Madame la présidente, madame le ministre d’État, mes chers collègues, je m’exprimerai au nom des sénateurs du Parti de gauche du groupe CRC-SPG.
Tout d’abord, avant de vous exposer notre position sur ce projet de loi, nous tenons à souligner que nous regrettons la façon dont ce projet de loi a été mis en scène, et nous souhaitons marquer notre distance vis-à-vis des membres de la majorité qui se veulent aujourd’hui les grands défenseurs des droits des femmes et de la dignité humaine, alors même que ce sont eux qui, aujourd’hui comme hier, s’attaquent à ces principes républicains.
J’en viens à notre position en faveur de l’interdiction de la dissimulation du visage dans l’espace public.
Le port du voile intégral est avant tout un traitement dégradant pour la femme qui le porte. En premier lieu, il réduit les femmes à être un simple objet sexuel, une proie sexuelle potentielle. Comme il serait ennuyeux de crever les yeux des hommes, seule la dissimulation permet de soustraire l’objet du désir à la concupiscence naturelle, et donc légitime, de tous ceux qui le regardent.
J’ajouterai qu’il est également dégradant pour les hommes d’être perçus comme de simples prédateurs obsédés par le sexe opposé.
En voilant sa femme, l’homme s’octroie le droit exclusif de la regarder, possédant un « droit de regard » qui va naturellement de paire avec le « droit d’user et d’abuser ».
Or un être humain ne peut être la propriété d’un autre. Cela est fondamentalement contraire à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui proclame que les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. C’est également contraire à l’article 1er de la Constitution, qui garantit que la France « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race ou de religion ».
Dans une République, la volonté de vivre ensemble suppose l’acceptation du regard d’autrui, la possibilité de voir et d’être vu par les autres. Dès lors, la femme voilée est niée comme personne particulière puisque son voile annonce qu’elle n’existe pas, non seulement parce qu’il est impossible de l’identifier, mais aussi parce que, étant consciente de ce fait, elle proclame ainsi qu’elle se nie elle-même en tant que sujet autonome.
Donner le spectacle d’une telle auto-humiliation est un trouble manifeste à l’ordre public.