Intervention de Claude Jeannerot

Réunion du 19 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Article 31

Photo de Claude JeannerotClaude Jeannerot :

L’article 31 a au moins un mérite : mettre en lumière les difficultés, inégalités et discriminations auxquelles sont confrontées les femmes dans la sphère professionnelle.

Je les rappellerai brièvement. Au moment de leur départ à la retraite, les femmes perçoivent une pension inférieure de 44 % en moyenne à celle des hommes. En outre, plus de la moitié des retraitées touchent une pension inférieure à 900 euros.

Deux raisons principales expliquent ces écarts injustifiés : les femmes sont généralement moins rémunérées que les hommes et leurs carrières sont plus « heurtées », notamment en raison de la maternité et des emplois précaires qu’elles occupent.

Cette réforme des retraites était donc l’occasion de lutter contre les inégalités, notamment en permettant aux femmes de conserver le droit de partir à la retraite à 60 ans et de bénéficier d’une pension à taux plein à 65 ans. Notre devoir n’est-il pas de faire respecter le préambule de la Constitution de 1946, qui dispose que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme » ?

Or nous regrettons que le présent texte ne fasse qu’ajouter des inégalités aux inégalités. Il n’est en effet qu’un bien maigre palliatif à l’inexorable discrimination dont les femmes sont victimes, d’autant que son adoption aura pour conséquence de créer de nouvelles injustices et d’accroître mécaniquement les écarts et les inégalités entre les hommes et les femmes.

En effet, en allongeant la période d’activité, les auteurs de ce texte supposent que le passage de l’emploi vers la retraite se produit de façon naturelle. Or cette hypothèse, vous le savez, mes chers collègues, se révèle particulièrement erronée pour ce qui concerne les femmes. Près du tiers d’entre elles, contre environ 20 % des hommes, a connu le chômage avant d’arriver à l’âge de la retraite.

D’ailleurs, 30 % des femmes salariées, contre 5 % des hommes, attendent d’avoir atteint l’âge de 65 ans pour liquider leurs droits à la retraite, faute de disposer auparavant du nombre de trimestres suffisant pour obtenir une pension à taux plein.

Les femmes âgées de 60 à 65 ans sont très nombreuses à connaître le chômage et la précarité. En relevant l’âge légal de départ de 60 à 62 ans et l’âge du bénéfice d’une pension à taux plein de 65 à 67 ans, cette période de précarité s’allongera de facto : le montant des pensions des femmes et leurs conditions de vie en souffriront tout particulièrement !

Pour lutter contre ces phénomènes, nous proposons de renforcer les dispositions contenues dans l’article 31 : il s’agit d’augmenter les pénalités financières et de les fixer à 3 % de la masse salariale en cas d’absence d’accord ou de plan d’action relatif à l’égalité salariale, et aussi de renforcer les dispositifs permettant de limiter les moyens dilatoires destinés à contourner le paiement de cette pénalité. De plus, nous prévoyons que l’inspection du travail procède annuellement au contrôle de l’application de l’accord ou du plan d’action dans l’entreprise.

Monsieur le ministre, vous défendez un projet de loi qui ne permet pas de lutter contre les inégalités entre les hommes et les femmes en matière de retraite. Pis, ce texte risque de les accroître. Les amendements que nous défendons ont précisément vocation à corriger les risques que font courir aux femmes les dispositions que vous nous proposez d’adopter.

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