L’article 32 ter B du projet de loi reconnaît de manière explicite que les fonds placés par les salariés dans des dispositifs d’épargne retraite courent les plus grands risques.
Il s’agit en effet « d’éviter que les salariés ne soient exposés à des risques élevés de perdre leur épargne retraite placée sur un PERCO », et de « prévoir, à l’instar du plan d’épargne retraite populaire, ou PERP, la mise en place d’une convention de gestion qui limite progressivement le niveau de risque des placements du salarié au fur et à mesure de l’approche de la retraite ».
Cette formule, qui vise plutôt, en bon français, à essayer d’éviter des catastrophes, est appelée par l’exposé des motifs de l’amendement à l’Assemblée nationale, « désensibilisation de l’épargne ». On ne saurait mieux décrire les vices inhérents à la retraite par capitalisation.
Pourquoi, alors, a-t-on fait ce choix ?
L’article 1er de la loi du 21 août 2003 n’assurait-il pas que la Nation « réaffirme solennellement, dans le domaine de la retraite, le choix de la répartition, au cœur du pacte social qui unit les générations » ? L’actuel Premier ministre, M. François Fillon, expliquait à l’époque : « L’UMP fait le choix de consolider un régime par répartition, et pas de changer de système de retraite ».
Pourtant, loin de refuser les fonds de pension, la loi française empruntait finalement au système américain ses dispositifs de retraite par capitalisation les plus risqués, car les plus individualisés.
Avec le nouveau plan d’épargne individuel pour la retraite, ou PEIR, la France se dotait d’un clone des individual retirement accounts américains.
Cette forme d’épargne purement individuelle, subventionnée à coups d’exonérations fiscales supplémentaires, peu favorables au comblement des déficits publics, s’ajoute aux multiples formes d’épargne subventionnée existantes, et ce alors que la France est déjà un des pays où l’impôt sur les revenus du capital est particulièrement faible.
Le plan partenarial d’épargne salariale volontaire pour la retraite, ou PPESVR - lui-même clone des plans américains à cotisations définies dits « 401 (k) », plans de sinistre mémoire - est venu s’y ajouter.
Et que penser de ce souci affiché du Gouvernement « d’éviter que les salariés ne soient exposés à des risques élevés de perdre leur épargne retraite, en mettant en place une convention de gestion limitant progressivement le niveau de risque des placements du salarié au fur et à mesure de l’approche de la retraite » ?
Pourtant, cette valorisation est souvent obtenue « grâce » aux charrettes de licenciements, qui touchent tous les jours des masses de personnes à travers le monde, avant, un jour, de toucher ces salariés eux-mêmes.
Quelles catastrophes essaie-t-on, ici, d’éviter ?
En outre, il existe dans la France d’aujourd’hui, avec ses problèmes de déficits, un autre vice inhérent aux dispositifs de retraite par capitalisation. En effet, pour amener les salariés et les entreprises à cotiser dans des fonds bloqués jusqu’à la retraite, il faut multiplier les exonérations fiscales et sociales.
En 2000, dans un fameux rapport, Jean-Baptiste de Foucauld estimait que chaque euro d’épargne salariale faisait déjà, à l’époque, perdre 0, 45 euro à la protection sociale et 0, 12 euro au budget de l’État, par rapport à 1 euro de salaire.
Le plus absurde, dans cette affaire, c’est que, contrairement à l’économie américaine, l’économie française n’a pas vraiment besoin de développer l’épargne des ménages. Si ce taux devait encore monter sous l’impact de la réforme des retraites, l’activité économique s’en trouverait ralentie d’autant.
Autrement dit, le Gouvernement s’apprête à creuser les déficits publics, et particulièrement les déficits sociaux, en subventionnant une épargne nuisible à l’activité économique.