Je rappellerai quelques éléments à ce sujet.
La proposition de résolution élaborée par le groupe de travail sur le bilan de santé de la PAC, composé d’une douzaine de sénateurs de la commission des affaires économiques et présidé par notre collègue Jean Bizet, a été adoptée par le Sénat en octobre 2008. Se prononçant contre les propositions de la Commission et en faveur d’un « modèle d’agriculture équilibré, économiquement viable et écologiquement responsable », la Haute Assemblée a appuyé vos positions et contribué – du moins avons-nous la faiblesse de le croire – à leur succès.
Un autre moment important dans la phase préparatoire au bilan de santé de la PAC fut la réunion interparlementaire des 3 et 4 novembre 2008 à Bruxelles, au Parlement européen, que j’ai eu l’honneur d’ouvrir et de conclure, et à laquelle vous avez eu l’amabilité de participer, monsieur le ministre. Plusieurs centaines de parlementaires, tant du Parlement européen que des vingt-sept États membres, y ont échangé deux jours durant sur l’avenir de la politique agricole commune et le rôle de cette dernière en matière de sécurité alimentaire. Cette réunion a été très riche en intervenants, si l’on songe qu’étaient également présents la commissaire européenne à l’agriculture et au développement rural, Mariann Fischer Boel, le président du Parlement européen, Hans-Gert Pöterring, le président de la commission parlementaire de l’agriculture, Neil Parish, ou encore le directeur général de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, la FAO, Jacques Diouf. Au-delà de divergences sur certains points, la quasi-totalité des intervenants des différents pays s’est accordée sur la nécessité d’une agriculture européenne productive, durable et territorialement ancrée, ce qui passe par une politique agricole forte et régulatrice des marchés.
Troisièmement, tous ces efforts n’ont pas été vains, puisque la version finale du bilan de santé préserve les intérêts de la France et, au-delà, de l’Europe agricole. Cependant, alors que la mise en œuvre de ce bilan de santé est discutée dans chaque État membre, des questions surgissent. Je voudrais vous en livrer trois, monsieur le ministre.
La première concerne le contenu de cette mise en œuvre. L’accord européen du 20 novembre dernier donne aux vingt-sept États membres jusqu’au 31 juillet 2009 pour décider des mesures d’application au niveau national, qui concerneront uniquement – c’est important de le préciser – des aides attribuées à l’automne 2010. Le 23 février dernier, vous avez présenté les modalités de mise en œuvre retenues par la France, monsieur le ministre. Je ne reviendrai pas sur leur contenu, que nous connaissons tous et qui a fait l’objet de nombreux commentaires, pour beaucoup positifs, pour certains plus critiques. Pour ma part, je m’en tiendrai à vous apporter mon soutien dans les décisions difficiles, mais courageuses, que vous avez prises, qui visent à rééquilibrer les aides aux différentes filières en fonction de leurs évolutions économiques respectives, tout en continuant d’orienter notre agriculture vers l’impératif de la durabilité.
Les trois groupes de travail que vous avez lancés ont été mis en place au mois de mars et devront rendre leurs conclusions entre l’été et novembre. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer plus précisément les sujets principaux sur lesquels travailleront ces groupes et la marge de manœuvre dont ils disposeront ? Aborderont-ils, notamment, le problème des zones intermédiaires, évoquées par M. de Raincourt, qui sont fragilisées par les prélèvements prévus sur les aides directes au titre du premier pilier ?
Une étude de l’INRA parue au mois de mars dernier montre en effet que ce sont ces territoires qui souffriront le plus de la réforme. Certains producteurs pourraient voir leurs soutiens diminuer de près de 10 000 euros par an. Il existe de réelles inquiétudes sur ce point, et toutes les informations que vous pourrez nous donner à ce sujet seront les bienvenues.
Ma deuxième question, très liée au bilan de santé, concerne l’assurance récolte.
Dans un contexte de réduction des soutiens publics, la gestion des risques climatiques par des mécanismes assurantiels doit constituer une priorité. Monsieur le ministre, vous soutenez financièrement le développement de l’assurance récolte dans les secteurs les plus exposés, et la commission des affaires économiques n’a eu de cesse de vous encourager en ce sens, que ce soit lors du vote de la dernière loi d’orientation agricole ou des lois de finances adoptées au cours de ces dernières années.
Or les accords obtenus dans le cadre du bilan de santé de la PAC offrent de nouvelles opportunités en permettant l’utilisation de crédits communautaires pour cofinancer l’incitation nationale. À partir de 2010, par le biais d’un prélèvement sur les paiements directs, la prise en charge publique pourra atteindre jusqu’à 65 % de la prime et sera constituée à 75 % de crédits communautaires, ce dont je tiens à vous remercier, monsieur le ministre. Dans ce cadre, vous avez annoncé la mobilisation d’une enveloppe de 100 millions d’euros pour l’assurance récolte via l’article 68 du nouveau règlement PAC.
Le règlement d’application du bilan de santé sera essentiel à cet égard, notamment la définition des critères selon lesquels les phénomènes climatiques pourront donner lieu à indemnisation. À cette occasion, il conviendra d’obtenir que la situation française soit prise en compte. Pouvez-vous d’ores et déjà nous dire, monsieur le ministre, à quel emploi vous destinez plus précisément ces 100 millions d’euros ? Comment analysez-vous le basculement progressif du dispositif porté par le Fonds national de garantie des calamités agricoles vers le système assurantiel ?