Vous l’aurez compris, le périmètre d’application de l’article 31 sera fort restreint.
Nous applaudirions encore des deux mains si la mesure était d’application immédiate, mais son entrée en vigueur n’est prévue qu’à l’horizon de 2012.
Vous l’aurez compris aussi, la mesure n’est pas pour demain mais pour plus tard, et rien n’exclut qu’à l’orée de 2012 ce délai soit encore repoussé, de la même manière que le présent projet de loi prend simplement acte du non-respect de la date limite précédemment fixée au 31 décembre 2010 et l’efface.
Nous applaudirions des deux mains si la pénalité prévue était fixée à un niveau réellement dissuasif. Or le taux de 1 % de la masse salariale est un maximum et sera modulé « en fonction des efforts constatés dans l’entreprise […] ainsi que des motifs de sa défaillance ». Il est donc très vraisemblable qu’il sera le plus souvent moindre ou nul et que les entreprises, à partir de 50 salariés, préféreront provisionner ce risque plutôt que de se contraindre au respect des prescriptions légales.
Vous l’aurez encore compris, il est à craindre que ce qui n’était pas respecté hier ne le soit pas beaucoup plus demain : à l’heure actuelle, moins de 5 % des accords de branche abordent la question de l’égalité professionnelle et les rapports prennent la forme de coquilles vides et de déclarations de principes.
Nous applaudirions enfin des deux mains s’il était possible de dissocier cette mesure du contexte. Mais elle est malheureusement insuffisante et impuissante à modifier, à elle seule, l’ampleur des écarts de pension subsistants entre les hommes et les femmes. Elle le sera d’autant moins que les mesures d’âge contenues dans le projet de loi aggraveront mécaniquement la situation des quatre cinquièmes des femmes de 65 ans qui sont en moyenne, à cet âge, au chômage depuis vint ans et six mois et devront le rester deux ans de plus pour avoir droit à une retraite sans décote.
Nous ne cessons de vous alerter sur la précarisation de l’emploi féminin, la montée du travail à temps partiel et celle du chômage, qui annihilent les effets de la progression du taux d’activité des femmes sur le montant de leur pension. L’écart, de 40 % par rapport à celles des hommes, reste deux fois plus important que celui qui existe entre les salaires. Ainsi, 62 % des allocataires du minimum vieillesse sont des femmes. Nous ne cessons de vous poser la question : à quoi sert d’imposer deux années supplémentaires de travail quand il n’y a pas de travail ?
C’est en effet la donnée la plus inquiétante de toutes que celle de la stagnation des écarts actuels entre les hommes et les femmes, pour laquelle le Conseil d’orientation des retraites n’envisage pas d’amélioration à un horizon prévisible.
Outre la portée très limitée que je viens de mettre en évidence, l’effectivité de la disposition dépendra au surplus des mesures de suivi, que l’article 31 renvoie à la compétence réglementaire et dont on ignore le contenu.
En résumé, cet article constitue une petite avancée potentielle en contrepartie d’un grand recul immédiat ! Nous voterons contre !