Intervention de Jean-Claude Peyronnet

Réunion du 14 septembre 2010 à 14h30
Dissimulation du visage dans l'espace public — Adoption définitive d'un projet de loi

Photo de Jean-Claude PeyronnetJean-Claude Peyronnet :

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, je suis chargé de vous présenter dans une intervention volontairement courte la position du groupe socialiste.

Le groupe socialiste, dans son unanimité, partage les objectifs du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, visant à interdire la dissimulation du visage dans l’espace public.

Ce texte concerne tous les moyens de dissimulation, mais il n’a échappé à personne que c’est le port du voile intégral, le niqab arabe ou, surtout, de la burqa afghane par un certain nombre de femmes qui motive l’intervention du législateur.

Certes, selon l’enquête du ministère de l’intérieur, cette pratique ne concerne en France que 1 900 femmes, mais le risque de prolifération de ce phénomène comportemental, qui porte atteinte aux principes fondamentaux du pacte républicain, est réel.

Porter le voile intégral, c’est peut-être se protéger, mais c’est aussi s’exclure de la société. Ce n’est même pas en contester les principes, c’est nier son existence. Ce n’est pas un refus d’intégration, c’est le refus pur et simple de communiquer avec les autres, le refus de vivre ensemble, fondement pourtant de la vie sociale et de la paix civile. C’est donc une atteinte irrémédiable au principe de fraternité, qui suppose l’échange.

Le port du voile, c’est aussi une atteinte incontestable à l’égalité, car cette pratique ne concerne que les femmes : elle est, par nature, d’essence machiste.

Déjà, pour éviter les quolibets et, surtout, les injures, nombreuses sont les jeunes filles de banlieue à être obligées de renoncer à la jupe ou à la robe. Certaines, et c’est de plus en plus souvent le cas, finissent par ajouter le voile au pantalon, pour ne pas être agressées. Ainsi, aux yeux des jeunes hommes qui les surveillent, signifient-elles une pureté sexuelle qui, de fait, leur est imposée. Mais cette contrainte exprime aussi et surtout la soumission. Déjà !

Le port de la burqa constitue une étape supplémentaire vers l’isolement et la marginalisation qu’il convient, à l’évidence, d’empêcher.

Il s’agit d’une violence insupportable faite aux femmes, qui les conduit à l’enfermement, à nier leur existence par rapport au monde et par rapport à elles-mêmes, à nier leur condition de femme, et même d’être humain. L’aboutissement est d’en faire un objet de tous les caprices de leurs frères, surtout de leur mari et, plus rarement, de leur père, car ce comportement saute souvent une génération. Sont surtout touchées par le phénomène de jeunes femmes, qui peuvent croire, dans un premier temps, s’affirmer en s’opposant à leurs parents et se précipitent ainsi volontairement dans le port de cet attirail, qui deviendra très vite le signe et le moyen de leur aliénation.

Il s’agit donc d’un sujet complexe, et je ne suis pas sûr que, sur la forme, la déclaration du Président de la République, selon lequel la burqa « n’est pas la bienvenue en France », soit heureuse. Cette expression pouvait donner à penser que le port de la burqa est une pratique culturelle que la culture française ne peut pas accepter. Or ce ne sont pas deux cultures qui se confrontent. Ce qui est profondément en cause, ce sont les relations entre les hommes et les femmes et ce moyen commode pour l’homme d’exprimer sa domination absolue sur sa femme. C’est inacceptable !

Ce comportement porte-t-il atteinte au principe de laïcité ? J’ai remarqué que la défense de ce principe n’est pas évoquée dans l’exposé des motifs du projet de loi. Je crois, madame le ministre d’État, que vous avez eu raison de procéder ainsi.

Si le principe de laïcité, entendu au sens strict du terme, était en cause, cela voudrait dire que seraient concernées la liberté de conscience et la liberté religieuse, tout simplement.

Or l’obligation dont nous parlons ne repose sur aucun fondement religieux. Les représentants du culte musulman en France l’ont proclamé de façon très ferme. Il ne s’agit donc que d’une dérive, récente, d’inspiration talibane. On peut l’assimiler à une dérive sectaire et la traiter comme telle. Le fait que l’on présente sur les plateaux de télévision ou de radio de jeunes femmes qui revendiquent, quelquefois de façon véhémente, leur adhésion au port du voile intégral ne change pas grand-chose à l’affaire. L’aliénation peut fort bien emprunter les voies du volontariat apparent, même si elle est le résultat, on le sait bien, d’un véritable lavage de cerveau.

Simone de Beauvoir l’a affirmé très simplement : « Le consentement des victimes ne légitime rien ! » Le sectarisme est coutumier de ces cas d’aliénation volontaire.

Si donc l’on invoque le principe de laïcité, ce ne peut être au sens religieux du terme, mais, de façon tout aussi importante, au sens large du terme, par la mise en cause du « vivre ensemble » dans la République, qui suppose la tolérance et le respect de l’autre. Porter la burqa, c’est manquer de respect à l’ensemble du corps social.

Il est ainsi difficile de ne pas invoquer la mise en cause de la liberté de choix pour ce qui concerne la plupart des femmes contraintes à porter ce vêtement. Elles sont à coup sûr des milliers dans le monde à ne pas avoir la liberté de ne pas le porter. Pour mesurer cette contrainte, il suffit d’évoquer le comportement de nombreuses femmes afghanes qui ont dévoilé leur visage lorsque, hélas ! de façon temporaire, l’emprise des talibans sur la société afghane s’est relâchée. Elles nous ont alors expliqué qu’elles retrouvaient leur dignité.

Le dernier principe est plus trivial, mais c’est le moins contestable : c’est celui de la sûreté, de l’ordre public, l’ordre public immatériel que je viens d’évoquer, qui repose sur la dignité de la personne humaine, mais, surtout, l’ordre public matériel, qui repose sur la sécurité.

En ces temps de risques terroristes, il est difficile de laisser une personne complètement voilée s’approcher d’un bâtiment public. De même, il est également impossible de lui confier ses enfants à la sortie de l’école, faute de certitude sur l’identification.

3 commentaires :

Le 22/09/2023 à 21:19, aristide a dit :

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"Le port du voile, c’est aussi une atteinte incontestable à l’égalité, car cette pratique ne concerne que les femmes : elle est, par nature, d’essence machiste."

Vous déniez le droit aux femmes de porter le voile du fait de leur propre volonté, c'est vous qui êtes machiste.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 22/09/2023 à 21:21, aristide a dit :

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"Simone de Beauvoir l’a affirmé très simplement : « Le consentement des victimes ne légitime rien ! »

Vous parlez du consentement des filles à ôter leur foulard ou leur abaya en entrant dans les lycées ? En effet, cela ne légitime en rien la loi raciste et anti-laïque de 2004.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 23/09/2023 à 09:00, aristide a dit :

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"L’aliénation peut fort bien emprunter les voies du volontariat apparent, même si elle est le résultat, on le sait bien, d’un véritable lavage de cerveau."

Quand on veut noyer son chien, on dit qu'il a la rage... En attendant que la raison revienne, la France est condamnée à l'ONU et au conseil de l'Europe pour sa scandaleuse politique raciste et discriminante.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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