Le maintien de cette institution dépend de résultats futurs, qui devront être probants.
Toutefois, il semble que le Gouvernement n’ait pas pris toute la mesure des différents avertissements, préconisations ou propositions formulés ces deux dernières années. Le projet de loi présenté le 1er avril dernier en conseil des ministres soulève légitimement de vives interrogations. Réduit à six articles, le texte se présente comme une réforme de plus. Seul son article 4 vise l’AFA et prend en compte la nécessité de préciser les missions de conseil à l’attention des usagers. Il prévoit l’habilitation générale de l’institution dans les pays d’origine, et non plus dans les seuls États signataires de la convention de La Haye.
L’article 3 du texte tend à instaurer l’obligation, pour le titulaire de l’agrément, de confirmer chaque année son projet d’adoption et, pour les conseils généraux, de le vérifier systématiquement. Je soutiens une telle mesure.
Mais l’objet principal de ce projet de loi est de réformer une fois de plus l’article 350 du code civil, relatif à la procédure de déclaration judiciaire d’abandon. Depuis son introduction, en 1966, cet article n’a cessé d’être remanié puisqu’on compte six modifications à ce jour. Or il ne peut être considéré comme une variable destinée à compenser la dénatalité ni comme un droit des adoptants.
Si j’entends parfaitement les arguments qui ont guidé la position adoptée dans le projet de loi, je rappelle que l’accueil d’un enfant par l’aide sociale à l’enfance est non pas une fin en soi, mais un temps donné, un moyen. La mission de l’ASE est de tout mettre en œuvre pour ne pas rompre le lien entre les parents et l’enfant, pour permettre à ce dernier de retrouver sa place auprès des siens.
Nous l’avons entendu, certains enfants vont de foyer en foyer, de famille d’accueil en famille d’accueil et sont dans une instabilité affective complète : ce n’est pas acceptable ! Des solutions doivent être trouvées.
Ne l’oublions pas, l’adoption est au carrefour de plusieurs demandes, qui sont toutes légitimes : celle d’un couple en désir d’enfant, celle d’un enfant en manque de parents. Mais c’est bien l’intérêt de l’enfant qui doit avant tout être privilégié et non le désir des adultes.
En 2005, déjà, les « cas de grande détresse » avaient été exclus de cet article, afin d’augmenter le nombre d’enfants français adoptables. Ne peut-on aujourd’hui tirer un premier bilan de cette évolution législative avant de poursuivre la réforme ? Pourquoi limiter le débat au seul article 350 du code civil ?
L’adoption simple est une solution, tout comme le parrainage. Que faisons-nous pour les pupilles de l’État, qui, en situation d’être adoptés, ne trouvent pourtant pas de famille ? Ils sont un millier !
Une fois encore, le Gouvernement va nous demander de légiférer. Nous nous devons de lancer la réflexion et d’entamer un large débat. C’est cela, réformer !
Une fois de plus, le Gouvernement n’a malheureusement pas fait le choix de recentrer ce débat essentiel autour de l’intérêt de l’enfant. Des questions restent en suspens. Quels projets offrir aux enfants pupilles de l’État, qui, dans la pratique, ne sont pas adoptés du fait de leur âge, de leur fratrie ou de leur handicap ?
Il est également nécessaire de doter les enfants d’un statut stable dans les cas de parents-couples homosexuels.
Il convient aussi de faciliter l’accès aux origines des enfants adoptés.
Mesdames les secrétaires d’État, je crains que, en l’état, ce projet de loi que nous serons appelés à examiner prochainement ne représente qu’une occasion manquée supplémentaire. Il est regrettable que les pouvoirs publics ne se donnent pas les moyens d’un débat à la hauteur de nos devoirs vis-à-vis de ces enfants. Car c’est bien de devoirs qu’il s’agit.