Intervention de François Autain

Réunion du 15 novembre 2009 à 15h30
Financement de la sécurité sociale pour 2010 — Article 38

Photo de François AutainFrançois Autain :

Avec cet amendement, nous vous proposons de rendre sa vraie nature à la majoration des durées d’assurance.

En effet, les travaux préparatoires et les débats de 1971 sont clairs sur les motivations qui ont poussé le législateur à créer cette MDA.

Elle a été instituée pour compenser l’ensemble des inégalités dont sont victimes les femmes et les mères au travail. Ce qui était vrai en 1971, l’est toujours en 2009 : inégalités de salaire, manque de disponibilité, réel ou supposé, discriminations et sexisme chez les employeurs sont toujours à l’ordre du jour.

En 2009, les femmes gagnent encore entre 10 % et 25 % de moins que les hommes. Elles subissent souvent du temps partiel et peuvent moins faire d’heures supplémentaires.

Ces inégalités tirent grandement vers le bas le montant de leurs retraites. Victimes de discrimination au travail, elles le sont, encore une fois, à la retraite. Ce sont des réalités incontournables.

La majoration des durées d’assurance vise à corriger ces inégalités dans leur ensemble. Sa raison d’être est donc non pas uniquement la grossesse et l’accouchement, mais toutes les causes qui font qu’au travail, une femme ou une mère aura dû en permanence se battre pour arriver à concilier vie professionnelle et vie personnelle.

C’est cette vocation réparatrice que nous voyons disparaître dans la réforme de la majoration des durées d’assurance que vous proposez, monsieur le ministre.

Aujourd’hui, sous prétexte de mise en conformité du droit français, vous scindez la MDA en lui découvrant une autre nature pour les besoins de la cause : une majoration en partie fondée sur le fait d’avoir éduqué ses enfants indépendamment de toute conséquence sur la carrière.

La MDA des mères doit être conservée en totalité.

Dans la période actuelle, toujours durablement marquée par les inégalités entre hommes et femmes – inégalités encore accentuées au moment de la liquidation de la retraite –, des mécanismes compensateurs restent indispensables.

Le dispositif de la MDA est le principal avantage familial de retraite encore presque exclusivement réservé aux femmes.

La solution retenue ferait perdre en partie à la MDA sa vocation compensatrice et introduirait un fort risque d’érosion des retraites pour les femmes. Pour des raisons budgétaires, la France choisit donc de faire reculer le droit des femmes dans son pays !

Au nom de l’égalité entre les sexes – comment pourrions-nous y être opposés ? –, on vient rogner un droit qui a été accordé aux femmes justement pour compenser les inégalités qu’elles subissent par rapport aux hommes dans le monde du travail.

Invoquer un tel argument, c’est avoir la mémoire courte et ne pas regarder les réalités en face.

Nous ne serions pas contre un droit à des trimestres supplémentaires pour les pères qui apporteraient la preuve qu’ils ont été discriminés au cours de leur carrière, mais une telle disposition ne devrait pas avoir pour corollaire une diminution du droit des mères.

Encore une fois, l’insuffisance des ressources prévues dans ce PLFSS pour 2010 conduit à un nivellement par le bas et à une solution a minima qui ne satisfera personne.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion