Intervention de Odette Herviaux

Réunion du 16 avril 2008 à 15h00
Organismes génétiquement modifiés — Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Odette HerviauxOdette Herviaux :

Là encore, monsieur le ministre d’État, le choix du non PGM commercial est non seulement possible, mais aussi compatible avec les principaux défis agricoles qui nous attendent au niveau mondial, notamment celui de l’augmentation de la production pour pouvoir nourrir la planète dans les années à venir.

Je citerai le professeur Marcel Mazoyer, qui affirme ceci : « en étendant partout – en particulier là où les rendements sont restés très bas – les techniques connues » – elles sont encore très nombreuses – « corrigées de leurs excès pour être durables, on peut accroître le rendement moyen mondial de 25 %. Cette prudente évaluation montre que les terres disponibles, cultivées durablement, sont suffisantes pour nourrir toute l’humanité au XXIe siècle ».

Alors que, chez nous, la jachère existante – elle se réduit malheureusement comme peau de chagrin – ne saurait être techniquement suffisante et écologiquement intéressante, la dépendance en protéines végétales ne sera pas résorbée par la seule acceptation des OGM, sauf à admettre que les pays producteurs de PGM disposeraient d’une arme alimentaire qui fonderait définitivement notre dépendance.

Il convient plutôt de mettre en place, de structurer et de garantir réellement des filières d’approvisionnement sans OGM. C’est aujourd’hui possible, surtout quand on sait que les filières de soja non OGM au Brésil et en Inde représentent encore – mais pour combien de temps ? – entre 37 millions et 40 millions de tonnes, soit plus que la consommation totale de l’Europe – 38 millions de tonnes – et dix fois l’approvisionnement de la France.

Nous ne rivaliserons jamais avec les États-Unis, le Brésil ou l’Argentine sur le terrain de la production de masse, à bas coût, et maintenant en OGM. Notre tissu agricole ne s’y prête pas, notre histoire et nos stratégies alimentaires non plus.

Au-delà de toute considération écologique, ce serait un non-sens économique que d’emprunter la seule voie de productions génétiquement modifiées. Notre force réside dans la valeur ajoutée de nos produits et la richesse de nos terroirs sans qu’il soit nécessaire de compromettre notre sécurité alimentaire et l’importance de nos capacités de production.

Je rappellerai simplement que, depuis vingt ou trente ans, au niveau du commerce mondial, si les États-Unis sont les champions en matière d’exportation de boissons à base de cola et de céréales OGM, rejoints en cela par le Brésil et d’autres pays émergents, l’Europe est devenue le premier exportateur de produits transformés. Nous devons maintenir la valeur ajoutée que nous avons dans ce domaine.

Nous devons donc faire le choix à la fois de la compétitivité par la qualité et de la solidarité.

Permettez-moi d’intervenir brièvement sur la solidarité nationale. À ce sujet, je rejoins tout à fait l’orateur qui, tout à l’heure, parlait d’ « inverser la charge de la preuve ».

Il me paraît inadmissible que nos agriculteurs portent seuls la responsabilité des risques liés à des contaminations éventuelles. Et ce n’est pas non plus aux contribuables de payer pour la garantie de réparation de préjudices économiques ou environnementaux qui sont essentiellement le fait des distributeurs et des semenciers. À titre de comparaison, je souligne que, lorsqu’un chauffeur commet une imprudence liée à une défaillance technique sur un véhicule, c’est le constructeur du véhicule qui est condamné.

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