Intervention de Hélène Luc

Réunion du 2 février 2005 à 15h00
Statut général des militaires — Article 5

Photo de Hélène LucHélène Luc :

La question des droits politiques et syndicaux des militaires se pose avec une acuité particulière.

Effectivement, en 2005, nous pouvons légitimement nous demander, mes chers collègues, pour quels motifs les droits politiques et syndicaux ne s'exerceraient pas dans les cantonnements et les casernements

Il y a une certaine hypocrisie à interdire aux militaires ce que l'ensemble des êtres humains s'autorisent. En effet, il existe aujourd'hui des vecteurs d'information échappant au contrôle de quelque autorité que ce soit, et les militaires ne sont pas moins ouverts à leur usage que les autres membres de la communauté nationale.

De même, le fait qu'un ancien officier général de notre armée de terre, désormais hors du cadre d'active, exerce aujourd'hui des fonctions électives au niveau européen ne nous semble pas critiquable.

Mais, au-delà de cette hypocrisie, qu'il convient de faire disparaître, demeurent les termes mêmes de ce qui fonde le socle de notre démocratie, à savoir le bloc de constitutionnalité, comme ce qui est appelé à le renforcer.

Je prendrai quelques exemples.

L'article X de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, texte incontestable, dispose : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. ». Et l'article XI ajoute : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la Loi. ». Ces dispositions, madame la ministre, ne sont pas en contradiction avec ce que vous avez dit tout à l'heure.

Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, en son sixième alinéa, énonce : « Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. » Cela vaut bien sûr aussi pour l'article 6 que nous examinerons tout à l'heure.

Par ailleurs, comment ne pas rappeler ici les termes de l'article 4 de la Constitution du 4 octobre 1958 ?

« Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie.

« Ils contribuent à la mise en oeuvre du principe énoncé au dernier alinéa de l'article 3 » - il s'agit de la parité entre les hommes et les femmes - « dans les conditions déterminées par la loi. »

En outre, pour achever cette analyse objective de la situation, il convient de citer la Charte des droits fondamentaux, dont le projet de traité constitutionnel européen que nous examinerons bientôt fait l'un de ses pivots. Elle indique, en son article 12 : « Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association à tous les niveaux, notamment dans les domaines politique, syndical et civique, ce qui implique le droit de toute personne de fonder avec d'autres des syndicats et de s'y affilier pour la défense de ses intérêts.

« Les partis politiques au niveau de l'Union contribuent à l'expression de la volonté politique des citoyens ou citoyennes de l'Union. »

Par conséquent, mes chers collègues, il nous faut désormais être cohérents : ou bien on considère que les cantonnements militaires sont des lieux dans lesquels n'ont pas à s'appliquer les règles constitutionnelles en vigueur ni celles que l'on souhaite voir mises en oeuvre dans les meilleurs délais ; ou bien on décide, avec un large consensus, que ces dispositions s'y appliquent, et il convient alors de mettre le statut général des militaires en conformité avec celles-ci. C'est pourquoi nous vous demandons, mes chers collègues, de voter cet amendement.

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