Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 25 janvier 2006 à 21h30
Retour à l'emploi — Article 2, amendements 68 70 3 4

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

Monsieur le président, mes explications vaudront également pour les amendements n° 68 et 70, qui visent, eux, respectivement, à la suppression des articles 3 et 4 de ce projet de loi.

Ces trois articles créent la prime forfaitaire mensuelle, qui doit remplacer le système d'intéressement actuel.

En effet, il est déjà possible, dans les premiers mois de reprise d'un emploi, de cumuler sa rémunération et son allocation.

Le dispositif actuel est certes imparfait, mais il a au moins l'avantage d'être plus intéressant que la mesure proposée ici par le Gouvernement.

Par ailleurs, et avant de détailler quelque peu ce nouveau dispositif, je tiens à faire part de mon inquiétude face à l'alignement des trois allocations : revenu minimum d'insertion, allocation de solidarité spécifique et allocation de parent isolé.

Une fois encore, je tiens à rappeler que, contrairement à ce que le Gouvernement laisse entendre, ces trois prestations découlent de situations individuelles spécifiques, qui n'appellent pas le même traitement politique et législatif.

Le RMI et l'ASS ne correspondent pas au même public, car il faut avoir travaillé au moins cinq ans pour pouvoir bénéficier de l'ASS, et les droits sont issus des cotisations de chômage, donc du travail. C'est donc très différent du revenu de subsistance auquel correspond le RMI.

De même, l'API est une aide spécifique offerte aux parents - c'est-à-dire aux mères dans 95 % des cas - qui élèvent seuls leurs enfants et qui sont en grande difficulté. C'est encore différent du revenu de subsistance qu'est le RMI.

Pourtant, par le biais de l'intéressement, vous souhaitez commencer à aligner ces trois régimes pour n'en faire plus qu'un seul, a minima, probablement dans quelques semaines ou quelques jours.

Nous condamnons fermement cette volonté d'uniformiser dans ces conditions ces différents minima sociaux pour ne faire plus qu'une seule allocation.

Nous savons déjà qu'une telle réforme se fera nécessairement par le bas, et donc au détriment des plus démunis. C'est déjà le cas avec cette réforme de l'intéressement.

Par exemple, dans le système actuel, les bénéficiaires de l'API et du RMI peuvent disposer du cumul intégral de leur allocation et du revenu de leur travail pendant une période qui peut aller jusqu'à six mois. La période de cumul intégral est aussi de six mois dans le cadre de l'ASS.

Or le Gouvernement annonce que cette période de cumul intégral dans le nouveau dispositif sera de trois mois seulement, ce qui correspond à un manque à gagner très important pour les bénéficiaires de minima sociaux.

Par ailleurs, le système actuel n'est pas conditionné au temps de travail hebdomadaire : l'intéressement s'applique à tous dans les mêmes conditions. Dans ce projet de loi, une distinction est introduite selon la durée de travail hebdomadaire, ce qui fixera deux régimes d'intéressement différents.

Dans tous les cas, ce nouveau système de prime mensuelle demeure largement moins intéressant que le précédent pour les allocataires de l'ASS, qui était au départ le public directement visé par l'intéressement puisqu'il s'agit de salariés souvent âgés et chômeurs de très longue durée.

Sous couvert de simplification, vous multipliez les modes d'attribution et les critères.

En outre, comme ce système est largement défavorable, vous maintenez l'ancien système d'intéressement pour ceux qui en bénéficient déjà et l'on voit bien pourquoi.

Vous ne pouvez plus, madame la ministre, vous cacher derrière cette fausse excuse. Il faut afficher clairement votre ambition de restriction drastique des modes de financement de la solidarité nationale, probablement en vertu des déficits abyssaux du budget de l'État, et en débattre devant la représentation nationale.

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