Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à souligner la grande qualité de ce débat. Certes, comme toujours, il a été recouru à quelques figures de style politiciennes, mais cela était sans doute inévitable et je ne m’en offusquerai pas.
Je relèverai surtout, pour m’en réjouir, le rejet unanime du communautarisme qui s’est exprimé et l’attachement que vous avez manifesté, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, aux fondements de la République, à l’égalité, au respect dû aux hommes.
Dans ces conditions, il est regrettable qu’un consensus complet n’ait pu voir le jour pour des raisons étrangères au texte, d’autant que, depuis le début de la réflexion, menée notamment par la commission d’information parlementaire, tout a été fait pour y associer tous les partis politiques de notre pays et pour rechercher ensemble des solutions acceptées de tous.
Cela étant, l’essentiel est que l’expression de l’attachement aux valeurs de la République soit la plus large possible et constitue une affirmation forte de notre rassemblement autour des principes et des valeurs inscrits dans notre Constitution.
Je remercie M. Buffet du travail qu’il a accompli. L’intervention du législateur est nécessaire et ne saurait dépendre du nombre de personnes dissimulant leur visage sur la voie publique, car les règles de notre « vivre ensemble » et les principes qui fondent notre pacte républicain sont en jeu.
Vous avez rappelé à juste titre qu’il n’existe aucune liberté individuelle illimitée. Même la liberté de se vêtir comme on le souhaite n’exclut pas l’interdiction de circuler sans aucun vêtement dans un espace public. Toute liberté trouve ses limites là où commence celle des autres : c’est un principe que nous connaissons tous, et c’est bien au législateur qu’il incombe d’assurer la conciliation entre les différentes libertés, conformément à l’article IV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Madame Hummel, parmi les principes républicains bafoués par la dissimulation du visage dans l’espace public figure celui de l’égalité, auquel nos concitoyens sont très fermement attachés. Certes, il y a encore du chemin à faire pour que l’égalité entre les hommes et les femmes, qui est l’un des aspects de ce principe, devienne réalité, mais en tout état de cause le présent texte n’a d’autre objet que d’assurer le respect mutuel dans l’espace public.
Le présent texte prône le rassemblement, la concorde ; il a pour seul objet de permettre à chacun de trouver dans l’espace public un espace de respect mutuel.
Madame Borvo Cohen-Seat, il convient d’éviter les amalgames, même si c’est parfois difficile. Tel est l’esprit qui sous-tend ce projet de loi et la démarche suivie depuis l’origine. Élaborer un texte de loi est nécessaire : contrairement à ce que certains orateurs ont soutenu, on ne peut, en l’espèce, se référer à des textes existants. S’agissant d’apporter une restriction à une liberté, seul le législateur est habilité à intervenir.
Quant au risque juridique, il me semble que vous l’exagérez quelque peu. Dans son rapport de mars 2010, le Conseil d’État, je le redis, s’est borné à relever que, à ce jour, le Conseil constitutionnel n’avait pas précisément défini ce qu’est l’ordre public « sociétal », « social » ou « immatériel », quelle que soit l’appellation retenue. Le Conseil constitutionnel a simplement laissé entrevoir, dans certaines de ses décisions, qu’il reconnaissait l’existence de celui-ci.
J’ajoute, madame le sénateur, que c’est un élu appartenant à votre parti qui est à l’origine de la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la pratique du port du voile sur le territoire français.