Intervention de Marie-Agnès Labarre

Réunion du 19 octobre 2010 à 21h30
Réforme des retraites — Article 32 bis C

Photo de Marie-Agnès LabarreMarie-Agnès Labarre :

Ah, qu’ils étaient beaux, les discours enfiévrés de la majorité sur notre précieux pacte républicain, sur la solidarité entre les générations, sur la sacro-sainte retraite par répartition qu’il fallait à tout prix sauvegarder par des mesures douloureuses mais tellement nécessaires !

Et puis, patatras, surgit l’article 32 bis C de ce superbe projet de loi !

C’est par inadvertance, sans doute, que l’aveu est formulé à la fin de l’article et que la dernière salve est tirée. L’avenir de la retraite, mes chers collègues, est tracé : ce sera l’épargne-retraite, constituée, vous avez bien lu, « sur une base volontaire ou obligatoire, à titre privé ou lors de l’activité professionnelle ». L’entreprise de démolition se poursuit donc.

La méthode est insidieuse qui pousse les Français vers des modes de financement individuels de la retraite, retraite qu’au passage ils paieront deux fois : une fois par répartition pour les retraités d’aujourd’hui, une fois par capitalisation pour eux-mêmes, s’ils le peuvent.

Cette méthode du catastrophisme est éprouvée : vous la mettez en œuvre dans l’hôpital public, à La Poste et partout où l’occasion vous est offerte. Vous organisez la faillite du système pour mieux l’achever. Vous dégradez les comptes publics pour justifier la grande braderie des biens nationaux.

Parce que le comble du cynisme n’est jamais atteint et que le temps presse, vous ne résistez pas à brandir, au moment même où nos compatriotes ont le plus mal au porte-monnaie, le chiffon rouge de la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF. Vous n’êtes jamais à court de provocations.

« L’épargne retraite vise à compléter les pensions dues au titre des régimes de retraite par répartition », écrivez-vous.

Comment mieux dire que les pensions sont insuffisantes et vont baisser ? Comment mieux nous convaincre que la retraite par répartition sera la retraite du pauvre ?

Les turbulences des marchés financiers sont déjà oubliées : la ruine de millions d’épargnants ne vous aura pas servi de leçon. Décidément, l’appétit des vautours qui guident vos pas est plus fort que tout !

Voilà donc les fonds de pension renforcés et rendus obligatoires dans le système de retraite des Français, avec les profits pour les uns et les risques pour les autres, mais toujours les mêmes ! Peu vous importe, visiblement, que les fonds de pension créent une nouvelle inégalité au détriment des plus faibles, ceux qui n’ont pas les moyens, ceux qui ont du mal à boucler leurs fins de mois. En votant ce texte, vous enfoncerez délibérément un coin de plus dans la cohésion nationale !

Le peuple français est dans la rue parce qu’il n’en peut plus de cette litanie de mesures qui vont toujours dans le même sens ! Il n’en peut plus de voir bafoués, jour après jour, les principes de l’égalité républicaine ! Il n’en peut plus de voir se creuser tous les jours davantage l’écart entre les riches, toujours plus riches, et les pauvres, toujours plus pauvres, et plus nombreux.

Le moyen de financer un bon niveau de retraite par répartition existe, vous le savez, mais vous avez préféré, une fois encore, rompre le fil de notre tradition républicaine. Nos débats, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, et vos excès ont montré que nos conceptions de la Nation n’étaient pas conciliables.

Arrêtez maintenant le train de l’injustice et laissez-nous faire : nous mènerons une politique de plein emploi, nous mettrons un terme aux exonérations et autres niches à rentiers, nous oserons toucher aux profits spéculatifs, nous inverserons le cours de la répartition de la richesse nationale.

La France est riche, mais sa richesse est confisquée. Le « Hiroshima social » de M. Accoyer, c’est notre Eldorado républicain !

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