Madame la sénatrice, je vous le dis franchement, je ne souscris pas au terme de « décentralisation ». Pour ma part, je me place dans le cadre du pacte de 1945. Notre système de santé, parce qu’il est un système régalien, assure le même taux de prélèvement et le même niveau de prestations sur l’ensemble du territoire. Il n’existe pas de convention régionale entre les médecins et l’assurance maladie. Alors, employons les termes qui conviennent !
Vous affirmez par ailleurs que votre proposition, tout bien pesé, préfigure ce que pourrait être un ORDAM – sujet particulièrement cher au président de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, M. Pierre Méhaignerie.
Ce débat, qui, je le répète, est loin d’être médiocre, soulève de véritables difficultés de réalisation. Madame Demontès, je serais tentée de vous dire : bâtissons les ARS ! Car, s’il ne faut pas exclure a priori la création des ORDAM, il convient au préalable de s’assurer que leur fonctionnement pourra s’asseoir sur des structures régionales. Alors, installons les ARS, vérifions leur viabilité et leur faisabilité, et expérimentons peut-être, dans une ou deux régions, un ORDAM. D’ailleurs, on pourrait même envisager des « parts » d’ORDAM.
Si j’émets des réserves de fond, c’est que je considère que nous ne sommes pas prêts. Ce débat est avant tout technique, mais il requiert une consultation citoyenne et, bien entendu, un débat parlementaire approfondi. À cet égard, votre amendement est grandement prématuré.
Enfin, je veux porter à votre connaissance un certain nombre d’éléments techniques sur la péréquation interrégionale.
La mise en place de la tarification à l’activité, la T2A, qui a modifié le mode de financement des établissements, lève une partie de vos préoccupations. Il est exact que certains établissements hospitaliers rencontraient des difficultés parce que les dotations globales ne tenaient pas compte de leur activité. La T2A constitue un grand progrès dans la mesure où ce mode de financement, plus juste, permet de répondre à votre souci d’atténuer les disparités territoriales.
Les établissements qui ont une activité forte et sont situés dans des régions considérées comme « sous-dotées » à l’époque de la dotation globale bénéficient désormais de financements qui s’adaptent automatiquement à l’accroissement de leur activité et leur permettent de répondre aux besoins de la population sans qu’il soit nécessaire d’en passer par un mécanisme de dotation ajustée par des indicateurs.
L’annexe 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, que vous avez sûrement lue très attentivement, montre par ailleurs l’intensité des échanges interrégionaux de patientèle, lesquels, au demeurant rendraient vaine la notion de pilotage régional.
Seule une partie du financement reste assurée par des dotations, notamment ce qui relève des missions d’intérêt général. Mesdames, messieurs les sénateurs, j’attire votre attention sur le fait que ces missions, à l’intérieur de l’ONDAM hospitalier, croissent beaucoup plus vite que les tarifications à l’activité, pour répondre à un souhait formulé par beaucoup d’entre vous.
L’année dernière, les ressources des missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation, les MIGAC, ont progressé de 5, 6 %. La partie mission d’intérêt général est intégralement affectée à l’hôpital public. Par ailleurs, seuls 13 % de la partie d’aide à la contractualisation sont attribués à l’hospitalisation privée. Même si certains peuvent le regretter, les MIGAC sont, dans leur quasi-totalité, des financements publics et augmentent beaucoup plus vite que la tarification à l’activité.
Les MIGAC n’ont pas toutes un caractère régional. Certaines activités de recherche et de recours sont exercées à l’échelle nationale. Toutefois, dans la lignée de ce que vous proposez, un mouvement de rééquilibrage important a commencé en 2009 en ce qui concerne les missions d’intérêt général à caractère régional, comme le montre le rapport annuel sur les MIGAC qui est transmis au Parlement.
En ce qui concerne la prévention, les groupements régionaux de santé publique, les GRSP, disposent d’enveloppes régionales abondées par l’État, l’assurance maladie, mais aussi, très souvent, les collectivités locales, pour mettre en œuvre les programmes régionaux de santé publique, lesquels sont adoptés après une large concertation.
Madame Demontès, vous avez soulevé de vraies questions conceptuelles qui ont permis l’ouverture d’un débat intéressant, même s’il est prématuré. Vous comprendrez que, au nom des arguments que je viens de développer et des éclaircissements que je vous ai apportés, je ne peux pour l’instant qu’être défavorable à votre amendement.