Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 13 avril 2005 à 22h00
Eau et milieux aquatiques — Article 37

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Le II de l'article L. 213-10-9 concerne les prélèvements exonérés de la redevance. Cet amendement vise à compléter la rédaction en prévoyant l'exonération des prélèvements effectués pour le maintien d'étiage des rivières et en précisant que ne seraient pas exonérés les prélèvements d'exhaure des mines, c'est-à-dire les eaux que l'on retire de la mine, utilisés à des fins commerciales quelles qu'elles soient, que ces prélèvements soient réalisés en faveur des particuliers ou de l'industrie.

Je me permets de faire un peu de pédagogie car je sais que l'expression « eaux d'exhaure » n'a pas de réelle signification pour tout le monde.

L'article 37, que nous étudions actuellement, insère dans le code de l'environnement un article L. 213-10-9 qui fixe les règles relatives à la redevance pour prélèvements sur la ressource en eau et prévoit notamment d'exonérer de cette redevance quatre catégories de prélèvements.

Par le biais de cet amendement, nous tenons à compléter la rédaction de l'alinéa relatif à l'exonération des prélèvements des eaux d'exhaure de mines.

Tout d'abord, permettez-moi de rappeler brièvement les problèmes que posent actuellement les eaux d'exhaure, qui sont, rappelons-le, des eaux d'infiltration recueillies et expulsées des galeries. Pendant toute la durée de l'exploitation des mines de fer, comme des mines de charbon, l'eau d'exhaure constitue une eau brute de bonne qualité. Elle ne nécessite alors pas de traitement important et peut être distribuée comme eau potable. De plus, elle suffit largement aux besoins des populations proches. C'est pourquoi sa distribution s'est répandue. Aussi, après avoir été ramenée à la surface, l'eau est distribuée aux communes des alentours afin de pourvoir à leurs besoins en eau potable.

Cependant, l'arrêt de l'exploitation des mines a souvent pour conséquence première, malheureusement, l'arrêt du pompage, l'ennoyage des galeries et des puits ainsi qu'une pollution de l'eau et donc un important problème d'alimentation des communes proches.

En général, quelques mois après le début de l'ennoyage, la présence de sulfates est détectée. En effet, lorsque les eaux passent sur les roches qui étaient auparavant au contact du dioxygène de l'air, les sulfures de fer contenus dans le minerai s'oxydent et donnent des sulfates. Une eau sulfatée est pour longtemps - entre dix et vingt années - impropre à la consommation. Par exemple, le taux de sulfates dans l'eau d'exhaure grimpe parfois jusqu'à 1 000 milligrammes par litre, alors que le seuil de potabilité de l'eau n'admet que 250 milligrammes par litre.

Aujourd'hui, il est difficile de traiter ces eaux très chargées en sulfates. II faudrait aller chercher des réserves d'eau très loin afin de pouvoir, par exemple, faire des coupages, ce qui pose de gros problèmes financiers. D'où la construction de chaînes de nanofiltration avec membranes, dont le coût reste élevé. Ces stations où l'on traite l'eau captent les sulfates, et l'eau déminéralisée est mêlée à de l'eau d'exhaure.

Dans quelques années, ces techniques de traitement des eaux d'exhaure vont, puisque nous en sommes à des phases expérimentales, s'améliorer, tout comme la qualité de ces eaux. Par conséquent, il sera plus facile d'exploiter ces millions de mètres cubes d'eau présents dans les galeries.

C'est pourquoi, afin d'éviter toute exploitation abusive des eaux d'exhaure, il nous semble particulièrement utile de préciser que les prélèvements d'exhaure de mines utilisés à des fins commerciales ne doivent pas être concernés par l'exonération. Ainsi, dès lors qu'une personne exploite cette eau à des fins commerciales, quelles qu'elles soient, il est normal, selon nous, qu'elle doive acquitter une redevance.

Il ne faudrait pas, une fois de plus, que les populations des bassins miniers, qui subissent les conséquences de « l'après-mines », ne puisent pas bénéficier de cette véritable richesse située sous leur sol. Mes chers collègues, vous encore entendu parler récemment de Moutiers, commune située dans ma circonscription, à laquelle ont été annoncés des risques d'effondrements brutaux parce que les galeries ont été mal exploitées. Il ne faudrait pas, une fois de plus, que des grandes sociétés puissent profiter d'une richesse et en tirer un profit sans qu'aucune contrepartie financière ne leur soit demandée.

Par ailleurs, il nous semble important de préciser que les prélèvements effectués pour le maintien d'étiage des rivières seront, eux, exonérés de la redevance car ces prélèvements participent à la bonne gestion des cours d'eau. Souvent, lorsque l'on arrête de pomper l'eau pour les alimenter, les rivières deviennent de véritables égouts à ciel ouvert. Il faut donc à tout prix soutenir les étiages.

Pour conclure, en tant que sénatrice de Meurthe-et-Moselle, je puis vous affirmer que de nombreuses communes du bassin houiller lorrain, proches des galeries d'exploitation, souhaitent retrouver une eau normale et ainsi pouvoir, d'une part, alimenter leur population à partir de cette eau et, d'autre part, maintenir l'étiage des rivières.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.

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