Intervention de Ronan Kerdraon

Réunion du 27 juin 2011 à 10h30
Développement de l'alternance et sécurisation des parcours professionnels — Demande de renvoi à la commission

Photo de Ronan KerdraonRonan Kerdraon :

Pourtant, le chômage des jeunes n’a baissé que de 6 %. Faut-il également rappeler que les financements, effectivement bien perçus par les régions, ne sont pas répercutés au niveau des missions locales ? J’en sais quelque chose pour en présider une !

Les objectifs affichés de la proposition de loi sont triples : améliorer la situation et l’insertion des jeunes sur le marché du travail par le développement de l’alternance, sécuriser les parcours professionnels tout au long de la vie, ouvrir le débat sur le partage de la valeur ajoutée. Il s’agit d’intentions louables, mais encore faudrait-il se donner les moyens de les concrétiser !

J’observe déjà que le texte dont nous débattons aujourd’hui est amputé des deux mesures phare qui avaient pourtant été annoncées : l’obligation d’embauche en alternance et la répartition de la valeur ajoutée.

Certes, tout n’est pas à rejeter dans cette proposition de loi, comme l’a souligné ma collègue Gisèle Printz. Nous saluons d’ailleurs la qualité du travail de notre rapporteur, qui a œuvré avec sérieux et conviction sur ce texte. Cet exercice était quelque peu malaisé compte tenu des conditions que j’ai décrites en débutant mon propos.

Cela étant posé, entrons dans le vif du sujet.

Nous reprochons à ce texte son caractère fourre-tout ainsi que la faiblesse des priorités affichées et des moyens financiers alloués. Il est fourre-tout, parce que les deux mesures phare ont été supprimées. Un tel manque d’ambition laisse une impression de bricolage.

En outre, ce texte comporte de fausses bonnes idées dont l’application pourrait entraîner des difficultés. Il en va ainsi de l’article 1er, qui a pour objet de créer une carte d’étudiant des métiers. En 2005, la loi dite « Borloo » l’avait déjà instituée sans grand succès. L’intérêt d’une telle mesure serait de contribuer à l’accès à la culture, aux transports, au logement et à l’ensemble des services nécessaires à l’apprenti. Nous formons le vœu qu’il en soit ainsi.

L’article 2 vise à mettre en place un service dématérialisé. Avait-on besoin d’une loi pour cela ? Le futur portail internet permettra-t-il réellement aux jeunes qui le souhaitent de trouver une première information sur les métiers, les conditions de travail, les parcours professionnels possibles ou les salaires pratiqués ?

Je crains également fortement que ce texte ne soit l’occasion pour le Gouvernement de mettre en application la vieille idée d’abaisser l’âge légal de l’apprentissage à quatorze ans.

Pour notre part, nous sommes totalement opposés à la remise en cause de l’obligation scolaire jusqu’à seize ans et nous souhaitons voir réaffirmer le fait que le contrat d’apprentissage est un contrat de travail. Il est nécessaire que les apprentis acquièrent, avant de quitter le collège, un socle commun de compétences. Qu’en est-il de l’instauration d’un véritable service public de l’orientation et de la formation des professeurs principaux ?

Nous sommes dubitatifs devant la possibilité offerte à deux employeurs saisonniers d’embaucher une même personne.

Une fois de plus, nous avons le sentiment que bon nombre de mesures visent à répondre aux attentes d’une partie du MEDEF. Il en va ainsi des groupements d’employeurs.

On pouvait – pourquoi pas ? – envisager d’introduire plus de souplesse dans le dispositif existant. Mais le texte prévoit de supprimer toutes les règles relatives au nombre de groupements auxquels une entreprise peut adhérer. De plus, la coexistence dans une même entreprise de salariés issus de plusieurs groupements d’employeurs, appliquant des conventions collectives différentes, est loin d’être un élément de sécurisation. Le risque est grand que les droits des salariés soient nivelés par le bas ! C’est non pas un principe de souplesse qui prévaudra, mais une absence totale de règles, ce qui permettra tous les abus.

Madame la ministre, vous affichez l’objectif d’atteindre 600 000 apprentis en 2015. Nous pourrions partager cette ambition quantitative si les moyens financiers étaient au rendez-vous ! Cette ambition a un coût : 1 milliard d’euros. Or le projet de loi de finances rectificative permet tout au plus de mobiliser 70 millions d’euros.

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