Séance en hémicycle du 23 février 2006 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • apprentissage
  • discrimination
  • franche
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La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l'article 32 relatif à l'ordre du jour et sur l'article 42 relatif à la discussion des projets de loi.

Programmer un débat d'une si grande importance deux vendredis et un lundi manifeste une volonté d'escamoter le débat et d'empêcher une large mobilisation de tous les sénateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Il fut un temps où le Sénat n'aurait jamais accordé à un autre gouvernement de telles faveurs et adapté ainsi son emploi du temps, pour accélérer la discussion et l'adoption d'un projet de loi.

Discuter du « contrat première embauche », qui suscite tant de questions et d'inquiétudes, dans d'aussi mauvaises conditions de préparation du débat ne nous semble pas convenable.

Je me réfère à la journée d'hier.

La majorité sénatoriale n'a pas hésité à déprogrammer un débat européen important et à interrompre la discussion d'un projet de loi tout aussi attendu afin de terminer la séance d'hier soir dans des délais permettant l'ouverture de la séance de ce matin à l'horaire prévu.

Ainsi, l'esprit de la révision constitutionnelle de 1995, aux termes de laquelle a été instaurée une séance mensuelle réservée à l'initiative parlementaire, a été bafoué.

Depuis 1995, une fois par mois, le Parlement peut discuter des sujets de son choix. Cette séance n'est pas en principe faite pour accueillir le trop-plein de l'ordre du jour prioritaire et les projets de loi que le Gouvernement tient absolument à faire discuter et pour lesquels il ne trouve pas de créneau disponible dans l'ordre du jour prioritaire.

Voilà le principe. Mais, depuis 2002, nous constatons que les dates, les horaires et le contenu même de la séance mensuelle réservée à l'initiative parlementaire varient en fonction du bon plaisir du Gouvernement alors qu'auparavant cet espace d'initiative parlementaire dans chaque assemblée était absolument respecté par les gouvernements précédents.

Que s'est-il passé hier soir ?

Pour commencer la discussion à tout prix jeudi 23 février à dix heures, la majorité sénatoriale a obtempéré aux injonctions du Gouvernement en bouleversant l'ordre du jour de la séance mensuelle réservée à l'initiative parlementaire du mercredi 22 février.

Dans un premier temps, la question orale européenne sur les restrictions de circulation dans l'Union européenne des travailleurs salariés des nouveaux États membres, dont la discussion était prévue en soirée, a été retirée de l'ordre du jour. Mon collègue Roland Ries, qui devait intervenir, n'en a même pas été prévenu.

J'ai demandé la convocation d'une conférence des présidents afin que soit examinée cette demande de retrait du président de la délégation pour l'Union européenne, auteur de la question, car ce débat avait été décidé lors de notre dernière conférence des présidents. À quoi sert cette instance si ses décisions peuvent être remises en cause à tout moment et dans n'importe quelles conditions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Nous avions entamé un cycle de réflexions, sur votre initiative, monsieur le président, sur la modernisation de nos méthodes de travail en marge de ces conférences des présidents.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Mais je constate qu'avant que les conclusions en soient tirées des innovations de procédure parlementaire sont mises en oeuvre.

Pour la première fois de l'histoire parlementaire, une question orale a été discutée en dehors de la séance publique, au cours d'une réunion publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

À quoi sert donc la séance publique ? Quelle est la portée d'un débat parlementaire organisé en catimini et à l'improviste

Dans un second temps, toujours hier soir, la discussion du projet de loi sur le volontariat associatif a été interrompue à zéro heure trente, à la demande du président de la commission des affaires culturelles - qui avait pourtant insisté pour que ce projet de loi soit débattu pendant la journée mensuelle réservée à l'initiative parlementaire -, malgré les souhaits exprimés par David Assouline, Marie-Christine Blandin, Serge Lagauche et d'autres de poursuivre le débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La suite de la discussion de ce texte, dont l'adoption est très attendue par le milieu associatif, est reportée sine die.

Avec ces tripatouillages de l'ordre du jour, la majorité, poussée par le Gouvernement, manifeste ainsi qu'elle est prête à tout pour accélérer les débats sur le projet de loi pour l'égalité des chances afin de se plier au calendrier fixé par le Premier ministre.

Mais il y a pire.

Notre assemblée ne peut débattre sans avoir une connaissance exacte du projet de loi.

L'article 42 de notre règlement précise, dans ses alinéas 2 et 3, les conditions du débat en séance publique :

« Les projets de loi, les propositions de loi transmises par l'Assemblée nationale et acceptées par le Gouvernement font l'objet d'une discussion ouverte par le Gouvernement et poursuivie par la présentation du rapport de la commission compétente. Dans tous les autres cas, la discussion est ouverte par la présentation du rapport de la commission, sous réserve des dispositions de l'alinéa 4 ci-après.

« Lorsque le rapport a été imprimé et distribué, le rapporteur se borne à le compléter et à le commenter sans en donner lecture. Sauf décision contraire de la conférence des présidents, la durée de son exposé ne peut excéder vingt minutes. Au moment du passage à la discussion des articles, le rapporteur doit informer le Sénat du dernier état des travaux de la commission après l'examen des amendements et sous-amendements auquel elle s'est livrée, lorsqu'il entraîne une modification substantielle du rapport initial de la commission. »

Sur un sujet aussi complexe, sur un texte aussi hétéroclite, l'examen approfondi du rapport de la commission, dont nous savons par avance qu'il sera d'une très grande qualité, est absolument indispensable.

Le projet de loi que nous allons évoquer est très disparate. Il porte sur des sujets extrêmement divers ; l'un de nos amendements vise ainsi à une nouvelle dénomination du texte pour l'intituler « projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social ». En effet, nous sommes perplexes devant l'incorporation dans ce texte, censé lutter contre les discriminations et pour l'égalité des chances, de mesures relatives à l'équipement commercial ou aux salles multiplexes de cinéma.

Laissez donc le temps à tous les parlementaires de prendre connaissance des rapports des cinq commissions qui se sont saisies de ce texte !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Cette multiplicité de rapports ne contribue pas à la clarté de nos débats. Pour suivre la discussion des différents titres du projet de loi, il faudra « jongler » dans la lecture de ces différents rapports.

Enfin, d'une manière générale, je souhaite que les manipulations par la majorité sénatoriale de l'ordre du jour parlementaire ne déteignent pas sur la procédure parlementaire, notamment lors du vote des motions de procédure.

L'opposition est prête à jouer son rôle, à avoir un débat responsable sur ce texte.

Ce débat est nécessaire puisque, à l'Assemblée nationale, la discussion a été interrompue par l'utilisation de l'article 49-3 de la Constitution, qui n'est pas fait pour faciliter l'examen de nos textes !

Le Gouvernement, qui dispose, me semble-t-il, d'une majorité assez large et disciplinée dans les deux assemblées, se défie pourtant de la représentation nationale : recours aux ordonnances pour le « contrat nouvelles embauches », choix d'un amendement au projet de loi pour l'égalité des chances, pour le contrat première embauche, déclaration de l'urgence afin de délibérer en une seule lecture, accélération du calendrier afin de débattre du texte pendant les vacances scolaires et - pour couronner le tout - recours à l'article 49-3 de la Constitution afin d'empêcher tout véritable débat sur le démantèlement du droit du travail.

Comment pouvez-vous justifier la procédure d'urgence alors que vous êtes au pouvoir depuis quatre ans, que vous avez fait voter au moins cinq lois sur le travail et l'emploi ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Le débat démocratique n'est jamais une perte de temps. C'est toujours une chance. Mais nous sentons que vous avez mauvaise conscience, ce qui vous pousse à agir, ces temps-ci, dans la précipitation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

On peut espérer que c'est le cas cette fois !

Vous craignez à tel point la rue et la jeunesse que vous avez fait débattre et arrêter la discussion pendant la période des vacances scolaires de peur que ne renaissent les mouvements, dont la manifestation d'aujourd'hui montre la vitalité.

Quand on bafoue les droits du Parlement, quand on méprise le dialogue social, quand on oublie la jeunesse, on ne fait jamais une réforme durable.

Le Sénat s'est toujours considéré comme la sagesse de la République.

Il est temps de se ressaisir, en permettant au débat parlementaire de se dérouler sans embûche.

Lors de sa première intervention en séance publique, le 25 juin 1959, François Mitterrand voyait dans le Sénat « une assemblée qui, par tradition, par tempérament et par fidélité aux principes républicains, a toujours reconnu aux minorités politiques le droit d'être respectées ».

J'ose imaginer, monsieur le président, que le Sénat respectera dans ce débat, non seulement l'opposition, mais sa raison d'être. Parce qu'il est une assemblée parlementaire de plein exercice, le Sénat doit débattre dans les meilleures conditions possible d'un texte aussi important.

C'est pourquoi, monsieur le président, afin d'achever la lecture du rapport de la commission des affaires sociales, je demande une suspension de séance de trente minutes.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Monsieur Bel, je vous ai laissé parler pendant neuf minutes et quarante secondes.

En ce qui concerne l'ordre du jour d'hier, vous savez comme moi qu'à la conférence des présidents il a été souhaité que les questions concernant M. Haenel et Sido soient retirées de l'ordre du jour réservé.

Pour ma part, j'avais demandé que toutes les questions d'origine parlementaire soient maintenues.

Le Gouvernement a glissé sa proposition de deuxième lecture du projet de loi relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif et M. le président de la commission des affaires culturelles a beaucoup insisté sur le fait que cette deuxième délibération ne durerait pas plus qu'une ou deux heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Ensuite, à la demande de l'un des membres du groupe communiste républicain et citoyen, il a été procédé à un scrutin public sur l'ordre du jour, lequel a été approuvé à une très large majorité.

Hier, M. Haenel a fait savoir qu'il retirait sa question.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Vous lui avez intimé l'ordre de le faire !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

M. Haenel a retiré sa question, ce que j'ai regretté ! Ensuite, il y a eu un débat et l'ordre du jour a été de nouveau modifié et approuvé.

Mais, j'y insiste, le président du Sénat a défendu vigoureusement, en conférence des présidents, le maintien de toutes les propositions d'origine parlementaire dans l'ordre du jour réservé.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

C'est la première fois qu'une question est retirée de l'ordre du jour réservé, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Avant de suspendre, monsieur Bel, je vous propose, si vous en êtes d'accord, d'entendre auparavant les autres sénateurs qui ont demandé la parole pour un rappel au règlement. (M. Jean-Pierre Bel acquiesce.)

La parole est à M. Roland Muzeau, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

M. Roland Muzeau. Si vous commencez à nous demander notre accord, monsieur le président, les choses vont peut-être s'arranger, mais je n'y crois guère...

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Mon rappel au règlement a trait à l'organisation de nos travaux. Le débat sur cet important projet de loi relatif à l'égalité des chances, ou plutôt relatif à l'accroissement des inégalités, s'ouvre dans des conditions de précipitation inacceptables.

Le Gouvernement, sa majorité qui redoute la montée en puissance du mouvement populaire de rejet de la disposition phare de votre texte, le CPE, tente de trouver son salut dans la fuite en avant.

Quelle est la première victime de la marche forcée imposée par le pouvoir ? C'est la démocratie parlementaire.

Rappelez-vous l'origine de cette affaire. M. de Villepin cherchant à donner des gages au patronat a décidé d'avancer de quinze jours à l'Assemblée nationale le débat sur le projet de loi pour l'égalité des chances et d'y introduire par voie d'amendement, un pur cavalier, le contrat première embauche.

Simultanément, le débat prévu au Sénat vers la mi-mars était avancé au 28 février.

Comme chacun le sait, l'appétit vient en mangeant et M. de Villepin, toujours en compétition avec M. Sarkozy, non content d'avoir empêché une préparation sereine, réfléchie, du projet de loi par l'Assemblée nationale, a décidé d'imposer le vote du projet de loi par la mise en oeuvre de l'article 49-3 de la Constitution.

Et, là encore, au cours de la conférence des présidents du jeudi 10 février, le Gouvernement a accéléré les travaux sénatoriaux en avançant les débats dans notre hémicycle du 28 au 23 février.

Ces modifications successives de l'ordre du jour, dans le seul but de gêner l'intervention de l'opposition, relèvent d'une conception autoritaire, brutale du fonctionnement de nos institutions.

Je ne reviendrai pas sur les ultimes manoeuvres auxquelles nous avons assisté hier : retrait de la question orale de M. Haenel, interruption brutale et report sine die de l'examen du projet loi relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif, en pleine nuit, pour dégager l'ordre du jour. Les manoeuvres sont lamentables et confinent à la pantalonnade qui ferait sourire s'il ne s'agissait pas d'une grave remise en cause du débat parlementaire.

Nous ne sommes pas surpris de cette dérive, puisque, depuis 2002, MM. Raffarin et de Villepin ont usé de tous les artifices : sessions d'été à répétition pour contourner le mouvement social, utilisation de la procédure des ordonnances, bien entendu recours au 49-3 et, enfin, banalisation de la procédure d'urgence qui limite l'examen du texte à une seule lecture par assemblée.

Monsieur le président, le Parlement creuse sa propre tombe en se soumettant au diktat du pouvoir exécutif.

Quelle est la légitimité d'un Parlement qui ne débat pas dans de bonnes conditions, qui enregistre finalement, un projet de loi ?

Pire, quelle est la légitimité de l'Assemblée nationale qui, finalement, n'aura débattu, du fait de la procédure d'urgence, que de quatre articles sur trente-huit ?

L'Assemblée nationale ne sera plus saisie de ce texte qui doit se diriger vers la commission mixte paritaire après le débat sénatorial.

Le groupe communiste républicain et citoyen, monsieur le président, alerte avec la plus grande solennité notre peuple, la jeunesse, sur la dérive antidémocratique de notre régime.

Ces mots ne sont pas trop forts. Ils traduisent le constat lucide d'une situation de déséquilibre institutionnel extrêmement dangereux.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il n'y a plus d'URSS : vous ne le saviez pas ? Allez donc en Russie. À Moscou, c'est la droite colonialiste !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Je conclurai mon intervention par l'évocation des regrettables conditions d'examen du projet en commission.

C'est hier, la veille du débat, que le rapport a été débattu en commission des affaires sociales, ainsi que dans les quatre commissions saisies pour avis.

À quoi sert un rapport s'il ne peut être lu par les sénateurs et leurs collaborateurs ? Hier, à dix-neuf heures, seul le rapport pour avis de la commission des affaires économiques était publié et mis en distribution.

Comment éclairer la préparation du débat sur les articles par le rapport dans de telles conditions de fébrilité ?

Je vous demande donc, monsieur le président, de repousser le délai limite de dépôt des amendements à demain matin, vendredi, dix heures. §

Ma question est précise et demande une réponse précise. Aux vingt-huit articles originaux du projet, de nombreux autres ont été ajoutés, sans examen par l'Assemblée nationale, dans la foulée du 49-3.

L'éclairage du rapport sur ce point est indispensable pour l'ensemble des sénateurs, du moins pour nous-mêmes, car peut-être la majorité s'en moque-t-elle éperdument...

Tel n'est pas le cas des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen et j'attends donc, monsieur le président, que vous m'apportiez des réponses précises.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Monsieur Muzeau, la date limite pour le dépôt des amendements a été fixée en conférence des présidents. (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On ne peut donc pas y toucher.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

On vient juste d'avoir une photocopie du rapport, il n'est même pas encore imprimé.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'interrogerai la commission des affaires sociales pour savoir s'il serait éventuellement possible de retarder la date limite pour le dépôt des amendements et je vous communiquerai sa réponse après la suspension de séance.

La parole est à M. Guy Fischer, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon rappel au règlement se fonde également sur l'organisation de nos travaux, et plus particulièrement sur les conséquences sur les débats parlementaires de l'imbrication de la déclaration en urgence de ce projet de loi et de l'application à l'Assemblée nationale de l'article 49-3 de la Constitution.

Est-il concevable, messieurs les ministres, mes chers collègues, que l'Assemblée nationale, les députés, donc les représentants du peuple, élus au suffrage universel direct, ne soient jamais consultés sur la plupart des articles de ce projet de loi ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Comme le rappelait fort justement mon ami Roland Muzeau, la déclaration en urgence limite à une seule lecture dans chaque assemblée l'examen de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Jamais les députés n'examineront les dispositions relatives aux stagiaires. Jamais les députés n'examineront les dispositions relatives aux zones franches. Jamais ils n'examineront les articles relatifs à la responsabilité parentale ou à la lutte, bien timide au demeurant, contre les discriminations.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Jamais ils ne pourront exercer leur droit constitutionnel d'amendement sur les trente-quatre des trente-huit articles qu'ils n'ont pas eu le loisir d'examiner. Jamais !

Ce projet de loi préoccupe pourtant profondément la nation.

Au-delà de la mesure relative au CPE, sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir longuement, des questions aussi primordiales que la formation, l'apprentissage ou la lutte contre les discriminations ne peuvent décemment pas être soustraites à l'examen des députés.

Je demande solennellement au Gouvernement, en espérant avoir l'appui du Sénat tout entier, la levée de la déclaration en urgence sur le projet de loi pour l'égalité des chances.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La suppression de trois articles par la commission des lois démontre d'ailleurs la nécessité d'approfondir la réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Mes derniers mots concernent la tenue du débat au Sénat.

Il est désagréable que la gauche sénatoriale soit systématiquement soupçonnée de vouloir faire de l'obstruction.

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Certes, des amendements nombreux ont été déposés. Ils reflètent une opposition au texte proposé, une volonté de proposition pour montrer qu'une alternative à la politique ultralibérale, destructrice du code du travail et du service public de l'éducation nationale, peut être avancée.

Mais l'autoritarisme déjà évoqué ne supporte plus la contradiction.

Alors que le Parlement devrait être, comme il le fut, le lieu de la confrontation des idées, voire de l'affrontement idéologique, vous voulez le cantonner dans son rôle de chambre d'enregistrement, de « Parlement godillot ».

Avec mes amis du groupe communiste républicain et citoyen, mais aussi de toute la gauche sénatoriale, nous tenterons de sauver l'honneur du Parlement et du Sénat lui-même, en permettant au débat démocratique d'avoir lieu.

C'est bien parce que nous souhaitons qu'il ait lieu demain à l'Assemblée nationale que j'insiste pour que le Gouvernement nous réponde sur la levée de la déclaration en urgence !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Monsieur le ministre, dans quelles dispositions d'esprit est le Gouvernement ?

Sourires

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement

Monsieur le président, le Gouvernement est dans des dispositions d'esprit ouvertes, sereines, heureuses. Il est prêt à travailler les lundis et les vendredis. Pour le reste, il estime que l'urgence doit être maintenue.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. David Assouline, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre président de groupe Jean-Pierre Bel et nos amis communistes ont décrit...

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

...- et leurs interventions n'ont rien d'idéologique - une situation absolument accablante du point de vue de la procédure et des habitudes mêmes du Sénat sur la question de l'ordre du jour. La journée que nous avons vécue hier est à cet égard édifiante. En tant que jeune sénateur, j'ai encore des choses à apprendre sur les questions de procédure, mais je ne pensais pas que vous puissiez vous asseoir à ce point sur des principes que vous avez toujours respectés, au moins sur la forme !

Vous agissez sous le coup de la panique ! Nous ne sommes pas dans un débat de convictions : vous êtes tous persuadés que ce que vous faites n'est pas bien !

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Nous sommes donc dans un débat politique. Êtes-vous prêts à tout ? Pourquoi ?

Nous avons vécu une crise sociale sans précédent dans les banlieues.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

À ce moment-là, vous avez appelé au consensus : il fallait que la nation tout entière se serre les coudes pour faire face à cette crise sociale.

Or la première tentative de réponse législative, la grande loi annoncée sur l'égalité des chances n'est pas discutée avec les partenaires sociaux ! Elle vient ensuite en discussion devant l'Assemblée nationale et l'on juge, après l'article 3, que celle-ci n'en débattra jamais ! Enfin, au Sénat, on veut nous faire marcher au pas !

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Hier, on supprime de l'ordre du jour une question orale européenne avec débat ! Nous avions l'impression d'être au stade Roland-Garros, avec le court central et les courts annexes, la salle Médicis ! Personne n'avait jamais vu cela. Mais quelle mouche vous a donc piqués !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous êtes tous des défenseurs du bicamérisme et vous savez, je l'ai déjà dit, que le Sénat est regardé par beaucoup de nos concitoyens avec un grand scepticisme.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

M. David Assouline. Or vous acceptez que le Gouvernement dise - il n'est nul besoin de grands discours -, que le Sénat ne sert à rien !

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Pourtant, c'est ce que les Français retiennent.

Toutes les grandes lois dont le Président de la République s'est targué pour ce septennat ont été prises à coup d'ordonnances, sous le coup de l'urgence. Cela finira mal. Personne ne parle plus de la loi Fillon, par exemple ; pourtant, elle était déposée en urgence. Ce qui est fait dans l'urgence tombe ensuite dans l'oubli.

Les grandes lois de la République, celles de 1901 et de 1905, ont pu s'inscrire dans la durée et structurer notre vie démocratique parce qu'elles ont fait l'objet de vraies confrontations d'idées, d'une délibération au cours de laquelle les droits de l'opposition ont été respectés. Elles sont restées gravées dans le débat démocratique.

J'espère que la manoeuvre ne consiste pas, au début de cette discussion, à continuer ce que vous avez commencé hier ! Certes, nous n'étions pas nombreux pour débattre du projet de loi relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif, il constituait pourtant une réponse à l'urgence sociale qu'il fallait faire passer très vite afin de recruter des volontaires opérationnels dès cet été.

Nos travaux ont cependant été interrompus à minuit et demi, alors que nous étions prêts à travailler, à sacrifier notre nuit pour être présents ce matin. C'était mon cas !

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

La séance a été levée avant d'aborder l'article 6, et nous ne savons même pas quand le débat pourra reprendre ! Tout cela est inadmissible !

Monsieur le président, vous nous dites que vous avez tenu en conférence des présidents à faire respecter notre ordre du jour. Alors, nous vous le demandons instamment, n'acceptez pas les injonctions du Gouvernement, montrez que vous voulez défendre cette enceinte.

Cessez d'être des « godillots » !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Monsieur Assouline, vous êtes un jeune parlementaire de talent.

Mais, pour votre information, sachez que, depuis qu'il a été instauré, l'article 49-3 de la Constitution n'a jamais été supprimé et qu'un ancien Premier ministre, au demeurant sympathique, l'a même utilisé vingt-huit ou vingt-neuf fois pendant les deux ans et demi de son Gouvernement. Donc, comme vous pouvez le constater, cet article est bien utile.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Pasqua

M. Charles Pasqua. Qui était ce Premier ministre ?

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C'est une raison supplémentaire de supprimer l'article 49-3 !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le président, mon rappel au règlement a trait également, vous vous en doutez, à l'organisation de nos travaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Le mépris du Parlement de la part du Gouvernement atteint un tel niveau qu'il n'est pas excessif, à mon sens, d'affirmer que l'équilibre démocratique est en passe d'être rompu.

À trop vouloir précipiter, le Premier ministre, avec la bienveillance du Président de la République, de son gouvernement, de sa majorité, oublie que le modèle social français, dont il s'affirme, à qui veut l'entendre, le défenseur, repose sur la prise en compte d'intérêts parfois contradictoires et que ce modèle social nécessite dialogue, concertation et, plus généralement, l'intelligence de la société de notre pays, l'intelligence de notre peuple.

Le contrat première embauche, qui est à la source de la frénésie du pouvoir, est un modèle de non-concertation.

Il n'a pas été discuté avec les partenaires sociaux, ni même avec vos amis du patronat, qui se sont réveillés avec cette bonne surprise qu'ils n'attendaient peut-être pas de sitôt. Un cadeau mal ficelé peut se révéler un cadeau empoisonné.

La jeunesse, première concernée, a-t-elle été consultée ? Pas plus ! Aucune des organisations lycéennes ou étudiantes n'a été reçue par M. de Villepin.

L'ont-elles été par la commission des affaires sociales du Sénat dans son ensemble, et pas seulement par le rapporteur ? Non plus !

Donc, pas de consultation !

Mes amis qui se sont exprimés avant moi l'ont rappelé, les droits du Parlement sont bafoués, le droit d'amendement est menacé, avec la bienveillance du Conseil Constitutionnel. Le pouvoir entre dans une dérive autoritaire.

Je vous signale d'ailleurs que la fébrilité dont vous faites preuve jusqu'ici, ainsi que le Premier ministre, ne fait qu'attiser la colère des jeunes, qui le manifesteront aujourd'hui et le 7 mars prochain.

Aussi, monsieur le président, comme les orateurs précédents, je demande avec solennité une suspension de séance qui, je pense, ne nous sera pas refusée. Je vous demande également la réunion de la conférence des présidents, afin de tenir compte de ce qui s'est passé hier soir et pour prolonger le délai limite pour le dépôt des amendements.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il n'y a pas de rappel au règlement de l'UDF !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Mes chers collègues, M. Jean-Pierre Bel et Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ont demandé une suspension de séance.

Le Sénat va, bien sûr, accéder à leur demande. Nous reprendrons nos travaux à onze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix heures quarante, est reprise à onze heures cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi pour l'égalité des chances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale aux termes de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, après déclaration d'urgence. (n°s 203, 210, 211, 212, 213, 214)

Monsieur Fischer, vous avez demandé le report du délai limite fixé pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.

Je donne la parole à M. le président de la commission des affaires sociales pour vous faire part des conclusions de l'entretien que nous venons d'avoir avec M. le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Étant donné l'intérêt évident que nous portons tous à ce texte, y compris nos collègues de l'opposition, compte tenu de l'engagement pris par l'opposition de ne pas s'engager dans une obstruction systématique, et eu égard au souhait de pouvoir exercer notre mandat de sénateur, quel que soit le jour de la semaine, je ne suis pas gêné par le report du délai limite initialement prévu pour le dépôt des amendements sur ce texte. En effet, si cela s'avérait nécessaire, nous pourrions éventuellement prévoir d'autres jours de débats.

Je propose donc de reporter ce délai limite à seize heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je prends acte de la proposition formulée par M. le président de la commission des affaires sociales.

Vous connaissez le sérieux avec lequel nous travaillons. Nous avions souhaité, pour ajuster tous nos amendements, avoir une complète connaissance de tous les rapports. Nous avons dû être très attentifs à la sortie des rapports. Monsieur le président, vous nous demandez des efforts surhumains !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Savez-vous à quelle heure le rapport de la commission des affaires sociales a été mis en ligne ? À zéro heure cinquante-huit ! Après avoir passé une nuit en séance, nous aurions souhaité que le délai limite soit décalé d'une demi-journée. Les rapports de nos collègues sont très intéressants ; je pense notamment à celui de la commission des lois, qui fait allusion à des suppressions d'articles.

Monsieur le président, on ne peut pas laisser les choses en l'état !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

On va prendre les deux heures qui nous sont accordées, mais cela ne suffit pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Mme Hélène Luc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous êtes en train de dépasser les bornes !

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Non seulement le Gouvernement a empêché la discussion à l'Assemblée nationale du projet de loi pour l'égalité des chances, non seulement, monsieur le président, vous avez accepté que le Sénat avance la date prévue pour l'examen de ce texte - elle est passée du 28 février au 23 février - non seulement, de toute évidence, il a été suggéré à M. Hubert Haenel de retirer sa question orale européenne avec débat sur les restrictions de circulation dans l'Union européenne des travailleurs salariés des nouveaux États membres, question importante, comme le référendum l'a parfaitement démontré - mais vous ne voulez pas discuter de l'Europe au Sénat - mais, de surcroît, vous allez encore plus loin en interrompant, la nuit dernière, l'examen du projet de loi relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Monsieur le président, nous l'avons dit jeudi dernier, vous n'auriez pas dû accepter d'avancer la discussion au Sénat du projet de loi pour l'égalité des chances.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Vous êtes le garant du caractère serein et démocratique de nos débats. Vous devez veiller à ce que ce projet de loi soit examiné dans de bonnes conditions et affirmer le rôle du Sénat.

Je suis sénatrice depuis de longues années. J'ai connu, bien sûr, des reports de discussion, mais ils ont toujours eu lieu pour des raisons valables. Je n'ai jamais connu de changements de l'ordre du jour sans que la conférence des présidents se soit prononcée.

Avec deux retraits successifs de texte à l'ordre du jour, à quoi sert la conférence des présidents ? Mme Borvo Cohen-Seat, présidente de notre groupe, avait voté contre l'avancement de la date d'examen du présent projet de loi. Si la conférence des présidents ne respecte pas ses propres décisions, c'est la démocratie qui est bafouée, et c'est très grave !

Monsieur le ministre, vous aviez le devoir d'assurer la discussion complète de ce texte à l'Assemblée nationale. Cette remarque vaut également pour le Sénat : vous devriez demander que l'examen de ce projet de loi, que vous dites être « pour l'égalité des chances », puisse avoir lieu dans de bonnes conditions, d'autant que le débat n'a pas eu lieu à l'Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Monsieur le président, mes chers collègues, je vous demande, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, l'interruption de nos travaux, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

... car nous voulons travailler d'après les rapports, lesquels n'ont pas encore été tous portés à notre connaissance. Ce projet de loi est trop sérieux pour qu'il en aille autrement !

Hier matin, j'ai dit à Mme Parisot

Ah ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

J'ai tenu, avec plusieurs de mes amis du groupe CRC, à être présente !

J'ai donc dit à la présidente du MEDEF que ce n'est pas la précarité, laquelle atteint des sommets, qui suscitera au sein de la jeunesse des vocations pour la recherche, pour l'industrie, pour l'économie de notre pays.

Je vous renvoie à un sondage qui a été réalisé auprès des jeunes par la JOC, la jeunesse ouvrière chrétienne, et non pas la jeunesse communiste ! -, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

... qui révèle que 87 % des jeunes vivent dans le stress et éprouvent un sentiment de grande insécurité pour leur travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Je termine, monsieur le président !

Une autre enquête révèle que la question du travail est primordiale pour 72 % des Français.

C'est la raison pour laquelle je vous demande de nous permettre d'examiner ce projet de loi de la manière qui convient. Le groupe communiste républicain et citoyen est prêt à y consacrer les heures, les jours, les nuits qui seront nécessaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Nous sommes prêts à y passer tout le week-end s'il le faut !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Nous sommes comptables de nos actions devant la jeunesse et devant les salariés de notre pays.

Vous avez pu constater, hier, que le contrat nouvelles embauches a déjà donné lieu à de nombreux contentieux, et vous verrez qu'il y en aura encore beaucoup d'autres !

Je pense à ce salarié qui a vu son contrat annulé : on lui a fait signer un CNE et il a été licencié du jour au lendemain.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

C'est de cela qu'il est question et nous voulons en discuter sérieusement !

Monsieur le président, nous vous demandons de suspendre nos travaux afin que nous puissions débattre de manière sereine et approfondie de ce projet de loi. Nous souhaitons que le Sénat se prononce par scrutin public.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Madame Luc, je vous rappelle que la conférence des présidents du 9 février a longuement discuté de l'inscription à l'ordre du jour du présent projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Au cours de la discussion, qui a été très vive - celles et ceux qui vous représentaient peuvent le confirmer -, nous avons décidé d'avancer l'examen de ce texte du 28 février au 23 février.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Il s'agissait d'un projet de loi inscrit à l'ordre du jour prioritaire.

Dans le même temps, la conférence des présidents a exigé qu'au lieu des trois jours et demi initialement prévus la durée de la discussion soit portée à sept jours. Le temps a donc été doublé !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Mais on n'a pas eu le temps d'examiner les rapports !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Cet ordre du jour, que j'ai lu en séance, a été approuvé par scrutin public.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Maintenant, vous me demandez une suspension de séance. Talleyrand disait très justement : « Tout ce qui est excessif est insignifiant ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Le Gouvernement est dans l'excès en permanence !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Ce matin, vous avez demandé une réunion de la conférence des présidents. Elle vous a été accordée. Alors, je vous le dis très calmement, n'exagérez pas, d'autant que c'est à votre avantage !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Mme Hélène Luc. Monsieur le président, vous n'oeuvrez pas à l'amélioration du rôle du Sénat !

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

M. le président. Je vous propose une suspension de séance d'un quart d'heure.

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'ai en effet été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC sur la demande de suspension de séance.

Je la mets aux voix.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 86 :

Le Sénat n'a pas adopté.

En conséquence, nous allons aborder l'examen du projet de loi pour l'égalité des chances.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Vous nous aviez annoncé une suspension de séance d'un quart d'heure !

M. Roland du Luart remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d'abord de remercier le président de la commission des affaires sociales du travail de grande qualité qui a été accompli. Je remercie également les rapporteurs des commissions qui ont été saisies pour avis d'un texte à la fois dense et riche, MM. Philippe Dallier, Jean-René Lecerf, Pierre André, Philippe Richert, sans oublier l'excellent rapporteur, M. Alain Gournac. Les conditions de travail et la sérénité lui ont permis d'auditionner l'essentiel des représentants de la jeunesse et des partenaires sociaux de ce pays.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Les échanges ont été riches, intéressants et sereins

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

L'égalité des chances est un grand sujet.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste

Un leurre !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Les leçons de ceux qui, pendant plus de dix ans, ont laissé se dégrader les quartiers de notre pays sont malvenues à cette heure.

Applaudissementssur les travées de l'UMP - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Je vous rappelle ce qu'écrivait la Fondation Abbé Pierre dans son rapport de 2003 : on compte 600 000 logements insalubres de plus par an dans les quartiers en grande difficulté de notre pays. Alors, je vous en prie !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Aujourd'hui, elle dit que vous n'avez rien fait depuis quatre ans !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, l'égalité des chances n'est pas la même selon les origines, les territoires ou l'âge.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Le plus grave, c'est que, souvent, ces inégalités se cumulent, ...

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

...faisant naître une violence sourde, grave, et je ne ferai pas d'allusion à une actualité trop récente.

Dans le même temps, un enfant sur quatre naît dans ce qu'on appelle une zone urbaine sensible. La satisfaction que nous avons de notre taux de fécondité n'est vraie que dans certains quartiers. Pourtant, c'est là que se jouent le dynamisme et l'avenir de notre pays.

Risques de violence et de désintégration républicaine, d'un côté, énergie vitale de notre pays, de l'autre, justifient que, pour la troisième fois, le Gouvernement vienne devant le Sénat présenter un troisième texte.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Le premier texte, monsieur Assouline, c'était la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

C'est comme pour la politique de l'immigration de Sarkozy !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Lequel d'entre vous est capable d'assumer cette contradiction permanente : quand vous êtes maire, vous sollicitez l'agence nationale pour la rénovation urbaine ; quand vous êtes parlementaire, vous votez contre le programme de 20 milliards d'euros, qui est indispensable pour changer l'avenir de ces quartiers.

Applaudissementssur les travées de l'UMP - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Chacun le sait, la ségrégation territoriale dans notre pays est un problème majeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Et ils s'y connaissent en ségrégation territoriale ceux qui ne veulent pas de logements sociaux !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Dois-je vous rappeler que, sous le gouvernement de Lionel Jospin

Exclamations sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

... 28 millions d'euros d'investissement par an étaient affectés à la transformation de nos quartiers ? Actuellement, nous y consacrons 6 milliards d'euros ! Cela a commencé il y a dix-huit mois.

À cet égard, je vous invite à regarder attentivement ...

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...la carte des violences urbaines et celle de la rénovation urbaine. Vous montreriez un peu moins de toupet

Applaudissementssur les travées de l'UMP. -Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il ne s'est rien passé à Neuilly, c'est sûr !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Le Gouvernement a déposé un deuxième texte de loi, car chacun sait que ces sujets réclament de la visibilité et de la durée, dit de « programmation pour la cohésion sociale ».

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt, comme chacun d'entre vous, le texte qu'un certain nombre de villes de Seine-Saint-Denis, notamment, ont récemment adressé au Président de la République.

Il est vrai que certaines villes cumulent l'ensemble des difficultés : elles ont du mal à faire vivre l'égalité des chances sur leur territoire, parce qu'elles sont plus pauvres que les autres et qu'elles ont plus de soucis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Et elles auront encore plus de difficulté avec votre politique !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Je rappelle que la première partie de la loi de programmation pour la cohésion sociale prévoyait un dispositif permettant de faire passer le fonds d'intervention pour la ville à 120 millions d'euros, ainsi qu'une réforme de la dotation de solidarité urbaine de plus de 650 millions d'euros. C'était un changement de donne considérable.

Oui, les villes pauvres de ce pays ont été soutenues par la loi de programmation pour la cohésion sociale ! Que ne l'avez-vous fait plus tôt !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Le deuxième grand sujet abordé par ce texte concernait l'abandon d'un certain nombre de nos compatriotes victimes d'un licenciement économique. Car les licenciés économiques des entreprises de moins de 1 000 salariés étaient abandonnés à leur sort, traités de façon administrative et simplement convoqués une fois par an, sans qu'aucune organisation de soutien n'existe !

Nous avons donc créé les conventions de reclassement personnalisé. Aujourd'hui, 30 000 personnes en bénéficient. (Mme Borvo s'esclaffe.) Oh, vous pouvez rire !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. On le dira aux 30 000 bénéficiaires des conventions de reclassement personnalisé !

Applaudissementssur les travées de l'UMP - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

La circulaire date du mois de décembre et elle n'est même pas appliquée !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Nous avons également mis en place le contrat d'insertion dans la vie sociale, le CIVIS, destiné aux jeunes - 120 000 d'entre eux en ont déjà signé un -ainsi que des plates-formes de vocation, afin que les critères de recrutement concernent non pas le diplôme et le quartier, mais le talent, la compétence et l'habileté. Nous en avons déjà installé soixante-douze dans les ANPE. Manifestement, vous n'en avez pas encore visité !

Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

L'ensemble du territoire national sera bientôt couvert. En outre, 3 200 personnes ont été recrutées dans les ANPE afin d'aider et de suivre les demandeurs d'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Venez voir comment les chômeurs sont traités dans les ANPE !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Cela permettra d'effectuer un suivi mensuel et humain, de réaliser des bilans de compétences...

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

...et de proposer des formations plutôt qu'un traitement administratif.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Oui, la loi de programmation pour la cohésion sociale a enfin prévu la définition d'un service public de l'emploi ! Elle prévoit également de regrouper les prévisions en termes de besoin d'emplois et de formations. Elle associe tous les acteurs. Elle prévoit la mise en place du dossier unique et du guichet unique pour les demandeurs d'emploi, ainsi qu'un accompagnement personnalisé. Tout ce que vous n'avez pas fait !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Très mauvaise intervention ! Vous n'êtes pas en forme aujourd'hui, monsieur le ministre !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Par ailleurs, nous nous sommes inspirés du rapport d'information de Pierre André sur les zones franches urbaines.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Voilà quelques années, les zones franches urbaines avaient été critiquées pour des raisons idéologiques par le gouvernement français, y compris devant les institutions communautaires. C'est tout à fait extravagant !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

À la suite du rapport d'information très objectif réalisé par Pierre André, nous avons prévu de rouvrir des zones franches urbaines...

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

...et de proroger celles qui existent dans les quartiers en très grande difficulté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous voulez que l'on parle du bilan des zones franches urbaines ?

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Nous allons une nouvelle fois assister à une certaine forme de schizophrénie.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

D'un côté, les villes de gauche seront candidates au classement en zone franche urbaine...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Alors que les élus de gauche prétendent que le dispositif ne marche pas !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...et, de l'autre, nous entendrons une expression sénatoriale négative. Nous sommes habitués à un tel fonctionnement !

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

S'agissant de l'égalité des chances, de l'emploi ou des discriminations, vous devriez, me semble-t-il, être plus raisonnables ! C'est l'an 2000 qui fut l'année la plus noire depuis la guerre en matière de logement social !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Voilà quatre ans que vous dites la même chose !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

En 2000, moins de 40 000 logements sociaux ont été financés, contre 80 000 cette année !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Je parle de logements sociaux ! Votre connaissance du logement devrait vous éviter de telles erreurs, monsieur Fischer !

Deux premiers textes ont donc déjà été adoptés ! L'un permet de lutter contre la ségrégation territoriale. En réalité, c'est le plus grand programme jamais réalisé en faveur des quartiers depuis la dernière guerre. Le dispositif avait d'ailleurs été initié voilà quelques années, sous une autre forme, dans le département des Hauts-de-Seine ; c'est le seul département français à l'avoir fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Dans le Val-de-Marne, ce sont 25 000 logements sociaux qui sont supprimés !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Si vous pensez que les équipes de réussite éducative ne sont pas une bonne mesure, parlez-en à M. André Gerin, qui est venu nous solliciter et qui est heureux d'avoir obtenu un financement !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

On n'a même pas pu discuter du choix des collèges prioritaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Qu'est-ce qui est valable dans ce que dit le Gouvernement ? Ce que vous dites, monsieur le ministre, ou ce que dit le ministre de l'intérieur ? M. Sarkozy a son plan pour l'école !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Est-ce que l'on pourrait écouter M. le ministre ? Vous êtes d'une telle intolérance !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Le troisième grand texte vise à mettre en place une égalité de fait.

Le titre Ier du présent projet de loi tend à favoriser l'éducation, l'insertion dans l'emploi et le développement économique.

Il s'agit, en premier lieu, de faciliter l'entrée en apprentissage - ou en découverte des métiers - des jeunes de moins de seize ans, ...

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

...qui, pour des raisons diverses et variées, en ont la curiosité ou l'envie.

Dans ces conditions, la création d'un dispositif d'apprentissage junior doit permettre de retrouver confiance en soi, de bâtir un parcours et de découvrir un univers professionnel.

Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

L'apprentissage junior pour les moins de seize ans, tel qu'il vous est proposé, offre un environnement sécurisé...

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Pour vous, la sécurité, c'est le travail de nuit !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...et facilite à terme la réussite d'un projet professionnel. Il offre également un accompagnement par une équipe pédagogique et laisse ouverte la possibilité de revenir au collège à tout moment pour ceux qui le souhaitent.

Riressur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Cet apprentissage junior repose sur le volontariat du jeune et de sa famille. Il doit être compris comme une opportunité.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

C'est le travail à quinze ans ! Nous voilà de retour au XIXe siècle !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Larcher a eu des échanges riches et nourris avec les professionnels de l'éducation et de la jeunesse et les partenaires sociaux. Il en résulte un texte - celui qui vous est présenté - équilibré et positif !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

La mise en place de ce nouveau dispositif, ciblé sur les jeunes qui souhaitent évoluer ou sortir du système scolaire académique traditionnel, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Vous avouez donc que vous les sortez du système scolaire !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

...est complétée par une série de mesures relatives à l'apprentissage et à l'entrée dans la vie active en faveur de ceux qui le quittent prématurément.

Par ailleurs, notre pays a certes vu l'apprentissage se développer depuis un an grâce...

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

...à la loi de programmation pour la cohésion sociale.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Mais nous avons toujours un taux d'alternance faible. Permettez-moi de rappeler quelques chiffres : on compte 1, 6 million d'apprentis en Allemagne, contre seulement 360 000 en France, et le taux de chômage des jeunes est de 10 % en Allemagne, contre 23 % en France !

Nous avons néanmoins pu constater que les efforts en termes de formation des apprentis, de financement ou de tutorat, réalisés grâce aux avantages comme les 1 600 euros, reposaient essentiellement sur les entreprises de moins de cinquante personnes. C'est notamment le cas dans l'artisanat.

C'est la raison pour laquelle, après avoir confié à M. Henri Lachman, président de Schneider Electric, la mission de mobiliser les grandes entreprises en faveur de l'apprentissage, le Gouvernement prévoit effectivement dans le présent projet de loi une codification et une montée en puissance de 1 %, 2 % ou 3 % du nombre d'apprentis par an. Le taux de 3 % s'appliquera aux entreprises de plus de 250 personnes.

En outre, Gérard Larcher a souhaité qu'une action spécifique de placement des jeunes diplômés des quartiers de zones urbaines sensibles soit mise en oeuvre. Les appels d'offres ont été réalisés et les financements complémentaires du Soutien à l'emploi des jeunes en entreprise, le SEJE, vous sont proposés dans le cadre de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Cela fera plaisir à Peugeot qui vient de licencier 600 jeunes !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

La deuxième proposition du Gouvernement en matière d'emploi est le contrat première embauche, le CPE.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Ce contrat à durée indéterminée a fait l'objet d'un vote à l'Assemblée nationale, dans des conditions tout à fait normales et régulières, après un large débat de quarante-cinq heures. J'observe à cet égard que l'opposition ne s'est mise à faire de l'obstruction...

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Ce n'est pas de l'obstruction ; c'est vous qui passez en force !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

... qu'après, comme si certains avaient eu le sentiment que les discussions loyales qui avaient lieu sur le CPE avaient été mal comprises par l'opinion. Cela explique le déclenchement d'autres procédures.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

Et les onze points de moins de M. de Villepin dans les sondages !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Bref, quel est le sujet qui nous préoccupe tous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

La côte de popularité du Premier ministre !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. D'abord, l'insertion des jeunes dans la vie professionnelle est un sujet européen, même si d'autres pays répondent mieux que nous à ce problème.

Marques d'approbationsur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

De grâce, essayons d'abandonner un certain nombre d'anathèmes ou de vieilles lunes ! Le sujet est essentiel. Nous avons constaté qu'à force de ne pas le traiter l'entrée dans la vie professionnelle se faisait par stages, par intérim ou par CDD. Parfois même, il n'y a pas du tout d'insertion professionnelle. Le taux de chômage des jeunes est de 23 % !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Le rapport entre le taux de chômage des jeunes et le taux de chômage global est resté constant au cours des vingt dernières années. S'il y avait une formule miracle, cela se saurait ! Mais il n'y en a pas.

Le Gouvernement s'est interrogé : comment faire en sorte que le recrutement soit un investissement durable tant pour les jeunes adultes de moins de vingt-six ans que pour les dirigeants d'entreprise ? Telle est la question qui se pose dans ce domaine.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Finalement, le CPE ressemble à s'y méprendre à ce qui se pratique dans la fonction publique. En effet, il existe dans le secteur public une période d'essai de trois mois et une forme de stage d'un an avant la titularisation. Nous sommes bien dans un cas de figure similaire.

Voilà ce que le Gouvernement a souhaité faire, en essayant par ailleurs de répondre à deux ou trois autres questions précises.

La première question portait sur le logement. Offrir des logements implique d'abord d'en construire. Nous nous en occupons et la production de logements a doublé. Pour autant, les jeunes sont dans une situation plus difficile et complexe, ce qui a justifié la mise en place de la garantie « Locapass » pour l'accès au logement.

Nous offrons également aux jeunes un droit à la formation dès le premier jour.

Les délais de préavis seront respectés et les indemnités de rupture seront progressives, comme dans tout CDI traditionnel. Nous apportons simplement de la souplesse, dans le cadre du respect de l'ordre public social, en cas de rupture de part ou d'autre. J'observe d'ailleurs qu'il y a eu plus de rupture de contrats nouvelles embauches de la part du salarié que de celle des employeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Pourquoi ne proposez-vous pas de faire condamner les salariés ?

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Nous prévoyons par ailleurs l'extension des zones franches urbaines, chères à Pierre André. Nous assisterons probablement à une schizophrénie généralisée.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

C'est décidément une très mauvaise intervention ! Vous n'êtes pas en forme, monsieur le ministre !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

En effet, le bilan des zones franches urbaines sera critiqué au sein de la Haute Assemblée, mais le ministère fera l'objet de sollicitations très fortes : chacun voudra en bénéficier dans sa ville ou à proximité. Nous y sommes habitués !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Quelle est la liste ? Elle est déjà arrêtée ?

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Nous luttons également contre les discriminations. Ce combat est notamment mené par Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances. Je suis d'ailleurs heureux d'appartenir à un gouvernement qui a créé un ministère de l'« égalité des chances ». C'est en effet le grand sujet de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

C'est votre grand sujet, mais vous ne voulez pas qu'on en discute à l'Assemblée nationale !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Par ailleurs, nous avons pris un certain nombre de mesures de réorganisation s'agissant de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances ou des moyens d'intervention plus rapides octroyés à la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité. À cet égard, alors que nous étions pratiquement le dernier pays d'Europe à ne pas disposer d'une telle institution, il est extrêmement grave que n'ayez ni soutenu ni voté sa création !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Ce n'est pas vrai ! Nous en avons simplement critiqué la composition !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Comme si la discrimination n'existait pas dans ce pays !

Vous donnez en permanence des leçons, mais quand il s'agit de voter pour la création d'une institution de lutte contre les discriminations, votre réponse est non !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Vous allez voir la leçon que les Français vous donneront en 2007 ! Ce sera une véritable correction !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous serez très mal noté par les Français !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Le titre III du projet de loi crée la responsabilité parentale. Comment établir un lien de confiance avec les familles ? Tel est le sujet que défendra Philippe Bas. Le titre IV concerne le renforcement du pouvoir des maires face aux incivilités et le titre V crée le service civil volontaire.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que Gérard Larcher, Catherine Vautrin, Azouz Begag, Philippe Bas et moi-même nous avons l'honneur de vous présenter, au nom du Gouvernement de Dominique de Villepin, ...

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

...répond à une exigence d'action et à un impératif de célérité.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Qui peut ne pas éprouver une inquiétude sourde, grave, ...

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

...devant la réalité de la vie d'un certain nombre de nos compatriotes ?

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Toutes les mesures qui vous sont proposées, après la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, après la loi de programmation pour la cohésion sociale et les moyens qui y sont affectés

M. David Assouline s'exclame

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

On voit que vous êtes nouveau, monsieur Assouline ! Ici, on est poli et courtois !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Demandez à Dominique Braye de vous expliquer ce qu'est la courtoisie, monsieur About !

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ... concourent à l'affirmation de notre République et visent à redonner l'espérance à ceux qui sont exclus de notre tissu social.

Mme Nicole Borvo s'exclame

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

L'enjeu, ce sont les valeurs de la République. Le risque, c'est la dégradation profonde du tissu social de notre pays. Cela vaut bien, me semble-t-il, que nous acceptions de nous écouter, sans préjugés ni anathèmes.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Le texte qui vous est soumis vise à faire partager notre République à tous. Telle est la politique voulue et annoncée par le Premier ministre.

Applaudissementssur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président. Mes chers collègues, ce projet de loi est important ! Je comprends que les avis divergent, mais dans une assemblée comme la nôtre les débats devraient être empreints d'un peu plus de courtoisie.

(Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

De nombreux jeunes sont présents dans les tribunes et nous ne donnons pas du Parlement l'image qui convient.

Nouveaux applaudissements sur les travées de l'UMP. - Nouvelles protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

C'est le ministre qui nous provoque et c'est à nous que vous faites des remarques !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Calmez-vous, je vous en prie !

La parole est à M. le ministre délégué.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - Permalien
Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, personne ne peut nier aujourd'hui le constat de l'inégalité des chances dans notre pays. En 2006, la grande cause nationale, c'est l'égalité des chances.

Ce projet de loi donne aux pouvoirs publics les moyens de faire de la volonté politique du Premier ministre une réalité, une réalité qui se traduit déjà dans six départements par l'installation des premiers préfets pour l'égalité des chances. C'est du concret, c'est du terrain, c'est de l'efficacité.

Dans ce contexte, je souhaite attirer l'attention du Sénat sur les mesures contenues dans le présent projet de loi en matière de lutte contre les discriminations, lesquelles minent la nation depuis trop longtemps.

En effet, si au mois de novembre dernier le Gouvernement a rappelé son principe de fermeté, sa volonté est aussi de renforcer la possibilité pour nos concitoyens des quartiers les plus en difficulté de voir leurs droits réaffirmés, de se sentir chez eux dans notre pays, dans leur pays.

L'égalité des chances, c'est donc : pas de quartier pour les discriminations ! Pas de quartier pour les discriminations indirectes résultant de l'indifférence ou de l'évitement ; pas de quartier pour les discriminations directes, volontaires : un CV écarté à cause d'un patronyme, un logement refusé en raison d'une origine, l'interdiction d'accéder à une simple discothèque pour délit de « sale gueule ».

Ces discriminations, nous le savons tous, c'est du poison ! Tous les jours, il faut dire et redire qu'elles constituent un délit et à quel point elles nourrissent la défiance, les ressentiments, la rage et, finalement, le communautarisme.

Aujourd'hui, les poursuites judiciaires ne sont le plus souvent engagées que pour les faits les plus graves de discrimination. Or les faits les moins graves, mais les plus nombreux, les plus ressentis dans la vie quotidienne, doivent aussi faire l'objet de poursuites, avec des procédures plus simples et plus rapides.

C'est la raison pour laquelle le projet de loi prévoit de confier un pouvoir de sanction financière à la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité. Ces sanctions, limitées à 1 500 euros pour une personne physique et à 15 000 euros pour une personne morale, seront conditionnées à des constatations et à des procédures contradictoires. Elles s'appliqueront aux discriminations caractérisées par le code du travail et le code pénal et ne pourront se cumuler avec d'éventuelles sanctions judiciaires. De telles conditions éviteront tout arbitraire en clarifiant les rôles respectifs, en cohérence avec le pouvoir judiciaire.

C'est cette crainte de l'arbitraire qui, je le sais, peut faire redouter à certains la pratique du testing, légalisée par l'article 21. La jurisprudence de la Cour de cassation reconnaît la validité des preuves recueillies lors du testing, qui constate une discrimination et ne peut être assimilé à de la provocation. Il reviendra bien évidemment à l'autorité judiciaire comme à la HALDE d'établir le caractère discriminatoire du comportement dénoncé.

Encore une fois, j'y insiste, il est urgent de réagir, il est urgent d'agir. Mais nous attendons également de ces mesures qu'elles aient un effet dissuasif et qu'elles suscitent une prise de conscience, telle l'obligation pour les éditeurs de radio ou de télévision, prévue par l'article 23, de rendre compte au Conseil supérieur de l'audiovisuel de leurs actions pour mieux refléter la diversité de notre société. Il n'y a pas que dans notre équipe nationale de football que l'on doit voir des couleurs !

Très bien ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances

La diversité est une richesse sociale et un atout économique pour nos entreprises.

Le projet de loi pour l'égalité des chances institue aussi un service civil volontaire, afin de donner l'opportunité aux jeunes qui le souhaitent de se former dans un cadre citoyen.

Ce service civil volontaire regroupera les missions d'accueil des jeunes de seize à vingt-cinq ans, labellisées par l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances. Ces jeunes bénéficieront ainsi d'un encadrement, d'une expérience professionnelle et d'une formation, puis, à la sortie, d'un accompagnement vers l'emploi.

Ce service civil permettra la mobilité et le brassage social. Il s'agit d'un véritable marchepied pour les jeunes les moins qualifiés et il pourra, en outre, favoriser leur mobilité. L'objectif est de créer 50 000 emplois dans les deux ans à venir. Ce chiffre inclut les jeunes de l'établissement public d'insertion de la défense, l'EPID, ainsi que les cadets du ministère de l'intérieur.

Mesdames, messieurs les sénateurs, l'enjeu de ces mesures en faveur de l'égalité des chances est très fort. Il s'agit rien de moins que de redonner confiance à toutes les filles et tous les fils de la République dans l'une de ses valeurs les plus fondamentales, l'égalité, afin que plus jamais ne se reproduisent dans notre pays les violences urbaines telles que celles qui ont secoué notre pacte républicain voilà seulement trois mois!

Je souhaite que l'écho et la mémoire de cette désespérance des jeunes soient présents au Sénat tout au long de nos débats.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, avant de présenter le rapport de la commission des affaires sociales, je souhaite faire une rectification. Je ne peux accepter que l'on dise que les mouvements de jeunes n'ont pas été reçus par le rapporteur. Ce n'est pas vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Non, j'ai bien entendu ce qui a été dit !

J'ai reçu l'ensemble des mouvements, à l'exception de l'UNEF. Le matin même du rendez-vous, le président de l'UNEF m'avait indiqué au téléphone qu'un représentant de l'UNEF serait présent à dix heures. J'ai attendu une heure, et personne n'est venu ! J'ai d'ailleurs eu des contacts très intéressants avec tous les autres mouvements de jeunes, et vous devriez vous aussi, chers collègues de l'opposition, les écouter de temps en temps !

(Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Marques d'indignation sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

J'ai même eu un contact tout à fait remarquable avec une organisation qui a été citée tout à l'heure. Ses représentants sont venus pour me parler de l'ensemble du texte, et non pas d'une partie seulement, des discriminations en particulier.

J'en viens au projet de loi. À chaque étape de son histoire récente, la France a réussi à surmonter les barrières sociales, économiques et urbaines grâce à son attachement aux valeurs républicaines, notamment au principe d'égalité. Or, aujourd'hui, ce principe n'est pas bien appliqué.

Nombre de nos compatriotes connaissent l'exclusion sociale, économique, ethnique, ainsi que la ségrégation territoriale. En outre, ces inégalités se cumulent et tendent même à se sédimenter avec le temps.

Les violences urbaines que nous avons connues au mois de novembre dernier sont une conséquence directe de cette situation.

Il est donc urgent, au-delà de la fermeté nécessaire qu'appellent de telles circonstances, de mener une politique dynamique en faveur de la mobilité, de la diversité et de l'activité, une politique qui puisse participer positivement au renouvellement de la société française dans son ensemble. Cette politique en faveur de l'égalité des chances est celle que vise à promouvoir le projet de loi qui nous est soumis.

Nous devons rétablir le bon fonctionnement du pacte républicain et renforcer la cohésion sociale dans notre pays en remédiant aux inégalités actuelles.

Ce projet de loi est l'un des éléments du plan d'action du Gouvernement pour l'année de l'égalité des chances, car c'est ainsi que le Président de la République a décidé de qualifier l'année 2006.

Ce texte s'inscrit dans la continuité des deux grandes lois récemment adoptées pour concourir à la reconnaissance effective du droit à l'égalité des chances : la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 et la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005.

En voulant faire de l'égalité des chances une réalité pour tous, ce projet de loi porte une très haute ambition politique. Le fait que cinq commissions du Sénat s'en soient saisies témoigne à l'évidence de la multitude des domaines dans lesquels des progrès peuvent et doivent être accomplis.

Il me semble en effet que personne ne peut aujourd'hui contester la nécessité de tout faire pour réduire trois grandes fractures de notre société : une fracture de génération, qui se traduit par un taux d'activité des jeunes bien trop bas, de l'ordre de 30 %, ce qui est inférieur de plus de la moitié aux taux de nos voisins européens ; une fracture territoriale, avec des quartiers exposés à toutes sortes de difficultés cumulées, notamment le chômage, l'échec scolaire et la pauvreté économique et culturelle, dans des proportions bien supérieures à la moyenne nationale ; une fracture socio-ethnique, dont l'ampleur ne peut plus être sous-estimée.

Je m'attarderai un instant sur ce dernier point.

Les nombreuses auditions que j'ai menées au cours des derniers jours ont toutes mis en évidence ce phénomène des discriminations : discriminations à l'embauche, discriminations dans l'apprentissage, discriminations dans l'accès au logement, discriminations dans l'accès aux sorties et aux loisirs, les discothèques, les restaurants, et je pourrais citer d'autres cas.

Les organisations étudiantes en particulier, que j'ai pratiquement toutes reçues, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

... sont convenues de la nécessité d'agir dans ce domaine. C'est pourquoi, mes chers collègues, la priorité doit consister à aller dans le sens de la lutte contre les discriminations et de la promotion de la diversité.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

C'est bien le problème ! Il n'y a rien dans ce texte à ce sujet !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Vous connaissez les objectifs de ce projet de loi, M. le ministre vient de les rappeler : l'emploi des jeunes, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

... le développement économique des quartiers, la lutte contre les discriminations et les incivilités, la mobilisation des acteurs des politiques de l'insertion sociale et professionnelle et de l'intégration, l'aide à la parentalité avec la mise en place d'un contrat de responsabilité parentale.

Ces dispositions appellent un certain nombre de remarques de la part de la commission des affaires sociales, que je voudrais vous livrer maintenant, ainsi que plusieurs pistes d'amélioration du texte, que je vous présenterai en même temps.

Sur la première partie du projet de loi, relative à l'apprentissage et à l'emploi, nous ne devons plus nous résoudre à ce que trop de jeunes sortent du système éducatif sans qualification. Le taux d'échec s'élève actuellement aux alentours de 15 %, ce qui n'est pas acceptable.

Aussi, il nous paraît tout à fait judicieux d'avoir choisi l'apprentissage comme l'une des pistes à développer. Il propose en effet une vraie découverte des métiers et permet de préparer une insertion professionnelle réussie.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Pour ce qui est du CPE, je suis intimement persuadé qu'il constitue une opportunité exceptionnelle pour les jeunes.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Je vous rappelle que plus de 300 000 CNE ont été signés à ce jour et qu'on nous avait dit que cela ne marcherait pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Il est vrai que 300 000 contrats signés, cela ne compte pas !... Vous l'expliquerez aux jeunes !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

C'est un dispositif souple : il procure un contrat à durée indéterminée...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac. ... et dans des conditions valablement encadrées. En effet, si la période de consolidation de deux ans peut être interrompue par l'employeur, ou par le salarié, d'ailleurs, la rupture du contrat reste soumise aux dispositions de droit commun du code du travail. À titre d'exemple, un employeur ne pourra mettre fin au contrat d'une jeune femme enceinte pour ce seul motif.

Exclamations indignées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. Certains des jeunes que j'ai rencontrés - pas tous, naturellement, mais un certain nombre tout de même - ont compris l'intérêt de ce nouveau contrat, car il va leur permettre de rompre avec la précarité des CDD - parce que c'est cela que vous voulez ! -, des stages et des missions d'intérim.

Brouhaha sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac. Vous pourriez écouter l'avis de la commission des affaires sociales, mes chers collègues.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Je vous interromprai de la même manière quand vous interviendrez tout à l'heure !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Un jeune qui pourra prendre de l'assurance et donner toute sa mesure dans un véritable emploi sera forcément conservé par l'entreprise qui l'a recruté. L'entreprise y aura tout intérêt !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Avec l'emploi et l'apprentissage, la lutte contre les discriminations est l'un des sujets majeurs, que notre commission estime prioritaire. Elle a d'ailleurs décidé d'envoyer un signal fort, tant au Gouvernement qu'à l'ensemble de nos concitoyens, en adoptant trois amendements sur ce thème.

Le premier amendement vise à instituer un contrôle des pratiques discriminantes dans l'apprentissage, monsieur le ministre, parce que j'ai pu constater ce qui se passait. Les conclusions d'un récent rapport, dont vous avez dû prendre connaissance, montrent que la situation est grave.

Le deuxième amendement a pour objet d'ouvrir la possibilité d'une mesure de la diversité dans les entreprises et de son évolution, dans le respect de l'anonymat et des préconisations de la commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL ; il faut bien partir d'une base, à partir de laquelle nous verrons si la situation évolue positivement ou non. Cet amendement a été adopté en concertation avec la commission des lois et son rapporteur pour avis, Jean-René Lecerf, avec lequel j'ai travaillé.

Le troisième amendement tend à demander l'établissement d'un rapport, après concertation avec les partenaires sociaux, sur les possibilités de transposition dans le code du travail de la charte de la diversité dans l'entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Concernant les dispositions du projet de loi portant sur les zones franches urbaines, je voudrais d'abord évoquer devant vous le succès rencontré par les quatre-vingt-cinq ZFU existantes. Une étude très récente de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, montre qu'en termes de création d'entreprises et de création d'emplois les ZFU ont un impact très positif.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Ce n'est pas vrai ! Tout à l'heure, je donnerai les vrais chiffres !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Vous le direz à la DARES !

Plus de 13 500 établissements bénéficient du dispositif, ce qui correspond à près de 70 000 salariés. Pour vous, 70 000 salariés, ce n'est rien du tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous en avez mis un million et demi au chômage !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Équilibré, le dispositif proposé nécessite toutefois quelques adaptations, afin d'en améliorer l'efficacité et la lisibilité. L'approche privilégiée par la commission des affaires sociales, en coopération étroite avec les rapporteurs pour avis des commissions des affaires économiques et des finances, Pierre André et Philippe Dallier, a été de maintenir autant que possible les règles existantes, la stabilité juridique constituant un atout essentiel pour la réussite du système.

C'est la raison pour laquelle nous avons parfois préféré rétablir la situation antérieure, lorsque les modifications proposées par le projet de loi ne sont pas de nature à accroître de manière substantielle l'efficacité du dispositif. Je pense par exemple à l'extension des exonérations aux entreprises de moins de 250 salariés, au lieu de 50 aujourd'hui.

En revanche, je crois essentiel de proposer des parcours de formation adaptés aux demandeurs d'emploi dans les zones urbaines sensibles, les ZUS, afin d'améliorer leur possibilité d'entrée dans l'entreprise et de permettre l'embauche locale par les entreprises implantées en ZFU. Interrogés lors d'une enquête réalisée sur l'initiative de la délégation interministérielle à la ville, les chefs d'entreprise ont en effet indiqué avoir rencontré des difficultés importantes dans le recrutement, en raison principalement du très faible niveau de qualification de la population active dans les ZUS. Un amendement aura pour objet de remédier à cette situation.

Le même pragmatisme nous a guidés pour ajuster les procédures d'autorisation d'implantation des cinémas de type multiplexe ou de commerces. Les amendements que la commission des affaires sociales a adoptés sont le résultat d'un compromis entre la volonté de lever les freins à la dynamisation des activités commerciales dans les zones franches urbaines et la nécessité de permettre aux élus locaux, et notamment aux maires, de conserver un pouvoir de décision sur les projets en cours, même si l'on nous dit que le maire intervient dans la délivrance du permis de construire. Je crois que le maire doit pouvoir intervenir bien avant le permis de construire, tout au début du projet ; il en va de l'intérêt général.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Le maire doit donc conserver un pouvoir de décision sur les projets en cours afin d'en garantir la cohérence et la pertinence, au service de l'intérêt général. C'est pourquoi nous proposerons une simplification et un allégement des procédures, plutôt qu'une suppression pure et simple des autorisations, qui pourrait déboucher sur une désorganisation des activités commerciales dans ces quartiers et mettre en péril les petits commerces.

Au sujet de la création de la nouvelle Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, je voudrais vous faire part de mon sentiment après les auditions conduites sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Personne ne me semble contester le principe de la création de cette nouvelle agence, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

... même si elle intervient un peu plus tôt qu'on ne le pensait.

En effet, l'idée de fédérer, à l'image de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, mais pour « l'humain » et non plus « l'équipement », les moyens accordés aux politiques d'intégration et d'insertion sociale et professionnelle est une bonne chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Le personnel du Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations, le FASILD, qui constituera le nouveau pilier de l'agence a exprimé des inquiétudes. Celles-ci semblent aujourd'hui levées, les missions de l'agence ayant été clarifiées dans le sens souhaité.

Reste le problème non résolu pour l'instant de l'échelon local d'intervention de la nouvelle agence. J'espère que ce point sera rapidement clarifié et que vous pourrez nous donner des précisions sur cette question, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

À l'avenir, il faudra également sans doute continuer à fédérer autour de cette nouvelle agence les acteurs des politiques concernées, comme par exemple une partie de la DIV, ou la délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité du territoire.

J'en viens maintenant au contrat de responsabilité parentale. Conclu entre le président du conseil général et la famille, il vise à offrir une voie intermédiaire entre la médiation familiale, qui suppose une démarche volontaire des parents, et la tutelle aux prestations sociales ou, plus largement, les mesures contraignantes qui relèvent du domaine de la protection de l'enfance.

Dans un cadre coordonné, les parents se verront proposer un accompagnement approprié à leurs difficultés, pour leur permettre de se conformer à leurs devoirs d'éducation. Les parents s'en trouveront responsabilisés. En effet, en cas de non-respect du contrat, ils s'exposent à des sanctions qui vont de l'amende à la mise sous tutelle de leurs prestations, en passant par la simple suspension.

Les amendements acceptés par le Gouvernement à l'Assemblée nationale n'ont pas modifié de façon sensible ce dispositif : ils ont précisé les autorités susceptibles de saisir le président du conseil général en vue de la conclusion d'un contrat en y ajoutant le maire ; j'y suis très favorable. Ils ont également encadré la procédure de suspension des prestations familiales, en fixant la durée maximale à trois mois - j'avais proposé deux mois, mais trois mois me conviennent parfaitement -, renouvelable pendant un an.

Je partage totalement la philosophie de ce nouveau dispositif. Je vous rappelle toutefois que le contrat de responsabilité parentale doit rester un outil parmi d'autres au sein de la palette des mesures de protection de l'enfance.

Le dernier sujet sur lequel je voudrais vous faire part de mes observations est celui du renforcement des pouvoirs de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE. Cette autorité a été mise en place il y a environ un an. Elle est l'objet de grandes attentes, comme j'ai pu le constater au cours de mes auditions, mais aussi d'un certain nombre de frustrations. Afin de lui permettre d'asseoir son rôle et son autorité, le Gouvernement a prévu de lui donner, au travers de ce projet de loi, un pouvoir de sanction pécuniaire. Sur le fond, je pense que c'est effectivement une bonne chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Trop de discriminations restent impunies. On ne compte qu'une quarantaine de condamnations pénales par an en matière de discrimination ! Les sanctions de la HALDE pourront remédier à cette situation et inciter fortement les acteurs concernés à se montrer plus vigilants.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Toutefois, comme il s'agit d'une matière exclusivement pénale, le dispositif du projet de loi, même amélioré par l'Assemblée nationale, ne me paraît pas offrir toutes les garanties au regard de la Constitution. La commission des affaires sociales a décidé sur ce point de s'en remettre aux conclusions de la commission des lois, qui a procédé à une analyse extrêmement approfondie du mécanisme et qui présente des propositions constructives et utiles sur cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le texte que nous examinons a une véritable cohérence.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Loin d'être une enveloppe « fourre-tout », il prend le parti de s'attaquer aux inégalités dans les différents domaines où elles se manifestent, pour parvenir à les réduire.

La commission des affaires sociales se félicite qu'il en soit ainsi. Elle vous invite, mes chers collègues, à soutenir le Gouvernement sur ce texte, sous réserve des amendements qu'elle vous proposera au cours de la discussion des articles.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Philippe Richert, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour faire de l'idéal d'égalité des chances une réalité pour tous, le présent projet de loi vise, comme cela vient d'être souligné, à mobiliser tous les leviers d'action.

La commission des affaires culturelles s'est prononcée sur des dispositions qui tendent notamment à relever le défi de la réussite éducative, de l'intégration et de la cohésion culturelle et sociale.

Si l'égalité des chances est le socle de notre pacte républicain, l'éducation est sans nul doute à la base et au coeur de ce défi. L'enjeu est de taille, quand 150 000 jeunes quittent chaque année notre système éducatif sans diplôme ni qualification, près de 30 % d'entre eux se trouvant au chômage dans les années qui suivent cette sortie précoce ; en outre, 15 000 enfants de quatorze à seize ans sont déjà en situation de rupture avec l'école, avant même la fin de leur scolarité obligatoire.

C'est pourquoi nous nous devons non seulement d'élaborer des textes et d'avancer des idées, mais aussi d'apporter des réponses concrètes. La création de la formation d'apprenti junior en est une, qu'il nous faut envisager avec précaution et encadrer de garanties solides pour en assurer le succès.

En effet, les voies de la réussite ne sauraient être uniformes. À la diversité des élèves, de leurs talents et de leurs attentes doit correspondre une pluralité de parcours.

La loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école a consacré des premières mesures allant en ce sens, en vue de mener 100 % des jeunes à une qualification reconnue. La mise en place de l'apprentissage junior, dès la rentrée de 2006, prolongera et approfondira ces avancées, en apportant aux jeunes une chance nouvelle de réussite.

Certes, nul ne prétendrait présenter cette formation comme la panacée au problème complexe et multiforme de l'échec scolaire. Toutefois, elle donnera une chance de plus à certains jeunes qui ne s'épanouissent pas au collège dans le cursus général. En effet, on le sait bien, notre enseignement privilégie davantage l'abstraction que celui d'autres pays ; il valorise les savoirs plus que les savoir-faire.

Or une approche plus concrète et plus active, un changement de lieu et de rythme, le contact avec des adultes qui les valorisent et les responsabilisent permettent bien souvent à des jeunes de retrouver goût et motivation pour des apprentissages dont ils redécouvrent le sens. Nous devons leur apporter des solutions le plus tôt possible, avant qu'ils n'entrent durablement dans la spirale du « décrochage ».

Par ailleurs, les dispositifs actuels de préapprentissage, les classes d'initiation professionnelles en alternance, les CLIPA, et les classes préparatoires à l'apprentissage, les CPA, sont devenus peu lisibles, peu attrayants, et sont tombés en désuétude, en dépit de l'intérêt qu'ils présentent. Au contraire, l'apprentissage junior, qui les remplacera et les rénovera, permettra d'apporter une réponse fondée sur plusieurs principes essentiels.

Tout d'abord, cette formation, à vocation qualifiante, s'adressera à des élèves volontaires auxquels sera garanti, à tout moment, un « droit au retour » au sein du cursus scolaire ordinaire au collège.

En outre, la formation comprendra deux étapes : une première phase de préparation et de découverte des métiers se déroulera, et ce point est important, sous statut scolaire ; ensuite, la signature d'un contrat d'apprentissage ne sera possible qu'à partir de l'âge de quinze ans. Le champ des dérogations déjà prévues par le code du travail, dont bénéficient aujourd'hui près de 26 000 apprentis, soit environ 10 % des effectifs, sera de fait étendu.

Enfin, la formation s'inscrira pleinement dans le cadre de la scolarité obligatoire, en donnant la priorité à l'acquisition du socle commun de connaissances et de compétences. À cet effet, l'apprenti junior bénéficiera d'un suivi individualisé par le tuteur, dans le cadre d'un projet pédagogique personnalisé.

Ainsi, l'apprentissage junior tend à concilier l'unité des exigences que reflètent le socle et la pluralité des parcours de réussite, qui est indispensable pour assurer l'égalité des chances au sein du collège unique.

Il me semble important d'insister maintenant sur quelques autres conditions qui devront être réunies pour garantir la qualité et la réussite de cette formation.

D'abord, la continuité entre l'école et le monde professionnel doit être davantage mise en exergue.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Nous savons bien qu'un trop large fossé sépare encore l'entreprise de l'éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'apprentissage junior doit bien apparaître comme une poursuite de la scolarité obligatoire par d'autres moyens, et non comme une rupture avec le système éducatif.

Il est indispensable, en effet, que l'éducation nationale soit plus présente dans l'entreprise, et, réciproquement, que les entreprises se sentent davantage impliquées dans la formation pédagogique, comme c'est le cas dans le système dual allemand.

Je présenterai un amendement allant dans ce sens et visant à renforcer la liaison entre le tuteur pédagogique et le tuteur en entreprise ou le maître d'apprentissage. Ce « tandem » assurera le suivi de l'apprenti junior tout au long de sa formation.

Ensuite, l'apprentissage junior doit être un tremplin permettant à des jeunes de remettre le « pied à l'étrier ». Il faudra, pour cela, développer des passerelles, afin de leur ouvrir des perspectives de poursuite d'études au-delà du certificat d'aptitude professionnelle.

Enfin, il est nécessaire, au préalable, d'améliorer la connaissance et l'image de l'apprentissage et des métiers préparés auprès des élèves, des familles et des personnels de l'éducation nationale.

À cet égard, mes chers collègues, tant que les recteurs et les inspecteurs d'académie continueront d'évaluer les collèges à l'aune de la proportion d'élèves poursuivant leurs études dans la voie générale, nous resterons loin d'une revalorisation de l'image de la voie professionnelle et de l'apprentissage.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre

Vous avez raison !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je souhaiterais que le ministre de l'éducation nationale veille à faire passer ce message, sinon tout ce que nous pourrons dire n'aura que peu d'effet sur le terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je présenterai en outre des amendements visant à prévoir une compensation des dépenses nouvelles qui seront mises à la charge des départements au titre du transport scolaire des apprentis juniors en formation initiale, à encourager le développement des activités sportives dans la filière de l'apprentissage et à exclure le revenu de l'apprenti de la détermination du revenu social du foyer, ouvrant droit à la couverture maladie universelle, alors que sa prise en compte pourrait pénaliser certaines familles modestes.

Mes chers collègues, l'école et les enseignants ne peuvent répondre seuls aux situations les plus difficiles. Nous le savons, les parents ont un rôle déterminant à jouer. Leur soutien et leur autorité sont un facteur clé pour la réussite scolaire et éducative de l'enfant et pour sa bonne insertion dans la société : c'est ce que rappelle le contrat de responsabilité parentale, défini à l'article 24 du présent projet de loi. La mise en oeuvre de ce contrat est confiée au président du conseil général. Je souhaiterais, avec d'autres, que celui-ci puisse disposer d'une marge d'appréciation pour décider de l'opportunité de proposer un tel contrat.

Je tiens par ailleurs à insister de nouveau, à l'occasion de ce débat, sur le rôle central du dispositif d'aide sociale au regard de la promotion de l'égalité des chances au sein de notre système éducatif. Lors de la dernière discussion budgétaire, j'avais rappelé, dans mon rapport pour avis sur l'enseignement scolaire, ce que représentent les bourses scolaires à l'échelon du collège : dans le cas d'une famille de deux enfants, le plafond de ressources pour pouvoir prétendre à une bourse de collège est fixé à 900 euros par mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Cela ne suffit pas pour pallier les inégalités. Je pense qu'il faudra s'en souvenir lors du prochain débat budgétaire, et faire en sorte que, ensemble, nous puissions répondre aux attentes.

Protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

C'est vous qui avez voulu cette situation !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Ne nous trompons pas de débat, mes chers collègues ! Il s'agit ici non pas d'une discussion budgétaire, mais de l'examen d'un texte relatif à l'égalité des chances. Néanmoins, j'estime que, dans un tel débat, même s'il ne s'agit pas d'un projet de loi de finances, il convient de tenir compte des réalités que je viens d'évoquer et de faire en sorte que nous puissions les infléchir ultérieurement.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Vous ne voulez pas le changement ! Vous n'accepterez aucun de nos amendements, nous le savons ! M. Sarkozy a d'ailleurs fait d'autres propositions que les vôtres : lesquelles sont valables ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Je vous remercie d'être aussi attentive à mes propos, madame Luc.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

J'aborderai, pour conclure, au-delà du pari central de la réussite éducative, les autres dispositions sur lesquelles la commission des affaires culturelles a prononcé un avis, qui se rattachent aux articles 13, 23 et 28 du projet de loi.

L'article 13 traduit le souhait du Gouvernement d'inciter les exploitants cinématographiques à investir dans les zones franches urbaines et à renforcer ainsi l'animation culturelle au sein de ces quartiers.

Dans sa rédaction initiale, cet article prévoyait de dispenser d'autorisation préalable les projets d'équipement cinématographique de type « multiplexe ». La commission des affaires culturelles est attachée au maintien du régime d'autorisation existant.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Nous proposerons cependant, à l'instar, d'ailleurs, des autres commissions compétentes, d'en alléger le dispositif pour les zones franches urbaines, en réduisant de quatre mois à deux mois les délais impartis tant aux commissions départementales qu'à la Commission nationale d'équipement commercial.

L'article 23 vise, quant à lui, à modifier trois articles de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Il tend ainsi à favoriser la cohésion sociale et la lutte contre les discriminations dans le domaine de l'audiovisuel.

J'attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait que ce dispositif, conformément aux voeux émis par le Haut Conseil à l'intégration, s'inscrit non pas dans une politique de quotas, mais, au contraire, dans une logique incitative, que j'estime particulièrement bien adaptée aux contraintes spécifiques du secteur.

Enfin, j'évoquerai ce moyen de renouveler le lien social et d'offrir des perspectives d'avenir aux jeunes qu'est le service civil volontaire, lequel concernera tous les jeunes âgés de seize à vingt-cinq ans : 30 000 jeunes devraient en bénéficier en 2006, et 50 000 en 2007. Ce dispositif me semble devoir permettre non seulement de redonner un nouvel élan à la vie associative, mais aussi d'ouvrir à nos jeunes des perspectives d'insertion.

Sous réserve de l'adoption des amendements que je présenterai, la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption du présent projet de loi, car il est indéniable que celui-ci constitue une véritable rupture au regard d'un certain nombre d'évolutions ayant érodé jusqu'aux valeurs les plus centrales de notre pacte républicain. Les mesures présentées, qui vont à l'encontre de certains dogmes ou pratiques ayant montré leur inefficacité, peuvent, et c'est légitime, susciter le débat. Entourées des précautions nécessaires, elles ont toutefois le mérite d'offrir des pistes nouvelles pour donner une portée concrète à l'objectif de promotion de l'égalité des chances.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Pierre André, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre André

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans la lignée des travaux qu'elle a menés sur la politique de la ville, la commission des affaires économiques s'est saisie pour avis de deux dispositions du projet de loi pour l'égalité des chances qui intéressent directement le renouveau économique des quartiers en difficulté : la relance des zones franches urbaines et les modalités de la prochaine contractualisation entre l'État et les villes, avec la création de l'Agence nationale pour la cohésion sociale.

Ces dispositions trouvent, certes, leur origine dans l'urgence née de la situation explosive que nous avons connue cet automne, mais elles s'inscrivent aussi, et surtout, dans la continuité des politiques menées depuis 2002 en faveur de ces quartiers, sous l'impulsion du ministre de la cohésion sociale Jean-Louis Borloo. Elles sont en effet marquées par un effort sans précédent en matière de rénovation urbaine, ainsi que par une réforme de la dotation de solidarité urbaine - on en parle trop peu ! -, dotation si importante pour nos communes les plus pauvres et que nous devons préserver au nom de la solidarité nationale envers les communes en grande difficulté.

Le constat, nous le connaissons tous ! Vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, dans ces quartiers les plus en difficulté, on observe parfois un taux de chômage de 40 % chez les jeunes de moins de 25 ans et un revenu moyen par habitant inférieur de plus de 40 % à la moyenne nationale.

Pour remédier à cette situation, il n'existe pas de formule miracle. C'est un ensemble de mesures contenues dans cette loi pour l'égalité des chances qui nous permettront de faire disparaître les difficultés que nous connaissons.

Cette situation doit nous inciter tous, en tant que responsables politiques, à proposer des solutions crédibles pour réintégrer ces quartiers à l'intérieur de nos villes.

L'achèvement de la carte des zones franches urbaines proposée par le projet de loi repose sur une conviction et sur un constat.

Cette conviction, c'est la nécessité de modifier l'image de ces quartiers et de combattre l'exclusion économique pour lutter contre l'exclusion sociale.

Le constat, au-delà de toute polémique, la commission des affaires économiques l'avait dressé en 2002. À cette époque, nous avions dénombré plus de 45 000 emplois créés. Aujourd'hui, avec les nouvelles zones franches urbaines, on peut considérer que 70 000 à 80 000 emplois ont été créés.

Au-delà de ces chiffres, il faut prendre conscience que les zones franches urbaines ont contribué à transformer des cités dortoirs en pôles de développement économique.

J'ai eu l'occasion de rencontrer la plupart des maires qui bénéficient d'une zone franche urbaine ; on en compte quatre-vingt-cinq en France actuellement : pas un seul d'entre eux ne nous a demandé de supprimer cette zone franche urbaine dans leur commune. Et je crois même savoir que les candidatures sont nombreuses pour les quinze nouvelles zones franches urbaines qui doivent être créées. Je vous souhaite bon courage, monsieur le ministre, quand vous aurez à faire un choix !

À l'évidence, la commission des affaires économiques souscrit pleinement, dans son principe, au dispositif qui est proposé. Elle présentera des amendements pour améliorer certains points.

Pour les zones franches urbaines, comme pour l'Agence nationale pour la cohésion sociale, il est important de remettre au coeur de la politique de la ville les élus locaux et les maires en particulier.

L'une des mesures qui nous sont soumises concerne les commissions départementales d'équipement commercial, qui décident de l'implantation des surfaces de moins de 1 500 mètres carrés. On nous demande aujourd'hui de présenter directement ces dossiers en commission nationale d'équipement commercial, ce qui me semble tout à fait contraire à notre volonté commune. Nous ferons des propositions à cet égard.

Nous souhaitons par ailleurs, monsieur le ministre, que vous puissiez nous éclairer sur les positions de la Commission européenne, qui doit émettre un avis sur ces nouvelles dispositions. Les gouvernements précédents sont allés plaider l'arrêt des zones franches urbaines à Bruxelles. Votre tâche n'est pas facile, je le conçois parfaitement, mais nous vous appuierons dans vos démarches.

Enfin, je souhaite redire ici avec force que les acteurs économiques ont besoin, sur le terrain, de sécurité juridique. Il nous a été rapporté à nouveau, au cours des auditions auxquelles nous avons procédé, que les interprétations des textes divergent entre les services fiscaux et les services sociaux, ce qui est tout à fait inacceptable.

J'en viens brièvement à l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances. Cette création répond à notre souhait que la politique ambitieuse de rénovation urbaine soit soutenue par des actions d'accompagnement social des populations. Cette Agence doit permettre de simplifier les procédures et de mutualiser les financements, ce que demande instamment le monde associatif. Nous souhaitons, pour notre part, qu'elle s'engage de manière pluriannuelle dans le financement des contrats qui prendront, à partir de cette année, la relève des contrats de ville.

Pour conclure, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption de ce projet de loi, sous réserve des amendements qu'elle présentera.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

J'ai reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions relatives au tourisme.

J'informe le Sénat que la commission des affaires économiques m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à cette commission mixte paritaire.

Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.