Intervention de Guy Fischer

Réunion du 19 octobre 2010 à 21h30
Réforme des retraites — Article 32 bis A

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

L’article 32 bis A de ce projet de loi vise à pérenniser dans le temps le dispositif de la retraite progressive, qui, avouons-le, n’a pas encore – c’est peu dire ! – trouvé son public. On peut d’ailleurs rapprocher cette situation des mécanismes de cumul emploi-retraite, qui ne parviennent pas, eux non plus, à convaincre les salariés.

Pour mémoire, je rappelle que la retraite progressive permet aux salariés qui ont aujourd’hui plus de 60 ans, demain ce sera au-delà de 62 ans, de réduire leur temps de travail et de poursuivre ainsi leur activité professionnelle à temps partiel. Pour éviter une diminution de leurs ressources, la réduction du temps de travail entraîne l’ouverture immédiate de leurs droits à pension.

Notre rapporteur, Dominique Leclerc, voit dans ce dispositif un mécanisme de cohérence en lien étroit avec le tutorat. Telle n’est pas notre conviction.

Les salariés que nous avons rencontrés nous ont plutôt décrit un mécanisme permettant aux plus usés d’entre eux qui ne disposent pas d’un niveau de retraite suffisant, notamment en raison de l’application des décotes, de réduire leur activité, c’est-à-dire, en fait, d’amoindrir les incidences négatives du travail sur leur santé.

Autrement dit, l’indigence des mesures que vous proposez en matière de pénibilité, qui se limitent à une seule prise d’acte de la situation d’invalidité du travailleur, couplée au report à 62 ans de l’âge légal de départ à la retraite et à 67 ans de celui permettant de bénéficier d’une retraite sans décote, conduira les salariés les plus affaiblis par le travail à demander à bénéficier de ce dispositif.

Celui-ci sera financé, de fait, par les salariés, puisqu’il sera compensé par leurs droits à la retraite, ce qui permettra au Gouvernement de satisfaire l’exigence principale du patronat en matière de pénibilité : surtout ne rien payer !

C’est bien votre refus de reconnaître le droit à un départ anticipé à la retraite en cas de pénibilité qui vous conduit à proposer une telle mesure de substitution.

Nous ne saurions nous satisfaire de cela. Rappelons que, pour nous, tout travail pénible doit s’accompagner d’un départ à la retraite anticipé, sans décote ni réduction. Si nous proposons cela, c’est que nous sommes convaincus que la pénibilité réduit l’espérance de vie en bonne santé des salariés. Et rien, aucun modèle économique, ne justifie que le travail ait un impact sur l’espérance de vie.

Enfin, monsieur le ministre, permettez-moi de réagir à la proposition formulée dans cet article, visant à permettre aux salariés concernés par ce dispositif de cotiser sur une base correspondant à un temps plein, alors qu’ils sont, dans les faits, à mi-temps.

Si nous comprenons la démarche, nous la trouvons illusoire. Les salariés qui peinent à boucler leurs fins de mois, qui doivent aider leurs enfants et, parfois, leurs parents dépendants, n’ont pas les moyens de cotiser davantage. Nous préférerions, quant à nous, que les employeurs bénéficiant de ce dispositif, qui leur permet de contourner leur responsabilité sociale en matière de pénibilité et de souffrance au travail, soient pour leur part contraints de cotiser sur une base concernant un temps plein, et ce sans que les salariés soient astreints à une telle mesure.

Les salariés de notre pays méritant un véritable droit à retraite anticipée, nous manifestons notre opposition à l’article 32 bis A.

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