Intervention de Nadine Morano

Réunion du 27 juin 2011 à 10h30
Développement de l'alternance et sécurisation des parcours professionnels — Discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Nadine Morano, ministre :

Tenir un tel discours ne peut venir que d’une intention manifeste de déformer la réalité.

En matière d’âge d’entrée en apprentissage, il faut rappeler les faits : notre droit prévoit déjà l’entrée des jeunes en apprentissage avant seize ans. Mais, pour protéger les jeunes, deux conditions doivent être remplies : avoir achevé le premier cycle de l’enseignement secondaire – le collège – et avoir au moins 15 ans au moment de la signature du contrat. Ces conditions ont été fixées par une circulaire du 30 mai 1997 et n’ont jamais été supprimées par la gauche lorsqu’elle était au pouvoir.

Le problème est que cette règle est source de difficultés lourdes et inutiles pour de nombreux jeunes qui ont suivi une scolarité sans accroc, mais qui, étant nés entre septembre et décembre, n’auront quinze ans qu’après la rentrée scolaire. Que doit-on conseiller à ces jeunes ? Redoubler ? Perdre un an ? Renoncer à un emploi futur grâce à l’apprentissage ?

Modifier une législation qui n’est plus adaptée, c’est faire preuve de pragmatisme, d’ambition pour la jeunesse et, surtout, de courage politique. C’est tout le sens de cette proposition de loi. Concrètement, avec ce texte, dès lors qu’un jeune aura fini sa classe de troisième, il pourra s’inscrire en apprentissage, même s’il est né après le mois de septembre.

La règle sera la même sur l’ensemble du territoire. Un jeune qui sera à moins de trois mois de son quinzième anniversaire n’aura pas à attendre un an après sa classe de troisième pour devenir apprenti.

Je souhaite maintenant détailler les principaux apports de ce texte.

Pour inciter les jeunes à s’engager vers l’apprentissage, il faut revaloriser le statut de l’apprenti. Une carte d’étudiant des métiers sera donc délivrée par le centre de formation d’apprentis, le CFA, et permettra à l’apprenti d’accéder aux mêmes réductions tarifaires que les étudiants de l’enseignement supérieur. Je sais combien Catherine Procaccia est attachée à cette mesure, à l’élaboration de laquelle elle a d’ailleurs été associée.

Parce qu’il faut également faciliter les relations entre les employeurs et les alternants ainsi que la vie des entreprises, ce texte tend à prévoir la création d’un service dématérialisé de l’alternance.

Parmi les apports de ce texte, je veux aussi citer la possibilité nouvelle, et indispensable, pour deux employeurs saisonniers d’embaucher un apprenti en signant une convention tripartite avec lui ou encore l’ouverture de l’apprentissage aux entreprises intérimaires. Avec de telles mesures, nous faisons preuve de pragmatisme, tout en répondant aux attentes qui s’expriment sur le terrain.

De même, un employeur et un salarié pourront désormais renouveler un contrat de professionnalisation dès lors que la qualification préparée permet d’améliorer celle qui est détenue par le salarié.

Par ailleurs, l’instauration d’un cadre légal pour les stages de découverte en entreprise proposés par certaines chambres consulaires pendant les vacances scolaires est une avancée importante pour mettre les jeunes en relation avec le monde professionnel.

Grâce au travail de la commission des affaires sociales et de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, de nouvelles avancées ont été apportées à ce texte depuis son vote par l’Assemblée nationale mardi dernier.

Grâce à un amendement de Mme la présidente Muguette Dini, les particuliers employeurs vont pouvoir recourir aux contrats de professionnalisation, sous réserve qu’ils bénéficient d’un accompagnement adapté aux besoins de leur statut. C’est une avancée importante pour ce secteur porteur d’emplois et d’activités non délocalisables, et cela permet aussi d’assurer l’avenir.

S’agissant de l’accès des apprentis au baccalauréat professionnel, le travail du Sénat permet d’instaurer un véritable système dit du « 1 + 2 » afin d’adapter l’apprentissage au baccalauréat professionnel en trois ans. Jusqu’à maintenant, alors que les lycéens pouvaient effectuer une classe de seconde professionnelle générale et se déterminer ensuite pour un certificat d’aptitude professionnelle ou un baccalauréat professionnel, les apprentis devaient arrêter leur choix dès la signature du contrat d’apprentissage. L’article 6, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale, permet aux apprentis de bénéficier de la même souplesse que les lycéens.

Mais l’amendement présenté par M. le président Jacques Legendre, M. Jean-Claude Carle, Mmes Catherine Procaccia et Colette Mélot permet d’aller encore plus loin. Désormais, les apprentis, tout en étant en contrat d’apprentissage, pourront suivre une année de préparation générale à l’issue de laquelle ils s’engageront soit vers un certificat d’aptitudes professionnelles, soit vers un baccalauréat professionnel.

Cette proposition de loi s’inscrit aussi dans la révolution culturelle que Xavier Bertrand et moi-même sommes en train de mener pour valoriser l’apprentissage. Afin de conduire cette révolution, des mesures concrètes ont été prises.

Pour les entreprises de moins de 250 salariés, deux dispositifs sont effectifs depuis le 1er mars : la compensation « zéro charge » pendant un an pour toute embauche supplémentaire d’un jeune en apprentissage ou en contrat de professionnalisation et la prime de 2 000 euros pour inciter les entreprises à conclure des contrats de professionnalisation pour des personnes de plus de 45 ans.

De même, la hausse de 3 % à 4 % du quota d’alternants pour les entreprises de plus de 250 salariés a été actée. Vous le savez, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2011, nous avons décidé de prendre en compte la piste proposée par les partenaires sociaux dans l’accord national interprofessionnel des jeunes afin de mieux accompagner et de valoriser les branches professionnelles qui s’engagent et qui ont des résultats.

Parce que je sais que l’action de l’État a aussi besoin de relais, j’ai organisé le 27 avril dernier une grande journée de mobilisation avec plus de 60 représentants des branches professionnelles. Des engagements ambitieux ont été pris : le secteur du paysage prévoit d’atteindre 10 % d’alternants par an, soit 7 000 apprentis ; les secteurs du commerce de gros et de détail visent respectivement une augmentation de 10 % et de 8 % des contrats de professionnalisation.

Pour aller encore plus loin dans la mobilisation des entreprises, j’organise demain une réunion d’échange et de travail avec les entreprises du CAC 40, qui signeront une charte en faveur du développement de l’alternance avec des engagements précis.

Parce qu’il est temps de changer le regard que notre pays porte sur l’apprentissage, j’ai aussi créé, le 7 avril dernier, le club de l’apprentissage dans le but de sensibiliser les jeunes et leurs familles. Ce club est animé par d’anciens apprentis devenus des références dans leur métier, comme le coiffeur Franck Provost ou le grand chef cuisinier Guy Savoy.

Par ailleurs, j’ai lancé une « communauté d’apprentissage » sur le site Viadeo pour mettre en relation les apprentis, les entreprises et leurs centres de formation.

Xavier Bertrand et moi-même avons lancé, le 5 mai dernier, une grande campagne nationale radiodiffusée de promotion de l’apprentissage, intitulée « Un métier, un diplôme, un revenu, c’est ça l’apprentissage ». Avec cette campagne, nous avons voulu faire comprendre aux jeunes que l’apprentissage était une voie royale vers l’emploi et un moteur de promotion sociale accessible à tous les niveaux de formation et dans tous les secteurs.

En trois semaines de campagne, près de 200 000 connexions au site Internet du ministère du travail, de l’emploi et de la santé – emploi.gouv.fr – ont été enregistrées, preuve, s’il en était besoin, que les familles et les jeunes se sont sentis intéressés et interpellés par cette campagne.

S’agissant des contrats d’objectifs et de moyens, ou COM, pour l’apprentissage portant sur la période 2011-2015, Xavier Bertrand et moi-même veillons à ce que toutes les régions prennent leurs responsabilités…

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