Madame le sénateur Eliane Assassi, je vous prie, tout d’abord, de bien vouloir excuser mon collègue Éric Besson, qui, actuellement en déplacement, regrette de ne pas pouvoir vous répondre en personne. Je le ferai donc en son nom, mais aussi au nom du Gouvernement solidaire sur cette question.
Avant de vous répondre sur le fond, je dois rétablir, par quatre remarques préliminaires, la vérité du contexte et des faits qui se sont déroulés le 3 février dernier dans les locaux de la caisse primaire d’assurance maladie d’Auxerre, car ils ne sont pas tout à fait conformes à ce que vous relatez.
Premièrement, cet étranger de nationalité angolaise n’a pas été « dénoncé » parce qu’il est en situation irrégulière sur notre territoire. Comment cela serait-il d’ailleurs concevable, alors que, comme vous l’avez fort justement souligné, c’est bien le rôle des caisses primaires d’assurance maladie de recevoir les personnes démunies en situation irrégulière pour ouvrir leurs droits à l’aide médicale de l’État ? Je rappelle que les bénéficiaires de l’AME, conformément à l’article L. 251-1 du code de l’action sociale et des familles, sont les personnes de nationalité étrangère résidant en France de façon ininterrompue depuis plus de trois mois, mais qui ne disposent pas d’un titre de séjour et dont les ressources annuelles ne dépassent pas le plafond applicable pour l’admission à la couverture maladie universelle, la CMU.
Deuxièmement, cet étranger s’est fait remarquer en produisant des papiers d’identité dont l’authenticité paraissait très douteuse : un passeport original périmé et la copie d’un passeport en cours de validité, avec des photos et des dates de naissance discordantes. Or, selon la réglementation en vigueur, tout demandeur de l’aide médicale de l’État ou de la CMU, ce qui est le cas de la personne dont nous parlons, doit justifier de son identité au moyen d’un passeport ou d’une carte nationale d’identité, voire d’un extrait d’acte de naissance traduit, d’un livret de famille traduit, ou de la copie d’un titre de séjour antérieurement détenu. Lorsque le demandeur n’est pas en mesure de justifier de son identité, la caisse primaire d’assurance maladie recherche tout autre document de nature à attester l’identité de la personne concernée.
Troisièmement, l’agent de la caisse primaire d’assurance maladie d’Auxerre a donc, à juste titre, pris l’attache téléphonique de la préfecture de l’Yonne pour vérifier la bonne identité du demandeur à partir des seuls documents présentés.
Les vérifications entreprises par les agents de la préfecture ont ainsi mis en évidence que l’intéressé faisait l’objet d’une fiche de recherche et qu’il était connu, sous deux alias, par plusieurs services de police judiciaire et de la police aux frontières pour vols simples ou aggravés, violences volontaires et infractions à la législation sur l’immigration.
Ce n’est pas l’agent de la CPAM qui a demandé à la police nationale de venir interpeller cette personne, mais bien le service des étrangers de la préfecture qui a eu le premier contact téléphonique avec le commissariat d’Auxerre.
Cela étant précisé, je puis vous certifier que cette personne, malgré le fait qu’elle persiste à rester en situation irrégulière depuis 2005 sur notre territoire, a été traitée conformément aux dispositions réglementaires, déontologiques et médicales qui encadrent les procédures de contrôle, de garde à vue et de placement en centre de rétention administrative.
Elle a ainsi pu voir à trois reprises un médecin notamment lors de sa garde à vue et au centre de rétention. Puis le médecin inspecteur de la santé publique du département de l’Essonne a indiqué que cette personne « devait bénéficier de soins en France pendant douze mois du fait qu’elle ne pouvait avoir accès à un traitement approprié dans son pays d’origine ». Sur instruction immédiate de la préfecture, elle a donc été libérée et a pu quitter le centre de rétention administrative sans aucune difficulté.
Comme vous le voyez, madame le sénateur, cette interpellation dans les locaux d’une caisse primaire d’assurance maladie, dont je viens de vous préciser le contexte et les circonstances réelles, n’est pas contraire aux missions de protection de la santé publique, aux règles du secret professionnel et au devoir de loyauté envers les assurés et les usagers de ce service public.
Elle est la simple traduction, sur un cas isolé qui ne saurait être associé à une dérive ou à un détournement des missions des CPAM, des conséquences normales du risque de fraude auquel les organismes sociaux sont légitimement très attentifs.