article, et non le moindre, celui par qui est arrivé le « tremblement » : l’article 1er !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Nous applaudissons au choix de ne pas toucher à l’amendement, adopté par l’Assemblée nationale, permettant de donner la priorité sur le territoire aux cultures non OGM.

Monsieur le rapporteur, je connais votre intégrité sur le sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

J’espère que le dépôt de votre amendement ne s’apparente pas à la manipulation d’un gène extérieur en vue de provoquer un retour à l’Assemblée nationale du seul article 1er, et de faciliter la suppression des dispositions introduites par l’amendement n° 252

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

C’est ce que vous feriez si vous étiez à notre place ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

…en suscitant une nouvelle lecture. On peut s’interroger.

Compte tenu des remarques des uns et des autres, je n’ose imaginer ce qui apparaîtrait comme une hypocrisie.

Ici, nous sommes entre nous, et nous pouvons nous entretenir discrètement ; je suis convaincu que vous me rassurerez en me répondant tout à l’heure sur le sujet !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – Exclamations sur les travées de l’UMP.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Texier

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous abordons la deuxième lecture du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés.

Sur ce sujet complexe, nous sommes nombreux, en particulier sur les travées du groupe UMP, à plaider depuis longtemps pour plus de débat, plus de transparence et plus de connaissance.

Telle est, en effet, la logique que nous avons toujours défendue sur les OGM et à laquelle nous entendons nous tenir, au-delà de la polémique et de la confusion qui dépassent parfois ce que devrait être un débat raisonné et raisonnable, qu’il ait lieu dans notre enceinte ou à l’extérieur.

Permettez-moi de prendre le temps de détailler notre position, car c’est elle qui sous-tend le texte tel qu’il nous est soumis aujourd’hui, après une lecture à l’Assemblée nationale, et tel que nous allons le voter.

Notre position consiste en l’affirmation de trois obligations : transposer en droit français les textes européens, respecter les conclusions du Grenelle de l’environnement et appliquer un certain nombre de principes.

Quant à ces obligations, elles se traduisent dans les dispositions législatives que nous soutenons.

Ainsi devons-nous garder à l’esprit le fait qu’il s’agit aujourd’hui de transposer des directives européennes dans notre droit interne. Notre retard de transposition est conséquent. Nous devons donc d’abord mettre notre législation en conformité avec nos engagements européens.

Notre retard de transposition a aussi des conséquences financières qu’il n’est pas inutile de rappeler : nous sommes sous la menace de sanctions de la part de la Commission européenne, sanctions qui s’élèvent à plusieurs dizaines de millions d’euros.

Transposer ces directives est ainsi devenu un impératif, et cette transposition contribue à doter notre pays d’une législation adaptée pour encadrer l’utilisation des OGM.

Le débat au niveau européen n’en est pas pour autant clos ; d’autres pays connaissent les mêmes interrogations que nous, et il n’est pas impensable que nous puissions, ensemble, à l’avenir, améliorer les dispositifs en place.

C’est d’ailleurs pourquoi, au dernier Conseil européen, le gouvernement français a demandé la réévaluation des procédures d’expertise européenne en matière d’autorisation européenne des OGM.

Ensuite, le texte qui nous est soumis décline très exactement ce qui a été arbitré au Grenelle de l’environnement, à savoir un cadre rigoureux et transparent pour les OGM et les biotechnologies, la création d’une haute autorité des biotechnologies et le renforcement de la recherche. Sur ce dernier point, nous saluons l’annonce du Gouvernement de consacrer 45 millions d’euros à la recherche sur les biotechnologies végétales. L’amendement adopté par nos collègues députés visant à préciser les champs de recherche prioritaires dans le cadre des programmes de l’Agence nationale de la recherche est également intéressant.

Enfin, le présent texte affirme des principes fondamentaux, voire constitutionnels, notamment les principes de précaution, de responsabilité, de transparence et d’information. Nos collègues députés ont insisté sur le principe de participation, et ils ont eu raison.

Considérons maintenant la façon dont ces obligations générales se traduisent dans les dispositions législatives qui nous sont proposées et que nous soutenons.

Il est créé une nouvelle instance d’évaluation, le Haut conseil des biotechnologies, qui intègre, pour plus de clarté et d’efficacité, les instances existantes et répond aux exigences d’une décision scientifique et démocratique.

Ce Haut conseil, doté de deux comités, permettra l’exercice de l’analyse scientifique, mais aussi la totale expression de la société civile, conformément à ce que souhaitaient nombre de nos concitoyens.

Sur ce sujet, le groupe UMP partage les suggestions des députés, notamment en ce qui concerne la saisine de ce Haut conseil, le choix de son président, la procédure accélérée d’émission de ses avis à la demande du ministre de la santé et ses modalités de fonctionnement.

L’expérimentation et la mise en culture des OGM sont ainsi strictement encadrées dans la loi : demande d’autorisation préalable, évaluation indépendante des risques, déclaration des cultures, transparence de leur situation, mise en œuvre de bonnes pratiques, c’est-à-dire de mesures techniques permettant la coexistence des différents types de cultures.

S’agissant de l’évaluation des OGM, en particulier, je tiens ici à souligner l’utilité des amendements suggérés par notre collègue député Christian Jacob.

De même, nous confirmons la proposition des députés de soumettre toutes les conditions techniques relatives à la coexistence des cultures, et non plus seulement les règles de distance, à une révision périodique sur la base de travaux scientifiques.

Nos collègues députés ont également souhaité avancer sur la question de la relation entre les productions OGM et les signes de qualité. C’est un débat difficile et technique que nous avons eu ici dès l’examen du premier projet de loi sur les OGM, en 2006, et dont vous vous êtes d’ailleurs largement inspiré, monsieur le ministre d’État. Nous acceptons la solution proposée par les députés, à savoir que l’INAO et les organismes de gestion des appellations puissent proposer des mesures adéquates.

Dans la même perspective de protection, non plus des AOC mais des zones naturelles, les députés ont aussi pris l’initiative de donner la possibilité aux acteurs gestionnaires des parcs la possibilité d’interdire dans leur cahier des charges la culture des OGM.

Enfin, les députés ont légiféré sur l’étiquetage des semences ; c’était effectivement une question en suspens. Le nouvel article 15 y répond.

Ces différentes dispositions garantissent le respect de la liberté du choix de consommer ou de produire avec ou sans OGM, seul moyen de préserver les convictions individuelles. Cette liberté de choix est elle-même garantie par la transparence, assurée à plusieurs niveaux, qu’il s’agisse des informations contenues dans les dossiers d’agrément, de l’autorisation ou de la déclaration des parcelles cultivées et de la tenue d’un registre public de ces parcelles.

S’agissant de la transparence, nous avions admis en première lecture le principe de la tenue d’un registre national indiquant la localisation à l’échelle de la parcelle. Les députés ont conforté ce niveau et ont précisé utilement que les préfectures assureraient la publicité de ce registre.

C’est en contrepartie de cette transparence que doit être apprécié le régime de sanction à l’encontre des destructions de plants OGM. Sur un sujet aussi sensible dans l’esprit de nos concitoyens, chacun doit faire preuve de responsabilités !

Ainsi, parce que ce texte fixe des principes stricts d’autorisation et de surveillance des OGM, il est à même de rassurer nos concitoyens. Il nous donne les moyens de déceler en amont tout risque susceptible d’affecter la santé ou l’environnement.

Pour le cas où un problème surviendrait malgré tout, un principe de responsabilité sans faute de l’exploitant cultivant des OGM est instauré. Ce régime implique une indemnisation de l’agriculteur qui aurait vu sa récolte affectée par des cultures d’OGM ; les apiculteurs sont bien entendu concernés, comme nous en avions disposé en première lecture dans une rédaction améliorée par l’Assemblée nationale.

De plus, ce régime d’indemnisation a été complété par les députés par une autre forme de réparation du préjudice, qui consiste en un échange de produit. Nous avions discuté de cette possibilité en première lecture ; nous n’y étions pas opposés, mais n’avions pas arrêté sa formulation juridique. C’est maintenant chose faite, et nous en sommes d’accord.

Enfin, dans un souci de rassurer nos concitoyens, nos collègues de l’Assemblée nationale ont considéré, à l’article 1er, devoir aller plus loin que ce que nous avions arrêté en première lecture, s’agissant du respect des filières sans OGM. Cette initiative a recueilli toute notre attention. Aujourd’hui, nous nous accordons pour dire qu’elle doit être intégrée dans le cadre communautaire ; M. le rapporteur a déposé un amendement allant dans ce sens, que nous voterons.

Pour conclure, je souhaiterais au nom du groupe de l’UMP, rendre un hommage appuyé à Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, et à Jean Bizet, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Texier

M. Yannick Texier. Ils ont effectué un travail remarquable et constructif afin d’arriver au texte équilibré qui nous est proposé aujourd’hui.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées de l’UC-UDF.

M. Guy Fischer remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Daniel Raoul. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

M. Daniel Raoul. Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, deux ans après l’avoir fait une première fois, nous allons à nouveau évoquer dans cet hémicycle la question des OGM. Les intervenants précédents ont d’ailleurs rappelé les différentes étapes du travail législatif – achevé ou pas – sur ce sujet et ont pu évoquer à ce titre les tribulations, sinon d’un Chinois en Chine, du moins d’une loi au Parlement !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

En mars 2006, lors de la discussion générale sur le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés, j’avais débuté mon intervention en précisant que la « transgénèse, comme toute technologie, qu’elle soit nouvelle ou non, et comme tout outil, peut être la meilleure ou la pire des choses ». Malheureusement, près de deux ans plus tard, je constate que ce sujet déchaîne autant les passions, à la hauteur de la méconnaissance régnant chez les uns et chez les autres, et que la raison est toujours absente.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Il suffit de lire la presse : interventions dogmatiques et positions manichéennes sont toujours de mise, certains en faisant même leur fonds de commerce !

Si nous ne voulons pas diaboliser cette avancée scientifique et stratégique en rangeant sous un même vocable toutes les applications possibles, nous devons faire un effort important de pédagogie. La répétition étant un outil de base de la pédagogie, je vais rappeler quelques données.

J’ai déjà eu l’occasion de dire devant le Sénat que, si nous n’y prenions garde, les OGM susciteraient dans les esprits la même confusion que celle qui prévaut toujours en matière de nucléaire, certains faisant l’amalgame entre les armes nucléaires et les centrales de production d’énergie. Eh bien, c’est arrivé !

Personne ne met en doute les progrès sanitaires que représentent les OGM pour certains vaccins. À titre d’exemple, je citerai le vaccin contre le virus H5N1, inoculé dans les élevages avicoles, et le vaccin contre la rage, qui a permis de stopper la progression de cette maladie vers le centre de la France. De façon plus quotidienne, comme l’a rappelé Jean-Marc Pastor, la chymozine est utilisée pour remplacer la présure prélevée dans la caillette du veau. Dans ces cas, il s’agit bien d’OGM, et personne ne les rejette !

Je n’oublie pas non plus toutes les applications possibles de la thérapie génique. Il est vrai que, depuis les épisodes « médiatico-scientifiques » de l’amiante ou du nuage de Tchernobyl, innovation scientifique et décisions politiques ne font pas bon ménage dans l’esprit des Français. Pourtant, j’espérais que le contexte qui est le nôtre, celui de l’après-Grenelle de l’environnement, favoriserait les prises de conscience et des positions moins radicales, plus éclairées, puisque chacun se plaît à souligner que ce Grenelle a été l’occasion d’un vrai dialogue.

Là est certainement le cœur du sujet : créer la confiance par la participation dans la transparence et, évidemment, la responsabilité, qui est son corollaire. À cette fin, il est essentiel de mettre en place les commissions locales d’information, ou CLI, comme ce fut fait pour les questions touchant à la sûreté nucléaire ou aux installations classées de type Seveso II.

Ces commissions devraient se prononcer sur les protocoles d’essai avant tout semis en plein champ, bien entendu après les essais en milieu confiné. Associant les citoyens, elles garantiraient plus de transparence et permettraient aux maires de faire participer la population de leur commune aux phases d’information, de décision et, surtout, d’évaluation.

Mais le Gouvernement refuse de les intégrer dans le projet de loi. Comment peut-il alors parler de transparence et de responsabilité ?

Mes chers collègues, que de confusion dans ce texte après la cacophonie des diverses positions exprimées par les membres du Gouvernement !

Je pense avant tout à la confusion qui existe entre les OGM et les PGM.

Monsieur le rapporteur, vous connaissez mon attachement à cette distinction.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Soyons clairs, 80 % du texte qui nous est présenté ne concernent en réalité que la culture de PGM et, pour être plus précis, celle du maïs Monsanto 810. S’il s’était agi d’un texte de portée générale sur les OGM, comment ne pas établir de lien avec la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique, en particulier pour le règne animal ?

Que d’hypocrisie aussi, et je le dis calmement ! En effet, comment justifier, monsieur le ministre de l’agriculture, que l’on importe 4, 5 millions de tonnes de soja constituées à près de 80 % par des OGM et que l’on interdise simultanément la culture d’une PGM par nos agriculteurs, en particulier ceux du Sud-Ouest ? Je ne vois pas comment le Gouvernement peut sortir de cette contradiction. Pour utiliser une image sportive, je dirais que, avec un tel grand écart, vous risquez un claquage des adducteurs !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

En effet, le risque de dissémination diffuse existe autant dans le transport ou dans le stockage que dans la production elle-même !

Quelle hypocrisie également d’actionner la clause de sauvegarde alors que vous connaissez pertinemment la réponse de la Commission ! Vous l’avez certes utilisée comme outil de communication, mais cela ne fait pas progresser la question.

La recherche sur les biotechnologies est un impératif stratégique pour l’agriculture, non seulement en France, mais aussi en Europe et dans le reste du monde. L’actualité concernant le déficit de céréales à l’échelle mondiale ne donne que plus d’acuité à ce sujet.

Comment justifier qu’une PGM faisant l’objet d’essais en plein champ ait été détruite alors qu’il s’agissait d’une plante résistant à la sécheresse ? Nous sommes pour le droit de produire, avec ou sans OGM. Cela exige donc un certain nombre de mesures respectueuses des critères du développement durable de la Charte de l’environnement, chère à Mme la secrétaire d’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Premièrement, un effort intensifié de recherche dans le domaine des biotechnologies, particulièrement dans le domaine de la génomique végétale, devrait être conduit afin que nous disposions d’une expertise indépendante et que nous ne soyons pas assujettis aux prétendues expertises des entreprises qui soumettent leurs dossiers à une autorisation.

Deuxièmement, il faudrait que les essais en plein champ soient assurés dans une transparence complète avant que l’on ne passe à la culture en plein champ, ce qui suppose non seulement une information, une concertation, mais aussi une évaluation sur les avantages et les risques de cette PGM.

Troisièmement, chacun devrait avoir la liberté de choisir consciemment et en toute responsabilité de produire et de consommer avec ou sans OGM.

Quatrièmement, enfin, après une évaluation des avantages par rapport aux risques, il faudrait déterminer une responsabilité.

Je me tournerai maintenant vers les membres du Gouvernement. Sachez que j’ai du mal à vous accorder ma confiance à propos de ce projet de loi alors que vous avez enterré le texte sur les certificats d’obtention végétale ! Celui-ci permettait en particulier l’utilisation des semences fermières, aspect qui est complètement absent du présent projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je vous fais confiance, mon cher collègue ! (Sourires.)

Le sujet de ce texte est pourtant un enjeu stratégique. Une information, une véritable pédagogie auraient donc été nécessaires afin de ne pas se retrouver dans une dépendance supplémentaire par rapport aux entreprises américaines ou aux entreprises asiatiques.

Je donnerai simplement un exemple. Vous ne méconnaissez pas les efforts qui sont faits à la fois par l’Inde et par la Chine dans le domaine des biotechnologies. En une seule année, ces pays ont recréé ex nihilo l’équivalent de notre INSERM. C’est donc qu’ils ont bien mesuré les enjeux stratégiques que représentaient les recherches dans ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Pourquoi ne pas se donner les moyens d’échapper à une dépendance qui pointe à l’horizon, qu’elle soit vis-à-vis des États-Unis ou du bloc asiatique ? Le gouvernement Messmer avait pris certaines mesures courageuses pour assurer notre indépendance en matière énergétique. Pourquoi ne pas avoir ce même courage pour garantir l’indépendance dans le domaine des biotechnologies et des applications agroalimentaires ?

Comment le Gouvernement compte-t-il corriger tout cela et donner à la France la place qu’elle mérite dans la compétition agroalimentaire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

M. le ministre d’État avait évoqué en première lecture l’ouverture de crédits. Mais ces derniers, ainsi que j’ai pu le vérifier auprès des chercheurs de l’INRA ou de l’INSERM, n’ont pas été consommés, et ce en raison des pressions exercées sur les chercheurs par leur direction : pressions non seulement morales, mais aussi quelquefois physiques, avec l’interdiction qui leur était faite d’aborder le problème des PGM ou des OGM. Cette situation est grave !

Il ne suffit pas de donner des orientations fortes à Mme Marion Guillou, présidente, directrice générale de l’INRA, il faut également offrir à cette dernière des moyens matériels et humains, et protéger les chercheurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Si vous voulez que les crédits soient effectivement utilisés dans ce domaine, il va falloir ouvrir complètement le dossier de la recherche sur la génomique végétale. Cela suppose que le Gouvernement soit très directif à l’égard des directions des établissements publics à caractère scientifique et technologique, instituts d’ailleurs remarquables, et en particulier que les chercheurs qui réalisent des tests dans ces domaines soient reconnus et non pas considérés comme des pestiférés par leurs collègues, y compris au sein de leur laboratoire. Il faut donc qu’ils puissent disposer, via l’ANR, des moyens de continuer sereinement leurs recherches.

Au lieu d’un texte d’opportunité, il aurait fallu un texte de fond pour examiner le triptyque « plant-gène-fonction » évoqué par Jean-Marc Pastor et pour se donner les moyens d’interdire la brevetabilité du vivant.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Breveter le gène, donc le couple « plant-gène », ce serait – j’utilise des termes de physique – comme breveter la structure du fer ou du silicium avec leurs propriétés alors que ces éléments appartiennent au patrimoine mondial.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

En revanche, les applications, autrement dit les fonctions, sont, quant à elles, brevetables, contrairement à la plante et au gène.

Il convient de clarifier les débats sur les enjeux, car je ne suis pas sûr que notre assemblée n’aura pas, un jour, à choisir entre, d’une part, la pollution par les pesticides et, d’autre part, des PGM, et à comparer les avantages et les risques des uns et des autres.

En tout cas, quand on voit le résultat sur les nappes phréatiques de l’utilisation des pesticides, on peut se demander s’il ne vaudrait pas mieux cultiver une PGM qui « s’auto-immunise » contre les insectes, et, dès lors, éviter le recours aux produits phytosanitaires, plutôt que de continuer à polluer les nappes. C’est bien là un enjeu pour notre agriculture.

Il faut encore mettre en cohérence les pratiques de culture et d’importation, comme je l’ai déjà signalé. J’espère que le Gouvernement me répondra sur ce point, car l’enjeu concerne également toute la viande blanche.

Il faut, par ailleurs, développer la recherche indépendante pour réaliser une véritable évaluation afin de produire plus et mieux.

Enfin, la position adoptée aujourd'hui par la majorité, en particulier à la suite du rapport de M. Jean Bizet dont je ne mets en cause ni les capacités intellectuelles ni l’honnêteté (Merci ! sur les travées de l’UMP.), nous place dans une situation assez étrange : alors que nous avions besoin d’une loi fondatrice sur les biotechnologies, qui sont un enjeu stratégique mondial, le seul amendement proposé par M. le rapporteur a simplement pour objet d’annihiler l’effet de l’amendement n° 252 adopté par l’Assemblée nationale

M. Gérard Le Cam applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

M. Daniel Raoul. Vous comprendrez donc que nous ne puissions cautionner, ni sur le fond ni sur la forme, le texte soumis aujourd'hui à notre examen.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je suis heureuse de pouvoir m’exprimer devant vous cet après-midi, et je tiens à remercier le groupe UMP qui m’a permis d’intervenir sur ce dossier si sensible.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Nous ne disposons pas, aujourd’hui, d’un recul suffisant pour évaluer efficacement l’incidence des organismes génétiquement modifiés sur l’environnement.

La recherche doit être poursuivie, et ce intensément. Cependant, l’effet de la dissémination des OGM sur l’équilibre des écosystèmes ou des agrosystèmes n’est pas encore suffisamment connu.

Il convient donc d’appliquer fortement le principe de précaution pour tout ce qui concerne la dissémination – on peut également parler de « contamination » – des OGM dans l’environnement.

C’est la conviction que je porte et que je souhaite partager avec vous aujourd’hui, même si j’ai conscience que je n’interviens pas forcément au moment le plus opportun de la navette parlementaire. Le calendrier électoral en a décidé ainsi.

Ce n’est pas que le principe de précaution soit absent du projet de loi. Il l’inspire – on ne peut pas en douter –, explicitement même. En témoignent, par exemple, ces alinéas de l’article 3 ajoutés par les députés, qui protègent les zones de productions agricoles de qualité sans OGM et sur lesquels, je l’espère, nous ne reviendrons pas ou peu.

Mais va-t-on assez loin ? Je suis convaincue que non. C’est pourquoi j’interviens aujourd’hui devant vous. J’ai déposé sept ou huit amendements, qui, certes, pour la plupart d’entre eux, reprennent des idées déjà débattues au cours de la première lecture, sous l’impulsion, notamment, de notre collègue Jean-François Le Grand.

En tout état de cause, ces amendements sont véritablement au cœur des enjeux de la préservation du vivant sur le long terme.

Il s’agit pour moi de faire simplement entendre un point de vue différent sur une question qui engendre une sensibilité extrême parmi nos concitoyens, parce qu’elle se situe à la convergence entre plusieurs interrogations fondamentales pour l’avenir de notre société : le rapport à la science, le choix d’un modèle agricole et alimentaire, le rôle des multinationales, l’information des citoyens-consommateurs, la prise de décision en matière de risques.

Mes amendements portent sur plusieurs thèmes.

Le premier thème est la transparence complète des travaux du Haut conseil des biotechnologies, par la proposition de publier tous ses travaux et de défendre la libre expression de ses membres. Je sais que des avancées sur ce sujet ont été obtenues au cours de la navette, mais il me semble possible d’aller encore plus loin.

Le deuxième thème est le rééquilibrage des pouvoirs entre les deux collèges formant le Haut conseil, pour une meilleure application du principe de l’interdisciplinarité et une meilleure représentation de la société civile. Là encore, des concessions ont été obtenues, mais il me semble que l’on peut faire encore mieux.

Le troisième thème est l’introduction d’un seuil de détection des OGM plus bas que le seuil d’étiquetage obligatoire prévu par les textes communautaires, soit actuellement 0, 9 %. Il permet de définir un plafond plus restrictif pour la présence d’OGM dans d’autres cultures ou dans l’environnement, à proximité d’un champ d’OGM.

En limitant plus strictement les seuils de contamination, il sera possible, chers collègues, de mieux maîtriser, sur le long terme, l’effet de la diffusion des OGM dans l’environnement.

C’est là un point central : les recherches scientifiques sur l’incidence de la contamination sont peu développées. Nous ne disposons pratiquement d’aucun modèle concernant la contamination par les OGM mis en culture dans un champ.

Protéger des cultures et les espaces naturels réellement exempts d’OGM est vital pour notre écosystème à long terme.

Par ailleurs, il est un autre thème sur lequel j’ai déposé des amendements : en application du principe pollueur-payeur, le régime de responsabilité en cas de contamination doit mieux associer les producteurs de semences à la prise en charge du coût du préjudice économique et environnemental : il nous faut aussi, sur ce sujet, inverser la charge de la preuve.

Le dernier thème que je développerai tient à l’obligation d’informer le grand public de l’utilisation d’OGM dans l’alimentation des animaux qu’il consomme.

Comme vous le savez, la réglementation européenne dispense d’étiquetage les produits alimentaires issus d’animaux ayant consommé des organismes génétiquement modifiés. Pourtant, l’alimentation animale constitue le principal débouché des organismes génétiquement modifiés en Europe.

La loi peut corriger cette « absence d’obligation » européenne. Je suis convaincue, en effet, que le respect des directives et des règlements communautaires n’interdit pas des marges de manœuvre à l’échelon national, pour garantir réellement la liberté de pouvoir cultiver et consommer sans OGM.

Prendre des mesures de transposition des directives OGM de 2001 et de 1998 ne signifie en aucune manière signer un chèque en blanc en faveur des organismes génétiquement modifiés.

Au contraire, en l’absence de transposition, la culture des PGM autorisés s’est faite jusqu’à présent dans des conditions d’information du public insuffisantes, sans que soient prévues des garanties sérieuses pour les cultures traditionnelles et l’environnement voisins.

Néanmoins, on peut transposer a minima ou, au contraire, mettre à profit la subsidiarité pour aller le plus loin possible dans l’affirmation des principes de précaution, de prévention, de transparence, de responsabilité et, surtout, chers collègues, de réversibilité.

Ainsi, par exemple, l’article 26 bis de la directive 2001/18/CE prévoit que les États membres peuvent prendre les mesures nécessaires pour éviter la présence accidentelle d’OGM dans d’autres produits. Le principe de subsidiarité est donc la règle, et le droit européen accorde aux États membres toute latitude pour éviter la présence fortuite d’organismes génétiquement modifiés dans d’autres produits.

Cependant, comment évaluer ce seuil de présence accidentelle ? Le seuil de 0, 9 % n’est qu’un seuil d’étiquetage et d’information, fixé à un moment donné par la négociation.

En cas de préjudice lié à une contamination accidentelle, la question du seuil de détection reste posée. Je vous proposerai, chers collègues, de refuser une sorte de droit à contaminer à hauteur d’un certain pourcentage et d’appliquer un seuil que les techniques nous permettent de mesurer, soit celui de 0, 1 %. Adopter le seuil de 0, 1 % comme seuil de détection me semble donc être un choix stratégique.

D’autres États membres – l’Autriche, l’Allemagne, l’Italie, la Roumanie – ont déjà montré qu’il était possible d’instaurer un seuil de détection différent du seuil d’étiquetage. S’ils n’ont pas la bénédiction explicite de la Commission et de la Cour de justice des Communautés européennes, la CJCE, on relèvera au moins l’absence de poursuite à ce titre.

Chers collègues, si la CJCE envisage de condamner la France, ce n’est pas pour une mauvaise application de la directive.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Elle la condamne parce que la France n’a tout simplement rien fait pour transposer les textes, et ce alors que les directives OGM datent de 2001 et de 1998.

La sanction pécuniaire qui plane au-dessus de notre tête, soit 42 millions d’euros, ne crée pas les conditions d’un travail législatif apaisé.

Je ne peux que renouveler la recommandation que j’avais formulée dans mon rapport sur les enjeux de l’application du droit communautaire dans le domaine de l’environnement : il est impératif que l’exécutif mais aussi le législatif se saisissent plus en amont des travaux de la Commission européenne, pour peser davantage sur les décisions prises au sein du Conseil européen et du Parlement européen. Nous éviterions ainsi de nous retrouver systématiquement dans des situations de porte-à-faux qui décrédibilisent notre nation.

Aujourd’hui, la connaissance des OGM n’est plus la même qu’en 2001. C’est pourquoi les textes européens eux-mêmes méritent d’être remis en discussion pour prendre en compte non seulement l’évolution des connaissances, mais aussi l’exigence de transparence et de démocratie de nos concitoyens sur un sujet qui touche à la protection du vivant.

La présidence française de l’Union européenne, au second semestre de cette année, sera une opportunité de choix pour rouvrir ce dossier.

Telles sont, chers collègues, les quelques réflexions personnelles que je souhaitais partager avec vous au cours de cette discussion générale.

Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, vous pouvez compter sur ma participation, dans un esprit constructif et ouvert.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP, de l ’ UC-UDF et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, chers collègues, les enjeux liés à la problématique des organismes génétiquement modifiés sont nombreux, complexes, mais ils ont un point commun : ils relèvent non pas seulement de considérations techniques ou scientifiques, certes très importantes, mais également du choix d’un projet politique.

Plusieurs clés d’entrée sont possibles pour analyser ces enjeux, et mes collègues Jean-Marc Pastor et Daniel Raoul sont déjà intervenus sur un certain nombre d’entre elles, notamment sur la recherche. Je partage toutes leurs analyses.

Quant à moi, je me limiterai à la question de la compétitivité économique durable de notre modèle agricole et de son rôle dans la promotion d’un développement solidaire.

Lors de notre débat, ici même, à la suite du Grenelle de l’environnement, je vous avais demandé, monsieur le ministre d’État, d’assumer une politique offensive sur les cultures en plein champ de plants génétiquement modifiés, et ce à un moment où jamais la biodiversité n’avait été autant menacée.

Le texte qui nous est soumis aujourd’hui en deuxième lecture est d’autant plus important qu’il sera la première concrétisation de la suite de ce Grenelle, qui avait fait naître tant d’espoirs pour certains.

Nous n’y voyons pas encore tout à fait un modèle nouveau de croissance plus respectueuse des hommes et de l’environnement, car nous savons tous maintenant qu’une croissance qui ne serait ni durable ni solidaire aura des conséquences écologiques, économiques et humaines désastreuses.

Autoriser la commercialisation et la culture de plants génétiquement modifiés ne me semble ni durable ni solidaire ! Ce n’est pas durable, car le risque de dissémination dans la nature est irréversible. Beaucoup de mes collègues ont d’ailleurs déjà souligné ce point.

En ce qui concerne l’expérimentation à des fins de recherche, ce risque de contamination doit être soumis à des dispositions légales draconiennes et réellement dissuasives afin que tous ceux qui n’ont pas fait le choix de cette technologie pour leurs cultures ou qui la refusent dans leur assiette puissent être réellement protégés.

Au nom de la liberté, certains ont souhaité amender le texte en y inscrivant la liberté de produire avec ou sans OGM. Mais il ne faut pas être naïf ! C’est la liberté du renard dans le poulailler !

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Depuis maintenant plus de dix ans, les grands groupes semenciers mondiaux ont montré leur incapacité à empêcher les contaminations, sur les lieux tant de culture que d’expérimentation.

Il en est des productions génétiquement modifiées comme de la politique : les termes « cohabitation », « coexistence pacifique » ne sont que des inventions destinées à rassurer l’opinion publique. En réalité, chacun sait que cela ne fonctionne pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Monsanto fait des procès à ceux qu’il contamine !

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

D’ailleurs, monsieur le ministre d’État, vous reconnaissiez vous-même en septembre dernier que, « sur les OGM, tout le monde est d’accord : on ne peut pas contrôler la dissémination. Donc on ne va pas prendre de risque ». Sur ce point, je suis d’accord avec vous !

Au moment où l’on vient d’inscrire dans la Constitution le principe de précaution, il serait particulièrement inadmissible de donner les moyens légaux à certains de faire tout simplement du profit au risque, tout d’abord, de provoquer une pollution génétique irréversible et, ensuite et surtout, de mettre en péril tout ce qui fait la richesse et la variété de notre agriculture.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

À ce sujet, l’avancée que représente l’amendement n° 252, plus conforme à l’esprit du Grenelle de l’environnement, est le moins que l’on pouvait attendre.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre d'État

Alors, votez-le !

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Il n’en reste pas moins qu’il nous faudra bien régler deux problèmes majeurs : celui de la production conventionnelle de masse dans certaines régions et celui des importations massives en Europe des produits destinés à l’alimentation du bétail.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre d'État

Que proposez-vous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Là encore, monsieur le ministre d’État, le choix du non PGM commercial est non seulement possible, mais aussi compatible avec les principaux défis agricoles qui nous attendent au niveau mondial, notamment celui de l’augmentation de la production pour pouvoir nourrir la planète dans les années à venir.

Je citerai le professeur Marcel Mazoyer, qui affirme ceci : « en étendant partout – en particulier là où les rendements sont restés très bas – les techniques connues » – elles sont encore très nombreuses – « corrigées de leurs excès pour être durables, on peut accroître le rendement moyen mondial de 25 %. Cette prudente évaluation montre que les terres disponibles, cultivées durablement, sont suffisantes pour nourrir toute l’humanité au XXIe siècle ».

Alors que, chez nous, la jachère existante – elle se réduit malheureusement comme peau de chagrin – ne saurait être techniquement suffisante et écologiquement intéressante, la dépendance en protéines végétales ne sera pas résorbée par la seule acceptation des OGM, sauf à admettre que les pays producteurs de PGM disposeraient d’une arme alimentaire qui fonderait définitivement notre dépendance.

Il convient plutôt de mettre en place, de structurer et de garantir réellement des filières d’approvisionnement sans OGM. C’est aujourd’hui possible, surtout quand on sait que les filières de soja non OGM au Brésil et en Inde représentent encore – mais pour combien de temps ? – entre 37 millions et 40 millions de tonnes, soit plus que la consommation totale de l’Europe – 38 millions de tonnes – et dix fois l’approvisionnement de la France.

Nous ne rivaliserons jamais avec les États-Unis, le Brésil ou l’Argentine sur le terrain de la production de masse, à bas coût, et maintenant en OGM. Notre tissu agricole ne s’y prête pas, notre histoire et nos stratégies alimentaires non plus.

Au-delà de toute considération écologique, ce serait un non-sens économique que d’emprunter la seule voie de productions génétiquement modifiées. Notre force réside dans la valeur ajoutée de nos produits et la richesse de nos terroirs sans qu’il soit nécessaire de compromettre notre sécurité alimentaire et l’importance de nos capacités de production.

Je rappellerai simplement que, depuis vingt ou trente ans, au niveau du commerce mondial, si les États-Unis sont les champions en matière d’exportation de boissons à base de cola et de céréales OGM, rejoints en cela par le Brésil et d’autres pays émergents, l’Europe est devenue le premier exportateur de produits transformés. Nous devons maintenir la valeur ajoutée que nous avons dans ce domaine.

Nous devons donc faire le choix à la fois de la compétitivité par la qualité et de la solidarité.

Permettez-moi d’intervenir brièvement sur la solidarité nationale. À ce sujet, je rejoins tout à fait l’orateur qui, tout à l’heure, parlait d’ « inverser la charge de la preuve ».

Il me paraît inadmissible que nos agriculteurs portent seuls la responsabilité des risques liés à des contaminations éventuelles. Et ce n’est pas non plus aux contribuables de payer pour la garantie de réparation de préjudices économiques ou environnementaux qui sont essentiellement le fait des distributeurs et des semenciers. À titre de comparaison, je souligne que, lorsqu’un chauffeur commet une imprudence liée à une défaillance technique sur un véhicule, c’est le constructeur du véhicule qui est condamné.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Quant à la solidarité internationale, nous savons que les PGM du commerce ne sont pas faits pour ceux qui n’ont pas les moyens de les acheter, et que leur culture à grande échelle risque d’appauvrir et d’affamer encore plus les petits paysans des pays pauvres. Je suis d’accord avec M. le ministre de l’agriculture lorsqu’il déclare ceci : « il faut que ces pays pauvres retrouvent une capacité de production autonome ».

Mais la sécurité alimentaire du monde, ce n’est pas seulement l’autosuffisance pour chacun. Seule une organisation plus équitable et plus durable des échanges internationaux pourra le permettre.

Au lieu de favoriser une uniformisation libérale de l’agriculture, la France et l’Europe devraient adopter des positions fortes, à l’échelle internationale, pour permettre à chaque pays de préserver son patrimoine écologique, d’assurer la viabilité de son modèle agricole et sa sécurité alimentaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Mme Odette Herviaux. Cela nous semble incompatible avec une utilisation commerciale massive et généralisée de plants génétiquement modifiés.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.

Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, une fois de plus, les discussions franco-françaises auxquelles nous tenons tant risquent de masquer la situation du paysage alimentaire mondial qui connaît depuis quelques mois de très grandes difficultés.

J’étais en Afrique voilà quelques semaines. Pour les habitants du Sénégal ou du Mali, nos débats sur le point de savoir si les précautions prises pour encadrer les cultures d’OGM sont suffisantes peuvent sembler bizarres…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

M. Jean-Pierre Fourcade. … et apparaître comme une préoccupation de pays développé, qui a tout ce qu’il faut, surtout comparé à l’ensemble des drames mondiaux.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Dans ce cadre, la commission des affaires économiques, parfaitement présidée par M. Jean-Paul Emorine, est parvenue, grâce au rapport extrêmement fouillé et objectif de M. Jean Bizet, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

… qui s’est efforcé de tenir compte de tous les éléments actuellement en discussion, à faire adopter en première lecture par le Sénat un texte équilibré. Ce dernier garantissait la liberté du choix des agriculteurs, il encadrait la totalité des opérations de cultures OGM et il appliquait le principe constitutionnel de précaution que nous avons intégré dans la Constitution.

Depuis, il y a eu beaucoup d’agitation et de pantalonnades, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Mais non !

… beaucoup de pantalonnades, disais-je, au cours desquelles ont été oubliés les principes qui fondent ce texte. C’est pourquoi je tiens à remercier tout spécialement M. le ministre d’État du caractère très modéré et extrêmement consensuel de son intervention en ouverture de ce débat.

Cela met fin …

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

…à un certain nombre de polémiques et devrait permettre qu’une large majorité adopte ce texte, qui a été mis au point par le Gouvernement, amélioré par le Sénat et complété par l’Assemblée nationale, même si quelques scories demeurent, qui, je l’espère, pourront être supprimées.

J’ai trois préoccupations.

Tout d’abord, nous devons respecter nos engagements européens. Il serait selon moi tout à fait condamnable que le Président de la République française mette en jeu la crédibilité de sa position en tant que président du Conseil de l’Union européenne au 1er juillet 2008 alors que n’aurait pas été réglée la question de la transposition des directives.

La première date de 1998 – dix ans, excusez du peu ! –, la deuxième de 2001. Par conséquent, nous en sommes arrivés au point où nous risquons des sanctions financières. Compte tenu de la situation financière de notre pays, alors que l’on ne cesse de nous répéter que les caisses sont vides, je trouverais stupide de continuer à dépenser de l’argent au motif que nous ne sommes pas capables de transposer ces directives.

À cet égard, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, il me semble qu’à la veille d’assurer cette présidence la France doit mettre un point d’honneur à être à jour dans la transposition des directives environnementales, notamment sur la responsabilité environnementale, les pollutions marines ou l’air ambiant, qui datent de plusieurs années et ont été approuvées par les gouvernements qui se sont succédé, tant socialistes que modérés.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Il faudrait faire un effort pour que ces transpositions soient effectuées. Le Gouvernement, en nous proposant ce projet de loi, en a fait un…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

… et, par conséquent, ce n’est pas à lui que nous pouvons reprocher de ne pas s’être dépêché. C’est aux gouvernements qui l’ont précédé !

Deuxième préoccupation, qui est partagée par l’ensemble des intervenants qui se sont exprimés, et sur laquelle M. Jean Bizet a d'ailleurs beaucoup insisté : il faut préserver notre capacité de recherche. Cela est essentiel pour éviter qu’à l’avenir nous n’ayons à subir le monopole de semenciers américains. Il suffit de restreindre plus encore la capacité de réaliser des cultures OGM pour voir, dans cinq, dix ou quinze ans, les semenciers américains, brésiliens ou indiens exercer un monopole absolu, alors que la recherche française aurait disparu.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

C’est trop tard, le combat est perdu depuis bien longtemps !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Ainsi, il ne faut pas que se reproduise la malheureuse affaire de Limagrains, dont les essais importants de cultures ont fait l’objet de fauchages systématiques par des gens mal informés.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

M. Dominique Braye. Ils sont payés par Monsanto !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

En effet, c’est notre capacité de recherche qui est en cause.

Je ne crois pas, monsieur le ministre d’État, que ce soit aujourd’hui une question de modalités financières. Un intervenant a tout à l’heure proposé de manière tout à fait astucieuse que l’on fasse un peu moins de recherche sociologique ou psychologique et plus de recherche génétique. En effet, cela pourrait se traduire, sur le long terme, par des avancées plus importantes à la fois pour nos habitudes alimentaires et pour notre position dans le monde.

Dès lors que notre agriculture, qui se place aujourd'hui au deuxième ou au troisième rang mondial, est capable de faire face aux demandes d’un certain nombre de pays en difficulté, il serait criminel d’abandonner la recherche en matière génétique ou de la laisser végéter – la connotation végétale du terme ne vous aura pas échappé ! –, comme c’est le cas à l’heure actuelle. Le Gouvernement et le Parlement sont responsables du long terme et non pas de l’événementiel, de l’article du journal qui paraît le lendemain. §Ils doivent absolument faire un effort pour que cette capacité de recherche – recherche tant privée que publique – soit développée de manière à pouvoir lutter contre les monopoles de fait qui sont en train de se constituer.

Vous avez interdit la commercialisation d’un produit de Monsanto, à mon avis à juste titre, car tous les scientifiques avaient jugé ce produit néfaste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Toutefois, il faut pouvoir développer et mettre à la disposition de nos agriculteurs, de nos entreprises des brevets français déposés par l’INRA et par les autres organismes de la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Enfin, ma troisième préoccupation, qui est aussi un principe auquel le groupe UMP est extrêmement attaché, tient à la nécessité de faire respecter la liberté de choix des agriculteurs quant aux produits avec OGM ou sans OGM, quitte à définir ce qu’est un produit sans OGM. Je vous poserai d'ailleurs une question à ce sujet, monsieur le ministre d’État.

Dans le texte qui nous vient de l’Assemblée nationale, a été conservé l’article 4, qui prévoit des sanctions pénales aggravées pour ceux qui s’opposeraient à tout développement des recherches, ce qui est une bonne chose. Je souhaite que ces sanctions soient appliquées, car on ne peut pas se satisfaire de pantalonnades alors que le problème de fond qui est posé est de savoir si, dans dix ans, notre agriculture aura la même capacité de développement mondial et de rendement pour l’ensemble de nos concitoyens et pour le marché européen, grâce à une recherche avancée. Si l’on bloque aujourd'hui les mécanismes de recherche, notre agriculture perdra sa position dans le monde.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Voilà, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, ce je souhaite.

Respecter nos engagements européens et ne pas prendre trop de retard, préserver notre capacité de recherche tant publique que privée – il n’y a en France aucune obligation à ce que toute la recherche soit publique, et il peut y avoir une recherche privée, à condition qu’elle soit encadrée, évaluée, que les brevets soient déposés et que tout le monde, par conséquent, puisse s’en servir –, faire respecter la liberté de choix, en mettant de côté l’agitation de rue et les pantalonnades, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

… dans la mesure où nous pouvons arriver à des résultats tangibles : telles sont donc mes trois préoccupations.

Comme vous l’avez vous-même souligné au début de votre intervention, monsieur le ministre d’État, nous soutiendrons l’amendement de la commission des affaires économiques qui tend à modifier quelque peu l’amendement voté par hasard par l’Assemblée nationale…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

…. – chacun sait que, dans l’autre assemblée, le happening prévaut souvent en séance au détriment du travail préalable des commissions –, amendement d’ailleurs adopté contre l’avis de la commission.

Pour moi, cet amendement est important. Mais j’aimerais que vous nous expliquiez, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, comment vous comptez fixer les limites pendant la période transitoire. J’ai entendu Mme Keller dire que la limite de 0, 9 % était trop élevée et souhaiter que la limite minimale soit fixée à 0, 1 %.

Pourriez-vous indiquer au Sénat dans quelle direction vous allez et en quoi consiste à peu près le système que vous nous proposez ?

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

M. Jean-Pierre Fourcade. Ainsi, la liberté de choix serait respectée, nous y verrions plus clair et nous pourrions voter cet amendement sans aucune arrière-pensée.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, par leur écoute des citoyens et leur liberté de choix, nos collègues députés ont sensiblement enrichi le projet de loi issu de nos travaux.

Tout d’abord, deux amendements, votés après avoir reçus un « avis de sagesse », visent à protéger des contaminations l’environnement et l’agriculture de qualité. Ils sont d’ailleurs quasiment identiques à ceux que j’avais déposés en première lecture, ici même, et auxquels M. le rapporteur s’était opposé.

Ensuite, le droit à la participation du public en matière de cultures d’OGM est consacré dans les articles 1er et 9, mettant ainsi la loi française en conformité avec la convention d’Aarhus.

Enfin, quelques améliorations ont été apportées au Haut conseil, sans toutefois remettre en question son fonctionnement, qui reste encore très déséquilibré.

Pour autant, le texte ne répond pas aux attentes des Français. Il faut travailler plus pour respecter les conclusions du Grenelle, dans l’esprit et la lettre, quand bien même elles heurteraient les intérêts catégoriels de ces lobbies productivistes qui plombent la législation de notre pays depuis des décennies.

Dans un esprit parfaitement constructif, nous déposerons plusieurs amendements « grenellement compatibles », et ce à trois niveaux.

Le premier niveau est celui de la préservation effective de la liberté de choix du producteur et du consommateur, ainsi que de la protection de l’environnement.

La directive 2001/18/CE que nous sommes invités à transcrire précise que nous devons « prendre des mesures permettant d’éviter la présence d’OGM dans d’autres produits », ce que le Grenelle de l’environnement traduisait par « garantir la liberté de produire et de consommer sans OGM ».

Hélas ! En affirmant « la liberté de produire avec ou sans », on place curieusement sur un pied d’égalité les cultures d’OGM, qui introduisent un événement génétique radicalement nouveau dans l’environnement, et les cultures traditionnelles. Dans un tel cas de figure, lorsque la liberté des uns – les promoteurs d’OGM – se heurte à celle des autres – tout le reste de la société qui n’a rien demandé –, la loi doit être rédigée de telle sorte que la liberté du faible soit réaffirmée et effectivement protégée.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre d’État

C’est le cas !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Le « avec ou sans » est donc parfaitement incongru et les dispositions techniques qui en découlent dans l’article 3 sont loin de permettre la protection du faible, dans le respect du principe constitutionnel de responsabilité.

Dans le même esprit, le texte qui nous revient reste encore et toujours entaché d’une conception réductrice, minimaliste, des seuils de contamination. Je suis au regret de devoir dénoncer la confusion, volontairement entretenue, entre le seuil de détection de la présence d’OGM dans les cultures et le seuil d’étiquetage à destination des consommateurs, c’est-à-dire le fameux 0, 9 %.

En toute rigueur, la présence ou non d’OGM dans les cultures ou l’environnement – c’est bien l’objet de nos travaux de transcription de la directive – doit être évaluée scientifiquement, au niveau du seuil de détection technique reproductible, soit actuellement 0, 1 %.

Le deuxième niveau est celui du Haut conseil.

Le Président de la République soulignait, dans son discours du 25 octobre, la nécessité d’associer la société civile aux processus de décisions. Ce n’est donc pas un scientifique mais une personnalité qui doit animer le Haut conseil, une autorité morale bénéficiant d’une légitimité publique, de manière à assurer la cohésion de l’instance en toute impartialité.

De même, les avis de synthèse doivent être pris en séance plénière : c’est le seul moyen pour sortir du faux antagonisme, cultivé par certains, entre les scientifiques et la société civile.

Le troisième niveau est celui de la mise en œuvre du principe constitutionnel de responsabilité.

Ce principe, inscrit dans la Charte de l’environnement, n’est toujours pas décliné sérieusement.

Premièrement, il fait porter la responsabilité des contaminations sur le seul transgéniculteur, qui devient le fusible pour l’ensemble de la filière OGM, pourtant concernée dans sa globalité : importateurs, stockeurs, distributeurs de semences ou de produits génétiquement modifiés, semenciers, tous contribuent à la dissémination volontaire d’OGM, mais ils restent curieusement les grands « oubliés » dans le dispositif envisagé.

Deux de nos amendements visent à responsabiliser financièrement tous les acteurs de la chaîne de diffusion d’OGM, et plus particulièrement les firmes productrices : c’est le seul moyen de ne pas imputer indûment aux producteurs labellisés « sans OGM » les coûts de traçabilité de leurs produits.

Deuxièmement, les conditions de déclenchement du processus d’indemnisation – les notions de proximité et de simultanéité – restent inacceptables, car elles sont réductrices et déconnectées de la réalité.

Troisièmement, enfin, l’indemnisation du préjudice subi n’est pas recevable : il est complètement sous-évalué au niveau des différentiels de prix retenus. Quant au préjudice moral, tel que la perte de label ou de clientèle, il est ignoré, tout comme le préjudice environnemental !

Au Sénat, nous sommes aussi capables de faire prévaloir l’intérêt général sur celui des lobbies productivistes agricoles et industriels. Évitons d’ouvrir en grand les vannes des OGM dans nos campagnes et de transformer celles-ci en paillasses de laboratoire !

Il y va de notre crédibilité vis-à-vis de nos concitoyens. Nous n’avons pas le droit de les décevoir en trahissant les conclusions du Grenelle de l’environnement à l’occasion de ce premier grand texte d’application : la problématique des OGM ne se réduit pas à celle du maïs MON 810 !

Il y va également de la consolidation de nos avantages comparatifs dans la division internationale du travail agricole. Valorisons et protégeons les potentiels spécifiques de l’agriculture française, c’est-à-dire ses terroirs et ses signes de qualité reconnus à l’échelle mondiale, à l’instar de notre gastronomie ! C’est la seule stratégie qui permettra à nos producteurs agricoles, dont les structures de petite taille ne supportent pas la comparaison avec leurs concurrents étrangers d’outre-Atlantique, de continuer à travailler et de contribuer positivement à l’aménagement durable de nos campagnes.

Mais pour cela, il nous faudra, mes chers collègues, refuser certains clichés tenaces – le pro-OGM sachant et progressiste face à l’anti-OGM ignare et passéiste – et certains mythes, tel celui qui consiste à croire que le problème de la sous-alimentation dans le monde trouvera sa réponse dans la fuite en avant dans les OGM : cet argument fallacieux est asséné par ceux-là même qui font aujourd’hui la promotion des agro-carburants à l’échelle de la planète, provoquant la flambée des prix des denrées alimentaires de base et les émeutes de la faim.

Faut-il rappeler que ce sont les mêmes qui ont conduit à la famine les paysanneries du tiers-monde, d’Asie notamment, en introduisant dans ces pays, à coup de crédit, des modèles agricoles productivistes aux conséquences particulièrement dévastatrices sur le plan environnemental et sociétal ?

Il nous faut également refuser les amalgames, comme celui qui consiste à appréhender à l’identique la recherche publique ou les applications médicamenteuses des biotechnologies, qui ne souffrent pas de contestation, et le développement massif des cultures d’OGM dans nos campagnes.

Il faut, enfin, savoir dépasser les clivages politiques traditionnels pour se rassembler sur l’essentiel.

Compte tenu des incertitudes sur le long terme pour l’environnement et la santé et des certitudes quant aux risques encourus pour les spécificités qualitatives de l’agriculture française, nous devons prendre nos responsabilités et nous donner les moyens de maîtriser effectivement « la diffusion volontaire d’OGM dans l’environnement », comme nous y invite la directive 2001/18/CE. La très grande majorité des paysans de France, les consommateurs, nos concitoyens et les générations futures nous en seront reconnaissants !

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, faisons tout simplement vivre le Grenelle de l’environnement !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au début de cette deuxième lecture devant notre assemblée du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés et après de larges débats qui ont enflammé toute la nation, je ne peux m’empêcher de pousser un véritable cri du cœur…

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

« Tout ça pour ça ! »

Certes, nous allons enfin adopter un projet de loi qui transpose une directive européenne et qui va nous permettre d’encadrer les opérations relatives aux OGM. Mais les débats parlementaires ont-ils permis que les différents protagonistes se comprennent mieux et que nos concitoyens y voient un peu plus clair ? La réponse est évidente et sans ambiguïté : elle est négative. Je dirai même que, sur le dernier point, nous avons reculé au cours des débats.

En effet, nous avons commencé ce débat dans une situation ubuesque pour le pays de Descartes : d’un côté, les anti-OGM ; en face, les pro-OGM ; au milieu, des citoyens souhaitant s’informer et comprendre, et qui bien naturellement, parce qu’ils vivent dans un pays privilégié et gâté, comme l’a rappelé Jean-Pierre Fourcade, …

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

… souhaitent voir leurs dirigeants ne prendre aucun risque, surtout quand ils ne perçoivent pas immédiatement l’avantage qu’ils pourraient eux-mêmes retirer des OGM.

La situation dans laquelle ce débat va s’achever est non pas identique à celle qui prévalait quand nous l’avons commencé, mais bien pire, avec deux partis encore plus crispés et figés dans leurs pseudo-certitudes, et des citoyens qui n’ont toujours rien compris et ne sont pas plus éclairés qu’au départ.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Comment en est-on arrivé là ? Tout simplement parce que le vrai débat n’a jamais eu lieu, …

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

M. Dominique Braye.… malgré les immenses efforts déployés par notre éminent et très courageux rapporteur, Jean Bizet !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Et si ce débat n’a jamais eu lieu, c’est parce que nous n’avons pas laissé à la science et aux scientifiques la place qui leur était due !

Nous avons, en revanche, laissé le champ libre – quand on ne les a pas aidés ! – à un lobby d’activistes anti-OGM qui orchestre depuis de nombreuses années des campagnes de désinformation du grand public, fondées sur des affirmations pseudo-scientifiques erronées

protestations sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

… et des actes d’éco-terrorisme, dans le seul but de faire apparaître les OGM, aux yeux de nos concitoyens, comme l’une des plus grandes menaces pour l’avenir de l’homme et de la planète.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

M. Dominique Braye. Monsieur le ministre d’État, madame, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la situation est très grave, voire catastrophique, et la fin du monde n’est sûrement pas loin !

Rires sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Il n’aura échappé à personne que les positions que nos dirigeants nous proposent et qui sont en totale contradiction avec l’avis presque unanime de la communauté scientifique sont loin de faire l’unanimité au niveau mondial. Au contraire, elles sont totalement originales et isolées, puisque tous les pays développés d’Amérique du Nord, d’Amérique du Sud, d’Asie et d’Europe ont adopté des positions opposées aux nôtres.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Serions-nous une fois de plus, comme le prétendent trop souvent les adeptes du coq gaulois, les seuls à avoir raison, envers et contre tous, les seuls à vouloir le bien de l’humanité ? Très sincèrement, je ne le crois pas. Je pense même tout à fait le contraire.

Le seul constat indéniable que nous pouvons faire, c’est que, depuis de nombreuses années, l’État français, par laxisme et manque de courage, en ne faisant pas appliquer la loi et en laissant les faucheurs d’OGM s’en prendre à des cultures expérimentales, quelquefois destinées à soigner des maladies graves, a laissé s’installer une situation où la passion et la déraison ont pris le pas sur la science et l’objectivité.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

C’est dans cette situation d’un État défaillant que le débat au Parlement a eu lieu. Dès lors, loin de pouvoir se dérouler de façon constructive, objective, et donc fructueuse, ce débat ne pouvait qu’être générateur des psychodrames dont nous avons été les témoins attristés.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Dès lors, mes chers collègues, je vous le dis, l’urgence, la seule urgence est d’en finir, et d’en finir au plus vite ! Il est bien trop tard, en effet, pour restaurer les conditions d’un débat serein, objectif et impartial.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

M. Dominique Braye. Ces conditions, qui relèvent de la responsabilité des ministres en charge de ce dossier, auraient pourtant été indispensables pour un débat de cette importance, lequel doit déboucher sur des décisions positives pour notre pays et une information claire et objective de nos concitoyens.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Cela dit, permettez-moi de faire un certain nombre de constats.

Premier constat : les OGM existent en France depuis de très nombreuses années. Comme tous les orateurs l’ont rappelé, notamment M. Pastor, elles ont été à l’origine de la guérison de très nombreuses maladies. Je citerai un seul exemple, dont chacun peut mesurer et même quantifier les conséquences : si nous avions pu obtenir plus tôt, grâce aux OGM, l’hormone de croissance dont nous disposons actuellement, vous imaginez le nombre de vies humaines qui auraient été épargnées par la maladie de Creutzfeldt-Jakob !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Deuxième constat : après onze ans de travaux d’essai et de culture sur des centaines de millions d’hectares de plantes génétiquement modifiées au niveau mondial, personne, je dis bien personne, n’a pu mettre en évidence d’effets dangereux sur la santé humaine ou de pathologie consécutive à ces pratiques, et cela malgré les très nombreuses études qui ont été entreprises.

En revanche, nous savons tous que ces PGM sont la seule solution qui nous permette, de façon efficace et durable, de lutter contre l’emploi des pesticides et autres produits phytosanitaires §

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

… dont les conséquences sur la santé humaine sont aujourd’hui clairement démontrées et qui sont responsables d’un très grand nombre de maladies et de mortalité avérée, notamment par cancer.

Troisième constat : comme l’a très bien mis en évidence notre collègue député l’éminent professeur Bernard Debré, il faut rappeler les dangers que peuvent représenter des plantes non-OGM en proie à des attaques parasitaires et qui, pour se défendre, sécrètent des mycotoxines ayant une action hautement, très hautement, cancérigène pour l’homme en cas d’ingestion.

Ce phénomène et ses conséquences, je les ai découverts en ma qualité de membre du groupe 3 du Grenelle de l’environnement, « Santé et Environnement », où ils ont été longuement évoqués.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Vous auriez dû participer à tous les groupes !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Ce phénomène est d’autant plus dangereux qu’il est encore très largement méconnu de l’immense majorité de nos concitoyens.

Or, comme le rappelait notre collègue Bernard Debré, les plantes génétiquement modifiées, résistantes à ces attaques parasitaires, bénéficient d’un abaissement de leur taux de mycotoxines de 90 %.

Vous le voyez, mes chers collègues, les plantes génétiquement modifiées peuvent être une solution à beaucoup de problèmes récurrents de notre société de consommation.

Je n’aurai garde d’oublier le dernier constat, à mes yeux, et de très loin, le plus important : les OGM sont aussi un immense espoir pour résoudre le problème de la faim dans le monde, première cause de mortalité mondiale, ce qui mérite d’être rappelé, car notre pays surprotégé et gâté a beaucoup trop tendance à l’oublier.

Aujourd’hui, la faim est la première cause de mortalité sur notre planète de 7 milliards d’hommes. Je vous laisse imaginer ce que sera la situation quand le cap des 9 milliards d’êtres humains sera franchi d’ici à trente ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Les OGM sont porteurs d’un formidable espoir, celui de pouvoir cultiver dans des zones aujourd’hui incultivables parce que arides ou trop froides.

Avec l’extension des zones arides, le recul des surfaces arables liées à l’urbanisation, à l’érosion et l’usure des sols, il est clair que la production agricole mondiale sera très largement insuffisante pour nourrir l’humanité. Et ce ne sont pas les ressources halieutiques, épuisées par la « surpêche », qui pourront pallier cette insuffisance criante !

Les OGM ne seront naturellement pas « la » solution pour éviter une crise alimentaire mondiale, c’est-à-dire des famines à l’échelle de pays ou de continents entiers, les plus pauvres évidemment. Mais les OGM seront, de toute évidence, une partie importante de la solution, et ce pour deux raisons très simples : une productivité supérieure aux cultures classiques et une capacité à conquérir des territoires nouveaux défavorisés en termes de climat, de présence d’eau ou de pauvreté des sols.

Notre comportement est celui d’enfants gâtés, de pays où l’on a plus de problèmes d’excès que de manque de nourriture. Quant aux enfants sous-alimentés des régions arides ou ceux des bidonvilles surpeuplés, quel avenir sera le leur ? Comment peut-on ne pas être interpellé et choqué par les émeutes de la faim qui éclatent déjà en Afrique et en Asie ?

Comment l’obsession d’hypothétiques dangers qui ne se sont jamais révélés depuis onze ans peut-elle prendre le pas sur les dangers bien réels de risque de famine mondiale ? Le principe de précaution le plus absolu, mes chers collègues, c’est de nourrir tous les hommes de la planète parce que, demain, c’est de là que viendront les guerres.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Face à cela, notre recul de leader dans le domaine des biotechnologies et la fuite de nos chercheurs, découragés par le mépris que nous avons pour la communauté scientifique, sont peu de chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Ils doivent néanmoins être pris en considération pour que ne se perpétuent pas les erreurs que nous ne cessons d’accumuler et qui sont responsables du déclin de notre pays depuis un quart de siècle.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Les OGM ne sont, certes pas, la panacée mais ils représentent des opportunités indéniables pour l’avenir de notre pays et pour l’humanité.

Alors, pour autant, ces opportunités ne présentent-elles aucun inconvénient ? Si, sans doute !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Il n’en a jamais été autrement d’ailleurs. Comme le disait déjà Pasteur, il n’existe pas de progrès sans risque. Mais nous avons, par rapport à son époque, la chance immense d’avoir fait d’immenses avancées qui nous permettent de mieux analyser les risques potentiels pour mieux les maîtriser et mieux les éviter.

Il en va ainsi des problèmes liés à la coexistence des cultures OGM et des cultures « classiques ». À ce propos, les anti-OGM parlent de « contamination », terme inapproprié, car il s’applique aux maladies. C’est de « dissémination » qu’il faudrait parler, pour s’en prémunir, sans pour autant y voir une raison de jeter le bébé, un bébé aussi prometteur que les OGM, avec l’eau du bain !

Il aurait été souhaitable de donner toute sa place à la communauté scientifique, qui, seule, pouvait nous éclairer sur ce dossier OGM. C’est aujourd’hui trop tard, alors, finissons-en, finissons-en au plus vite avec ces « pantalonnades », selon le terme de Jean-Pierre Fourcade !

Je voudrais, avant de conclure, rendre un hommage appuyé au président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Émorine.

Je tiens également à rendre un hommage appuyé à l’honnêteté intellectuelle et au courage de notre éminent rapporteur, Jean Bizet, avec une pensée très sincère pour les souffrances qu’il a endurées pendant tout le parcours de ce texte et dont nous avons été les témoins choqués, mais solidaires.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Je suivrai naturellement ses positions que je sais conformes aux miennes et à l’intérêt général, même si elles ont dû être adaptées aux circonstances et ne sont pas les meilleures que nous aurions pu adopter.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Sur les derniers mots, nous sommes d’accord !

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le Grenelle de l’environnement, c’est la feuille de route du Gouvernement en matière d’écologie, c’est notre feuille de route conjointe à Jean-Louis Borloo et moi-même. C’est un peu notre obsession depuis quelques mois et sans doute pour quelques mois encore, voire quelques années, tant il constitue le véritable programme du mandat qui nous échoit pour les années qui viennent.

Le Grenelle de l’environnement, c’est une espérance que je sais partagée par tous ceux qui voient dans l’écologie le grand enjeu du XXIe siècle.

Le Grenelle de l’environnement en matière d’OGM reposait sur trois éléments qui formaient un équilibre : la clause de sauvegarde sur le Monsanto 810, le seul OGM commercial cultivé en France, clause évoquée par le Président de la République en janvier dernier ; la relance de la recherche sur les biotechnologies – ces deux points ont été traités par Jean-Pierre Fourcade ; l’obligation posée par la directive européenne d’élaborer une loi sur les éventuelles cultures d’OGM.

Après le Grenelle de l’environnement, les participants étant rentrés chez eux, le risque est grand qu’ils aient tendance à oublier l’un ou l’autre des trois éléments qui formaient l’équilibre. Or, chacun est important.

Non, monsieur Daniel Raoul, la clause de sauvegarde n’est pas une hypocrisie ! Prévue dans la directive européenne, elle permet de faire jouer le droit en cas de doute sur un OGM, ce qui est le cas pour le Monsanto 810.

Pour préserver l’avenir du Grenelle de l’environnement, porteur, je le disais, d’une espérance considérable, nous devons accepter cet équilibre, chercher à le préserver et à le faire fructifier. Cela veut dire ne pas garder l’un des trois points sans les autres ou, pire, l’un des trois points contre les autres. Les trois points sont bel et bien indissociables.

Cette loi, nécessaire puisqu’elle résulte d’une obligation européenne, se situe dans un système très contraint. En outre, vous discutez de ce projet de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, dans un décor imparfait, celui d’un système européen lui-même critiqué.

M. Le Cam évoquait tout à l’heure les débats qui ont eu lieu sur les évaluations, notamment sur les toxines que peuvent produire les OGM. C’est vrai, le système européen d’évaluation est discuté.

C’est l’un des trois points que M. le ministre d’État et moi-même avons soulevés lors du conseil européen de l’environnement. Suivis par quatorze États membres, nous avons demandé que le système européen d’évaluation des OGM soit revu. Nous comptons mettre à profit la présidence française de l’Union européenne pour mener à terme ce projet.

Le système est très contraint parce que nous importons énormément de protéines végétales OGM. Ce point a été soulevé par plusieurs d’entre vous, notamment M. Le Cam et Mme Herviaux. J’y vois un hommage à vos collègues députés, qui ont voté un amendement prévoyant que les protéines végétales puissent faire l’objet d’un rapport devant les assemblées parlementaires afin qu’une solution soit trouvée.

Le système est très contraint et le décor est imparfait parce que le seuil de détection ne coïncide pas forcément avec le seuil de commercialisation. Il s’ensuit des tensions sur lesquelles nous aurons l’occasion de revenir tout à l’heure. C’était notamment l’objet de l’intervention de Mme Keller.

Enfin, le système est très contraint parce que le sujet des OGM interfère avec d’autres. S’agissant du certificat d’obtention végétale que vous avez évoqué, monsieur Raoul, M. le ministre de l’agriculture m’a chargé de vous préciser publiquement que ce projet est en cours d’étude et qu’il sera soumis aux assemblées dans les mois qui viennent.

Comme plusieurs d’entre vous l’ont fait remarquer – notamment MM de Montesquiou et Texier –, c’est l’honneur de cette majorité – M. le ministre d’État le notait lui-même à l’ouverture de la séance – non seulement d’avoir accepté un débat qui, depuis quinze ans, était renvoyé de mandature en mandature, mais encore d’avoir pris les devants. Vous qui avez déjà discuté d’un texte similaire voilà un an, sans qu’il aille plus loin, êtes bien placés pour savoir combien il est difficile de faire aboutir un tel dossier.

Le débat qui nous réunit sur ce texte, mesdames, messieurs les sénateurs, est fondé sur le principe suivant : il n’est pas question de discuter des OGM en général. En fait, il s’agit de porter un jugement OGM par OGM.

M. Soulage citait tout à l’heure une phrase de Nicolas Hulot, phrase que je ne connaissais pas et qui me paraît fort pertinente : « Il n’y a pas les OGM, mais des OGM. »

C’est tout l’objet de la construction du projet de loi tel qu’il vous a été présenté, tel que le Sénat l’a amendé en première lecture et tel qu’il a été complété par l’Assemblée nationale. Je pense, par exemple, à l’architecture du Haut conseil sur les biotechnologies, dont la mission sera non pas de porter un jugement sur une technologie, mais, application par application, OGM par OGM, de considérer quels sont les avantages et les inconvénients de chacun d’entre eux avant de prendre une décision.

Nous aurons l’occasion, M. le ministre d’État et moi-même, de nous exprimer tout au long du débat sur les différents amendements examinés par la commission, dont je tiens à saluer tout particulièrement l’excellent président, Jean-Paul Emorine, et le non moins excellent rapporteur, Jean Bizet.

Il me semble que, paradoxalement, M. Pastor a parfaitement défendu la position qui sera adoptée par la majorité. Il a en effet défendu l’équilibre qui a été trouvé sur l’article 1er. Mais alors, monsieur le sénateur, pourquoi déposer sur ce même article une multitude d’amendements ? Si cet équilibre est bon, alors qu’il a été si difficile à trouver, pourquoi vouloir le modifier ? Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point au cours du débat.

En tout cas, pour conclure, je répondrai à M. Pastor ainsi qu’à M. Raoul que le Gouvernement, qu’il s’agisse de M. le ministre d’État, de moi-même ou du ministre chargé des relations avec le Parlement, n’a, sur ce texte, aucune intention machiavélique

exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie

et que ce débat se tient vraiment à cœur ouvert !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Très bien ! Nous assisterons donc au débat !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

La parole est à M. président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

J’invite tous les membres de la commission des affaires économiques à se réunir à dix-huit heures trente afin d’examiner les amendements extérieurs déposés sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente.