Intervention de Ronan Kerdraon

Réunion du 19 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Article 32

Photo de Ronan KerdraonRonan Kerdraon :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on ne le répétera jamais assez : l’avenir des retraites se joue aussi et surtout sur le marché du travail.

Aujourd’hui, le taux de chômage des jeunes explose : 23, 7 %.

Parallèlement, le taux d’emploi de la classe d’âge de 55 à 64 ans est en France de 38, 9 %, ce qui au regard de la moyenne européenne nous place dans une situation difficile car elle est de 46 %.

Plutôt que de mettre à plat les dispositifs existant en matière d’insertion professionnelle des jeunes et des seniors, évaluant ainsi les mesures qui fonctionnent et celles qui ne font qu’entretenir la précarité et la sortie de l’emploi de ces catégories de salariés, plutôt que de prendre des mesures d’envergure qui s’imposent à nous en cette période de crise et alors que Pôle Emploi dérive, vous décidez de nous proposer cet article 32, dans lequel il n’y a aucune mention des jeunes !

Vous attendez sans doute le projet de loi de finances pour 2011 pour nous annoncer la suppression des outils d’insertion pourtant indispensables pour aider les jeunes à trouver un emploi !

Monsieur le ministre, pensez-vous sérieusement que l’article 32 soit la solution miraculeuse à la résolution du problème de l’emploi des seniors ?

Belle originalité ! Souvenons-nous : à la suite de l’accord national interprofessionnel du 13 octobre 2005, des mesures avaient été prises et sont demeurées pratiquement sans effet. Seulement quelques « CDD seniors », réservés aux plus de 57 ans, pour dix-huit mois renouvelables une fois, ont été signés.

Constatant que ce CDD ne fonctionne pas, vous en créez un nouveau : une sorte de « CDD senior nouvelle génération ».

Il s’agit de faire bénéficier, pendant un an, les entreprises qui recrutent en CDI ou CDD de plus de six mois des demandeurs d’emploi de plus de 55 ans d’une aide égale à 14 % du salaire brut.

Une question au préalable : considérez-vous sérieusement qu’un CDD d’au moins six mois définisse un emploi stable ?

Que va-t-il se passer à l’issue du contrat ?

L’employeur est libre de ne pas reconduire le CDD du salarié et d’en recruter un autre, pour bénéficier lui aussi de cette mesure.

Autre scénario envisageable : le salarié en fin de CDD peut se voir proposé par l’employeur un autre contrat précaire sur un poste différent, avec un salaire diminué de 14 %...

Et le pire, c’est que le salarié serait contraint d’accepter de telles décisions car il devra attendre 62 ans pour avoir le droit de partir à la retraite et 67 ans pour avoir une retraite à taux plein.

Vous devriez requalifier la section 3 du chapitre III du titre III du livre Ier de la cinquième partie du code du travail : Aide à la précarité des seniors. Cela aurait le mérite de la cohérence !

Avouez quand même qu’il n’y a pas matière à s’enthousiasmer... et même Laurence Parisot a déclaré : « Un allégement par cibles de personnes est assez peu efficace et même discriminatoire. »

En reculant l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans, vous transformez des retraités en chômeurs.

En refusant de prendre des mesures d’envergure pour résoudre le problème du chômage des seniors, vous les cantonnez à être des chômeurs de longue durée.

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