Quoi qu'il en soit, je puis vous dire que les populations concernées sont très attentives à ce que la loi de la « plus grande gueule » - pardonnez-moi d'être en l'occurrence un peu vulgaire - ne commande pas la République.
La « mission granite » a échoué sur le front des manifestations. Or le nucléaire doit être une affaire française, il doit mobiliser la solidarité nationale, car il s'agit d'un grand projet. Je comprends très bien qu'il y ait des manifestants, je comprends très bien que le nucléaire suscite des inquiétudes, mais je ne comprends pas, en revanche, que l'autorité de la République soit proportionnelle à la longueur des cortèges...
Enfin - et vous nous avez déjà, sur ce sujet, monsieur le ministre, apporté des réponses à l'occasion d'autres débats -, qu'en est-il de la poursuite parallèle des recherches sur les deux autres formes de traitement des déchets, l'entreposage en sub-surface et la transmutation ?
Je poserai sur ce sujet une question précise sur les couches géologiques profondes et sur la réversibilité.
La réversibilité est un problème technique, elle a un coût. Est-elle cependant une nécessité ? J'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous nous donniez votre point de vue sur ce sujet. Peut-être d'ailleurs nous direz-vous, ce que je comprendrais parfaitement, qu'à ce stade des études la question de la réversibilité ne peut être tranchée. Mais l'on en reviendrait alors à la question précédente, que je répète : comment utiliser au mieux les années allant de 2006 - date du vote de la loi - à 2020-2025, lorsque le site de stockage géologique profond sera opérationnel ?
J'en viens à ma deuxième exigence, celle d'un nécessaire débat national.
Je souhaite rendre hommage au courage et à l'obstination de Claude Birraux et de Christian Bataille, que je salue. Ils ont en effet contribué à dépassionner le débat sur les déchets nucléaires et à élever le niveau des échanges sur ce sujet. Si, dans ce domaine, nous avons toujours des conflits et des opinions différentes - et il est normal qu'il en soit ainsi -, le degré de technicité et d'argumentation des uns et des autres a néanmoins utilement contribué à élever et à dépassionner le débat.
C'est la raison pour laquelle nous aimerions que ce débat, qui est aujourd'hui cantonné soit aux populations concernées, que nous représentons, soit aux esprits passionnés, - lesquels sont, reconnaissons-le, minoritaires -, puisse se dérouler à l'échelon national. Nous aimerions que les Français, qui bénéficient de la remarquable ressource de l'électronucléaire, puissent débattre, par civisme, avec beaucoup de sérénité et de solidité, dans la transparence et dans un esprit de responsabilité, des questions liées à la fin de cycle dans le domaine nucléaire. Ces questions ne sont pas plus difficiles à évoquer que d'autres ! Elles gagnent en tout cas à être débattues publiquement.
Par ailleurs, nous souhaiterions que les grands acteurs concernés s'engagent et qu'ils ne donnent pas parfois le sentiment qu'ils « refilent le bébé » au plus faible d'entre eux. Il est évident que l'ANDRA, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs - même si elle n'est pas la principale bénéficiaire du traitement des déchets -, que le CEA, dans le cadre de ses recherches, que AREVA, du fait de son activité industrielle dans la fabrication de combustibles et de sa participation dans Framatome, ou encore que EDF, par exemple, ont un intérêt à ce que l'électronucléaire soit un succès.