Intervention de Nathalie Kosciusko-Morizet

Réunion du 16 avril 2008 à 15h00
Organismes génétiquement modifiés — Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le Grenelle de l’environnement, c’est la feuille de route du Gouvernement en matière d’écologie, c’est notre feuille de route conjointe à Jean-Louis Borloo et moi-même. C’est un peu notre obsession depuis quelques mois et sans doute pour quelques mois encore, voire quelques années, tant il constitue le véritable programme du mandat qui nous échoit pour les années qui viennent.

Le Grenelle de l’environnement, c’est une espérance que je sais partagée par tous ceux qui voient dans l’écologie le grand enjeu du XXIe siècle.

Le Grenelle de l’environnement en matière d’OGM reposait sur trois éléments qui formaient un équilibre : la clause de sauvegarde sur le Monsanto 810, le seul OGM commercial cultivé en France, clause évoquée par le Président de la République en janvier dernier ; la relance de la recherche sur les biotechnologies – ces deux points ont été traités par Jean-Pierre Fourcade ; l’obligation posée par la directive européenne d’élaborer une loi sur les éventuelles cultures d’OGM.

Après le Grenelle de l’environnement, les participants étant rentrés chez eux, le risque est grand qu’ils aient tendance à oublier l’un ou l’autre des trois éléments qui formaient l’équilibre. Or, chacun est important.

Non, monsieur Daniel Raoul, la clause de sauvegarde n’est pas une hypocrisie ! Prévue dans la directive européenne, elle permet de faire jouer le droit en cas de doute sur un OGM, ce qui est le cas pour le Monsanto 810.

Pour préserver l’avenir du Grenelle de l’environnement, porteur, je le disais, d’une espérance considérable, nous devons accepter cet équilibre, chercher à le préserver et à le faire fructifier. Cela veut dire ne pas garder l’un des trois points sans les autres ou, pire, l’un des trois points contre les autres. Les trois points sont bel et bien indissociables.

Cette loi, nécessaire puisqu’elle résulte d’une obligation européenne, se situe dans un système très contraint. En outre, vous discutez de ce projet de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, dans un décor imparfait, celui d’un système européen lui-même critiqué.

M. Le Cam évoquait tout à l’heure les débats qui ont eu lieu sur les évaluations, notamment sur les toxines que peuvent produire les OGM. C’est vrai, le système européen d’évaluation est discuté.

C’est l’un des trois points que M. le ministre d’État et moi-même avons soulevés lors du conseil européen de l’environnement. Suivis par quatorze États membres, nous avons demandé que le système européen d’évaluation des OGM soit revu. Nous comptons mettre à profit la présidence française de l’Union européenne pour mener à terme ce projet.

Le système est très contraint parce que nous importons énormément de protéines végétales OGM. Ce point a été soulevé par plusieurs d’entre vous, notamment M. Le Cam et Mme Herviaux. J’y vois un hommage à vos collègues députés, qui ont voté un amendement prévoyant que les protéines végétales puissent faire l’objet d’un rapport devant les assemblées parlementaires afin qu’une solution soit trouvée.

Le système est très contraint et le décor est imparfait parce que le seuil de détection ne coïncide pas forcément avec le seuil de commercialisation. Il s’ensuit des tensions sur lesquelles nous aurons l’occasion de revenir tout à l’heure. C’était notamment l’objet de l’intervention de Mme Keller.

Enfin, le système est très contraint parce que le sujet des OGM interfère avec d’autres. S’agissant du certificat d’obtention végétale que vous avez évoqué, monsieur Raoul, M. le ministre de l’agriculture m’a chargé de vous préciser publiquement que ce projet est en cours d’étude et qu’il sera soumis aux assemblées dans les mois qui viennent.

Comme plusieurs d’entre vous l’ont fait remarquer – notamment MM de Montesquiou et Texier –, c’est l’honneur de cette majorité – M. le ministre d’État le notait lui-même à l’ouverture de la séance – non seulement d’avoir accepté un débat qui, depuis quinze ans, était renvoyé de mandature en mandature, mais encore d’avoir pris les devants. Vous qui avez déjà discuté d’un texte similaire voilà un an, sans qu’il aille plus loin, êtes bien placés pour savoir combien il est difficile de faire aboutir un tel dossier.

Le débat qui nous réunit sur ce texte, mesdames, messieurs les sénateurs, est fondé sur le principe suivant : il n’est pas question de discuter des OGM en général. En fait, il s’agit de porter un jugement OGM par OGM.

M. Soulage citait tout à l’heure une phrase de Nicolas Hulot, phrase que je ne connaissais pas et qui me paraît fort pertinente : « Il n’y a pas les OGM, mais des OGM. »

C’est tout l’objet de la construction du projet de loi tel qu’il vous a été présenté, tel que le Sénat l’a amendé en première lecture et tel qu’il a été complété par l’Assemblée nationale. Je pense, par exemple, à l’architecture du Haut conseil sur les biotechnologies, dont la mission sera non pas de porter un jugement sur une technologie, mais, application par application, OGM par OGM, de considérer quels sont les avantages et les inconvénients de chacun d’entre eux avant de prendre une décision.

Nous aurons l’occasion, M. le ministre d’État et moi-même, de nous exprimer tout au long du débat sur les différents amendements examinés par la commission, dont je tiens à saluer tout particulièrement l’excellent président, Jean-Paul Emorine, et le non moins excellent rapporteur, Jean Bizet.

Il me semble que, paradoxalement, M. Pastor a parfaitement défendu la position qui sera adoptée par la majorité. Il a en effet défendu l’équilibre qui a été trouvé sur l’article 1er. Mais alors, monsieur le sénateur, pourquoi déposer sur ce même article une multitude d’amendements ? Si cet équilibre est bon, alors qu’il a été si difficile à trouver, pourquoi vouloir le modifier ? Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point au cours du débat.

En tout cas, pour conclure, je répondrai à M. Pastor ainsi qu’à M. Raoul que le Gouvernement, qu’il s’agisse de M. le ministre d’État, de moi-même ou du ministre chargé des relations avec le Parlement, n’a, sur ce texte, aucune intention machiavélique

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