Madame la présidente, madame la ministre d’État, mes chers collègues, j’exposerai ici la position de la majorité, et non de la totalité, des membres du groupe socialiste. D’autres collègues exprimeront ensuite la position qui est la leur.
Ce débat a été de qualité. Chacun a défendu ce qu’il croyait être juste au regard d’objectifs clairs : le respect de la dignité des femmes, de l’égalité entre l’homme et la femme et du principe de la laïcité. Sur ces points, notre groupe est, à l’évidence, unanime.
Pour nous, une telle loi ne saurait se borner à formuler un message, monsieur Alduy. En effet, une loi a pour fonction de fixer le droit, de définir des règles s’appliquant à tous. Une loi doit donc pouvoir être appliquée.
Madame la ministre d’État, vous avez indiqué tout à l’heure qu’il était nécessaire, à votre sens, que l’interdiction soit de portée universelle. Je tiens à rappeler que nous avons voté, il y a quelque temps, des dispositions concernant le voile qui n’étaient pas de portée générale ; elles s’appliquaient dans un certain nombre de lieux publics, pour des raisons fortes tenant au respect de la laïcité. Il nous semble par conséquent possible de formuler des interdictions qui ne soient pas de portée générale.
J’ai déjà rappelé la position du Conseil d’État, je n’y reviendrai pas. Les dispositions de l’alinéa 2 de l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme limitent les restrictions à la liberté de manifester sa religion ou ses convictions à ce qui est strictement nécessaire « dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».
Il apparaît clairement, nous semble-t-il, qu’eu égard à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui tient compte des traditions constitutionnelles du pays concerné, que l’interdiction générale et absolue inscrite dans le texte fait courir un risque réel de censure. Nous pensons, pour notre part, qu’il est préférable de prendre cet élément en compte de manière que la loi soit applicable et sûre juridiquement. Je le redis, nous ne voudrions pas que des personnes hostiles à nos valeurs républicaines puissent annoncer demain qu’elles ont gagné ! Il s’agit là pour nous d’un point très important.
Conformément à la position définie par le parti socialiste dans ses délibérations, ainsi qu’à la position arrêtée par la majorité du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, la majorité des membres de notre groupe ne prendra pas part au vote. Il s’agit d’une décision mûrement réfléchie au regard des principes, des questions évoquées et de ce qui pourrait se passer à l’avenir.