Intervention de Odette Terrade

Réunion du 15 novembre 2009 à 15h30
Financement de la sécurité sociale pour 2010 — Article 38

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

Nous souhaitons, au sein du groupe CRC-SPG, la suppression de l’article 38 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, car nous pensons qu’il constitue une mesure inacceptable, qui aura pour effet de réduire les pensions des femmes.

Se fondant sur le principe d’égalité entre les hommes et les femmes, la Cour de cassation, dans un arrêt de février 2009, a reconnu qu’un homme ayant élevé six enfants devait pouvoir prétendre aux mêmes avantages en matière de retraite qu’une femme.

Sous prétexte de tirer les conséquences de cette décision, le Gouvernement a entrepris de modifier les conditions d’attribution de la MDA en scindant en deux les années de majoration, quatre trimestres étant accordés de droit aux femmes au titre de la grossesse et quatre autres trimestres à l’un des deux parents, au choix du couple, au titre de l’éducation de l’enfant.

Nous pensons que cette solution serait une grave remise en question du droit des femmes, au surplus difficilement applicable, comme l’a dit mon collègue.

La majoration des durées d’assurance est un instrument social permettant de lutter contre les inégalités de traitement que subissent les femmes en ce qui concerne leur embauche, leur rémunération et l’ensemble de leur carrière.

L’objectif de cette majoration est de compenser ces inégalités réelles qui demeurent encore très fortes aujourd’hui, comme l’a encore souligné l’Observatoire des inégalités en janvier 2009.

Nous dénonçons donc cette disposition, qui traduit en réalité la volonté du Gouvernement d’utiliser une décision de justice pour justifier une réforme à coût constant, alors que d’autres pistes seraient possibles. En moyenne, je le rappelle, la MDA représente 19 % de la retraite des femmes.

Nous n’avons rien contre l’adoption d’une autre disposition qui permettrait aux pères de bénéficier également d’une majoration de durée d’assurance, dès lors que ceux-ci auraient été également victimes de plusieurs discriminations dans leur travail du fait de leur paternité.

Cependant, cette mesure ne doit pas se faire au détriment du droit des femmes, comme c’est le cas avec l’article 38.

La jurisprudence de la Cour de Strasbourg vient même appuyer notre position. Un arrêt du 12 avril 2006 concernant la différence d’âge de départ à la retraite entre les hommes et les femmes prévue par le régime vieillesse britannique, précise, en effet, que rien n’interdit à un État membre « de traiter des groupes de manière différenciée pour corriger des inégalités factuelles entre eux » et que « les autorités nationales se trouvent en principe mieux placées que le juge international pour déterminer ce qui est d’utilité publique en matière économique ou en matière sociale ».

Nous dénonçons donc la volonté du Gouvernement d’instrumentaliser une décision de justice pour justifier une réforme à coût constant.

On entend rogner sur le droit des femmes pour créer un droit au bénéfice des hommes. Pour notre part, nous refusons cette logique, raison pour laquelle nous proposons cet amendement visant à supprimer l’article 38.

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