Intervention de Guy Fischer

Réunion du 15 novembre 2009 à 15h30
Financement de la sécurité sociale pour 2010 — Article 38

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

« La grande injustice dont sont victimes en France les femmes qui travaillent [...] : 56 % des femmes mises à la retraite à 65 ans n’ont cotisé au régime de retraite que pendant 25 ans à peine. Pourquoi cela ? Parce qu’elles ont admirablement rempli leur devoir de mères de familles, qu’elles sont restées au foyer pour élever leurs enfants en bas âge, et qu’elles n’ont commencé à travailler qu’après que ces enfants eurent été élevés. »

Au-delà de leur caractère désuet et un brin sexiste, qui témoigne du contexte historique dans lequel ils ont été tenus, ces propos témoignent de ce qui fut, dès son origine, en 1971, les motivations de la création de la MDA. Car il s’agit d’un extrait du discours qu’a prononcé le 1er décembre 1971 le ministre de la santé publique et de la sécurité sociale de l’époque, Robert Boulin.

Il est clair que la majoration de durée d’assurance est une mesure de justice sociale, qui a exclusivement une vocation réparatrice.

Il s’agit de compenser, une fois l’âge de la retraite atteint, les inégalités salariales dont les femmes de notre pays ont été victimes, soit en raison de leur maternité, soit en raison de « leur manque de concentration » ou de disponibilité résultant de cette maternité, ou, pis encore, en raison de leur capacité physique, réelle ou présumée à enfanter.

Force est de constater que, depuis quarante ans, rien n’a vraiment changé. Selon une étude menée par l’Observatoire des inégalités au mois de janvier dernier, tous temps de travail confondus, le salaire des femmes équivaut en moyenne à 73 % de celui des hommes. Les femmes touchent donc en moyenne 27 % de moins que les hommes...

Cela provient d’abord d’une inégalité dans les types de contrat, ou plus précisément dans les différences de temps de travail, puisque les femmes travaillent cinq fois plus souvent à temps partiel que les hommes. De plus, le temps de travail des hommes est aussi accru par les heures supplémentaires qu’ils effectuent plus souvent que les femmes. Pourtant, en comparant des salariés et des salariées à temps complet, on voit que les femmes perçoivent encore 19 % de moins.

En effet, à temps de travail et à poste égal, l’écart de rémunération demeure et varie entre 10 % et 25 %. Cela résulte, il faut le dire clairement, d’une discrimination pure et simple.

Cette discrimination a un impact considérable sur la retraite des femmes. Le montant moyen de la retraite des femmes représente 62 % de celle des hommes et 50 % des femmes à la retraite touchent moins de 900 euros, alors que ce n’est le cas que pour 20 % des hommes. Trois femmes sur dix doivent attendre soixante-cinq ans pour bénéficier d’une carrière complète.

Victimes de discrimination au travail, elles en sont encore victimes une fois à la retraite. C’est une forme de double peine !

C’est pourquoi nous ne pouvons accepter la mesure proposée par l'article 38.

Nous considérons qu’en lieu et place il fallait prendre des mesures effectives pour lutter contre ces inégalités, en renforçant, par exemple, les contrôles et les sanctions à l’encontre des employeurs qui ne respectent pas le principe d’égalité que la loi leur impose.

Monsieur le ministre, votre mesure aura immanquablement pour effet de réduire le montant des pensions des femmes. Ainsi, sous prétexte de lutter contre une forme d’inégalité – nous reviendrons sur cette question –, vous allez laisser perdurer jusque dans la retraite une inégalité débutée au travail. C’est inacceptable !

Nous voterons donc contre cet article 38, si l’amendement de suppression que nous avons déposé n’est pas adopté.

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