Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour faire de l'idéal d'égalité des chances une réalité pour tous, le présent projet de loi vise, comme cela vient d'être souligné, à mobiliser tous les leviers d'action.
La commission des affaires culturelles s'est prononcée sur des dispositions qui tendent notamment à relever le défi de la réussite éducative, de l'intégration et de la cohésion culturelle et sociale.
Si l'égalité des chances est le socle de notre pacte républicain, l'éducation est sans nul doute à la base et au coeur de ce défi. L'enjeu est de taille, quand 150 000 jeunes quittent chaque année notre système éducatif sans diplôme ni qualification, près de 30 % d'entre eux se trouvant au chômage dans les années qui suivent cette sortie précoce ; en outre, 15 000 enfants de quatorze à seize ans sont déjà en situation de rupture avec l'école, avant même la fin de leur scolarité obligatoire.
C'est pourquoi nous nous devons non seulement d'élaborer des textes et d'avancer des idées, mais aussi d'apporter des réponses concrètes. La création de la formation d'apprenti junior en est une, qu'il nous faut envisager avec précaution et encadrer de garanties solides pour en assurer le succès.
En effet, les voies de la réussite ne sauraient être uniformes. À la diversité des élèves, de leurs talents et de leurs attentes doit correspondre une pluralité de parcours.
La loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école a consacré des premières mesures allant en ce sens, en vue de mener 100 % des jeunes à une qualification reconnue. La mise en place de l'apprentissage junior, dès la rentrée de 2006, prolongera et approfondira ces avancées, en apportant aux jeunes une chance nouvelle de réussite.
Certes, nul ne prétendrait présenter cette formation comme la panacée au problème complexe et multiforme de l'échec scolaire. Toutefois, elle donnera une chance de plus à certains jeunes qui ne s'épanouissent pas au collège dans le cursus général. En effet, on le sait bien, notre enseignement privilégie davantage l'abstraction que celui d'autres pays ; il valorise les savoirs plus que les savoir-faire.
Or une approche plus concrète et plus active, un changement de lieu et de rythme, le contact avec des adultes qui les valorisent et les responsabilisent permettent bien souvent à des jeunes de retrouver goût et motivation pour des apprentissages dont ils redécouvrent le sens. Nous devons leur apporter des solutions le plus tôt possible, avant qu'ils n'entrent durablement dans la spirale du « décrochage ».
Par ailleurs, les dispositifs actuels de préapprentissage, les classes d'initiation professionnelles en alternance, les CLIPA, et les classes préparatoires à l'apprentissage, les CPA, sont devenus peu lisibles, peu attrayants, et sont tombés en désuétude, en dépit de l'intérêt qu'ils présentent. Au contraire, l'apprentissage junior, qui les remplacera et les rénovera, permettra d'apporter une réponse fondée sur plusieurs principes essentiels.
Tout d'abord, cette formation, à vocation qualifiante, s'adressera à des élèves volontaires auxquels sera garanti, à tout moment, un « droit au retour » au sein du cursus scolaire ordinaire au collège.
En outre, la formation comprendra deux étapes : une première phase de préparation et de découverte des métiers se déroulera, et ce point est important, sous statut scolaire ; ensuite, la signature d'un contrat d'apprentissage ne sera possible qu'à partir de l'âge de quinze ans. Le champ des dérogations déjà prévues par le code du travail, dont bénéficient aujourd'hui près de 26 000 apprentis, soit environ 10 % des effectifs, sera de fait étendu.
Enfin, la formation s'inscrira pleinement dans le cadre de la scolarité obligatoire, en donnant la priorité à l'acquisition du socle commun de connaissances et de compétences. À cet effet, l'apprenti junior bénéficiera d'un suivi individualisé par le tuteur, dans le cadre d'un projet pédagogique personnalisé.
Ainsi, l'apprentissage junior tend à concilier l'unité des exigences que reflètent le socle et la pluralité des parcours de réussite, qui est indispensable pour assurer l'égalité des chances au sein du collège unique.
Il me semble important d'insister maintenant sur quelques autres conditions qui devront être réunies pour garantir la qualité et la réussite de cette formation.
D'abord, la continuité entre l'école et le monde professionnel doit être davantage mise en exergue.